Intérieur, visite chez Nicolas Devuyst (à publier)

Dans le séjour, cohabitent meubles iconiques -- comme les chaises d'Arne Jacobsen et de Harry Bertoia, au fond -- et mobilier standard, sous le regard bienveillant d'une girafe en papier maché. © FRÉDÉRIC RAEVENS
Fanny Bouvry
Fanny Bouvry Journaliste

Si les bâtiments multifonctionnels à grande échelle tardent à se multiplier, beaucoup de particuliers ont déjà fait le pari de marier habitat et lieu de travail. Illustration avec cette maison contemporaine très lumineuse, où vivent et bossent l’architecte Nicolas Devuyst et sa compagne, coiffeuse.

On vit vraiment avec le jardin et le décor change chaque jour, au fil des mois.

Ces deux-là ont peut-être trouvé la recette du bonheur, celle qui leur convient en tous cas. Lui, Nicolas Devuyst, est architecte, travaille à domicile et a pensé ce projet avant même de la rencontrer. Elle, Christelle Lebon, est coiffeuse et a établi son salon ici, il y a moins de deux ans. Aujourd’hui, cette famille recomposée, avec quatre enfants, vit en harmonie dans une habitation baignée par le soleil, qui commence sa course à l’arrière du bâtiment pour se coucher côté rue… Non sans avoir inondé une dernière fois le séjour, grâce aux décrochements des volumes qui génèrent des failles où les rayons peuvent se faufiler tout au long de la journée.

Derrière une façade audacieuse en acier Corten, se cache un foyer où il fait bon vivre et travailler, tous ensemble, notamment dans ce séjour où Nicolas Devuyst a installé son bureau d'architecture.
Derrière une façade audacieuse en acier Corten, se cache un foyer où il fait bon vivre et travailler, tous ensemble, notamment dans ce séjour où Nicolas Devuyst a installé son bureau d’architecture.© FRÉDÉRIC RAEVENS

Dès l’entrée, sur une chaussée très fréquentée de Rixensart, le propos est posé. La façade en acier Corten et la toiture plate annoncent qu’ici, l’architecture contemporaine a droit de cité –  » C’est un peu ma carte de visite, insiste le propriétaire. Et puis, ce matériau est noble : il s’autopatine, ne nécessite pas d’entretien et est recyclable.  » Une fois la porte poussée, c’est néanmoins l’antre de Christelle que l’on découvre en premier : deux fauteuils en cuir façon barbier italien, des lampes noires repérées à Ibiza et une peinture métallique brossée donnent au salon un petit air de boudoir.

En toute convivialité

Quelques pas, et on se retrouve dans le séjour, complètement ouvert et presque entièrement vitré. C’est là que Nicolas a installé son bureau, dans une alcôve qui lui permet de rester en contact permanent avec ses enfants, son chien et sa compagne, via une petite fenêtre qui le relie visuellement à la pièce de coiffure.  » Cela ne conviendrait peut-être pas à tous les couples, avoue-t-il. Mais pour nous, c’est génial. Il y a beaucoup de convivialité dans ce séjour et nos ados s’y sentent bien également, ils ne restent pas enfermés dans leur chambre !  » Ce lieu à vivre ensemble se prolonge par une terrasse couverte que les occupants utilisent en toutes saisons. Un jeu de panneaux coulissants en bois, homemade, permet d’intimiser cet espace extérieur, et par ailleurs de protéger l’intérieur de la chaleur en été.  » On vit vraiment avec le jardin et le décor change chaque jour, au fil des mois « , se réjouit le Brabançon.

Pour accéder à l'étage inférieur, celui des chambres, un escalier monolithique et très graphique en béton.
Pour accéder à l’étage inférieur, celui des chambres, un escalier monolithique et très graphique en béton.© FRÉDÉRIC RAEVENS

Les chambres, elles, sont semi-enterrées dans le sol. Une situation atypique qui a permis de ne pas monter le volume trop haut, pour éviter de faire de l’ombre aux voisins, mais qui répond, en parallèle, à un souhait personnel du concepteur :  » Quand j’ai imaginé cette construction, je désirais vraiment rompre avec les endroits où j’avais vécu avant, soit des maisons de ville, à Bruxelles puis à Wavre, où je dormais toujours sous toiture, ayant froid en hiver et chaud en été. Je voulais pallier ces frustrations du passé. Mettre la partie nuit dans le sol, c’est recréer un cocon, un peu comme la caverne de l’homme de Cro-Magnon, et assurer un grand confort thermique pour dormir.  » En sous-sol, on trouve donc cinq chambres, bénéficiant toutes d’un éclairage naturel grâce à des baies en bandeau.

En voie de colonisation

La cuisine est composée de modules Ikea et d'un plan de travail en Corian sur mesure. Des panneaux en bois prédécoupés donnent une touche chaleureuse à la pièce.
La cuisine est composée de modules Ikea et d’un plan de travail en Corian sur mesure. Des panneaux en bois prédécoupés donnent une touche chaleureuse à la pièce.© FRÉDÉRIC RAEVENS

L’aménagement d’intérieur est également à l’image de cette rencontre et de cette osmose qui s’est installée entre Nicolas et Christelle. Il aimait le blanc, les atmosphères très épurées. Elle, à son arrivée, a d’abord proposé d’ajouter du noir, puis du bois, à l’instar de ces panneaux prédécoupés et collés dans la cuisine, qui offrent une touche chaleureuse et texturée à la composition.

Le mobilier, lui aussi, oscille entre deux mondes : des icônes d’époque – comme les chaises 7 d’Arne Jacobsen ou ces deux petits fauteuils grillagés de Harry Bertoia – flirtent avec du mobilier du géant suédois de l’ameublement. Pour la cuisine, les habitants ont encore opté pour des modules Ikea mais ont fait réaliser le plan de travail en Corian sur mesure. Çà et là, ils ont également pris plaisir à apporter leur touche personnelle, créant par exemple un meuble de rangement sous l’escalier en béton ou une porte de vestiaire. Quelques oeuvres viennent booster la composition comme cette photo grand format de Benjamin Struelens (lire par ailleurs) ou cette drôle de girafe en papier mâché qui domine l’espace de vie… Une création de troisième maternelle d’un des mômes !

Le salon de coiffure, inspiré d'Ibiza.
Le salon de coiffure, inspiré d’Ibiza.© FRÉDÉRIC RAEVENS

C’est ainsi que chacun trouve son compte dans ce logis contemporain qui aurait pu rester léché et froid mais qui a été colonisé par une famille, avec beaucoup de sensibilité, au gré de ses besoins.  » Pour moi, la modularité de l’espace est vraiment cruciale. Le salon de coiffure était au départ un garage, puis est devenu un salon d’appoint pour les kids, puis la chambre des parents, raconte Nicolas qui, en tant qu’architecte, réalise essentiellement des logements unifamiliaux dans les environs. De même, le sous-sol pourra être modifié quand les enfants seront partis, et devenir, pourquoi pas, un studio indépendant à louer. Une maison se doit d’être évolutive, puisque la vie l’est aussi « , conclut-il.

3 questions à Benjamin StruelensLe rixensartois signe la photo xxl dans le salon de l’habitation.

Comment êtes-vous venu à la photo ?

Je suis parti pour la première fois en Haïti à 16 ans, en 1994, avec un ami photographe, Yves Fonck. J’ai ainsi découvert le pays de naissance de mon frère, le chorégraphe Nono Battesti, et de ma soeur, la chanteuse Dyna B. Ce compagnon de voyage m’a appris à  » regarder ce que l’on voit « . A la fin de mes humanités, Yves Fonck m’a engagé comme assistant et j’ai pris des cours du soir en parallèle. Progressivement, j’ai privilégié des images aux teintes vives et aux cadrages  » structurés « . J’ai développé également un goût pour l’architecture moderniste.

Et pour les clichés du bout du monde…

J’ai fait mon premier  » vagabondage urbain  » à New York, en 2006, par hasard… J’avais l’opportunité de monter une expo dans un restaurant mais je n’avais pas de clichés d’à-propos. L’idée d’un sujet sur Big Apple est née. Je n’ai pas cherché à montrer la statue de la Liberté ou Central Park. J’avais envie de ma laisser guider par la lumière. Il y a quelque chose à photographier partout et à tout moment.

L’oeuvre exposée chez Nicolas Devuyst est shootée après le tremblement de terre d’Haïti…

Certaines photos s’imposent en noir et blanc. Comme celle-ci, qui montre le quartier de Jalousie, sur les hauteurs de Port-au-Prince. Cette zone qui grandit de manière vertigineuse a été relativement épargnée en 2010. L’image est réalisée tôt le matin, depuis la colline d’en face, dans une zone plus chic. Je suis à chaque fois impressionné en voyant cette fourmilière croître sans limites.

www.benjamin-s.com

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