Faut-il avoir peur des filtres solaires?

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Isabelle Willot

Entre le soleil du jour et nous, c’est un peu amour-haine. D’autant plus que l’on entend aujourd’hui des voix s’élever pour accuser les filtres solaires d’être mauvais pour la santé. Des avis marginaux vivement décriés par les dermatologues et les pharmaciens qui pointent eux le seul vrai danger réellement prouvé: celui de développer un cancer cutané en cas d’exposition sans protection.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que sur ce sujet sensible qui refait surface chaque année à la même saison, les avis sont partagés à défaut d’être nuancés. Il y a d’un côté les défenseurs des filtres solaires à tout crin – un discours davantage présent en Asie et aux Etats-Unis – qui préconisent d’utiliser une protection solaire toute l’année. Et puis les autres qui s’inquiètent des effets néfastes que les filtres chimiques et minéraux pourraient avoir à long terme sur notre organisme. Le magazine français 60 millions de consommateurs réputé pour son discours radical à l’encontre de l’industrie cosmétique défend cette deuxième thèse. Dans sa dernière édition, il a passé au crible les crèmes solaires dites « familiales » soit particulièrement ciblées pour les enfants en leur appliquant trois critères : efficacité de la protection, toxicité potentielle et qualité de l’étiquetage. L’an dernier, le titre avait déjà été épinglé par les fabricants parce que ses méthodes de mesure ne répondaient pas aux mêmes standards que ceux de l’industrie. Si ceux-ci peuvent être contestés – la quantité de produit appliquée par exemple ne correspond pas à ce qui se passe dans la réalité où l’on en met en pratique toujours moins -, ils permettent au moins de comparer des résultats obtenus selon les mêmes critères.

Cette fois, l’étude conclut qu’il n’y aurait aucune différence entre les produits « adultes » et les produits « enfants » si ce n’est leur prix, plus élevé. Du côté des professionnels, on regrette en tout cas l’absence d’une quatrième critère, crucial lorsqu’il s’agit d’appliquer régulièrement – soit environ toutes les deux heures – de la crème à des enfants: la qualité de la galénique et les propriétés waterproof ou anti-sables qui n’ont ici pas du tout été prises en compte. Car c’est bien au final de cela qu’il est question: une protection solaire ne sera efficace que si elle est appliquée correctement. Plus c’est simple – grâce à l’usage d’un spray notamment ou d’un produit très fluide qui ne colle pas – plus on aura tendance à se forcer à en remettre. Pour avoir une idée, il faudrait consommer l’équivalent d’un shot de 30 ml à chaque application! Ce qui reviendrait à utiliser un demi flacon environ par personne et par jour… Et ce ne sont pas les fabricants mais les dermatologues qui le disent.

Reste la question délicate de l’éventuelle toxicité des filtres chimiques et minéraux. Certains reprochent aux premiers de contenir des substances comme l’ocrocrylène et l’homosalate potentiellement allergènes voire même accusées d’être des perturbateurs endocriniens. Une hypothèse décriée par de très nombreux professionnels de la santé comme Céline Couteau et Laurence Coiffard, toutes deux enseignantes en pharmacie et cosmétologie à l’Université de Nantes et totalement indépendantes de l’industrie cosmétique. « Proposer ce type d’informations totalement erronées risque de se traduire par une désaffection vis-à-vis des produits solaires contenant des filtres organiques seuls produits efficaces du marché », assurent-elles sur le site theconversation.com. Avec dans le sous-titre le risque lui bien démontré de développement de cancers cutanés. Comme toujours, l’excès nuit en tout. Dans une stratégie bien pensée de protection contre les dangers du soleil, le crème ne devrait d’ailleurs arriver qu’en bout de course, après la recherche d’ombre, le port de vêtements couvrants et l’absence d’exposition l’été entre midi et 16 heures. Surtout lorsque l’on parle d’enfants.

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