Accro du shopping ou acheteuse compulsive ?

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L’excitation et la joie procurées par le shopping redoublent pendant les soldes. Faut-il craindre l’addiction? Le Dr Michel Lejoyeux fait le point entre vrai trouble et petit coup de folie.

Faut-il s’inquiéter lorsque l’achat d’une robe bustier (dont on n’a absolument pas besoin) provoque plus de frissons sur les avants-bras que la libération des journalistes otages en Afghanistan? Le psychiatre Michel Lejoyeux, spécialiste des comportements addictifs* vous aide à distinguer l’envie immodérée de fringues de la réelle dépendance.

Le désir, pas le prétexte

La fashionista a furieusement envie d’un objet tandis que l’acheteur compulsif a furieusement envie de l’acheter. La nuance est de taille puisque dans le premier cas, le passage en caisse provoque une satisfaction alors que dans le deuxième, il laisse place à un désoeuvrement. « Les acheteurs compulsifs entassent des vêtements dans leur armoire. Ils n’ôtent même pas les étiquettes », précise l’expert. C’est d’ailleurs pour cela que la période des soldes ne constitue pas une épreuve de plus pour eux! La bonne affaire à repérer et à saisir les importe peu, contrairement aux modeuses. « La pulsion d’addiction est coupée de toute logique économique », résume le pro.

Le petit découvert, pas les huissiers

Autre différence de taille, le caractère déraisonnable des dépenses. Craquer en fin de mois pour une paire de ballerines Repetto à paillettes et essuyer un découvert de 30 euros ne peut pas se comparer avec les conséquences désastreuses d’une addiction à l’achat. Selon le Dr Lejoyeux, « les crédits à la consommation aggravent souvent la situation. Certaines personnes vont jusqu’à la prostitution pour s’offrir des accessoires qu’elles ne mettront jamais. »

Le coup de folie, pas l’habitude ancrée

Qui peut se targuer de ne jamais avoir craqué pour une pièce kitschissime jamais portée et pourtant hors de prix? Ou d’avoir compensé une mauvaise journée de travail par une virée dans une jolie boutique? Sauf que dans le cas d’un comportement compulsif, ce genre de craquage survient de manière répétitive.

La coquetterie, pas l’espoir de nouvelle vie

« Dans l’addiction au shopping, il y a l’idée que l’objet va changer la vie de son propriétaire. Avec ce vêtement, il deviendra enfin celui qu’il veut être », analyse le psychiatre. Alors que la « soldeuse de base » ressent seulement quelques picotements à l’idée d’arborer son nouveau jean griffé le lundi matin.

La perméabilité aux marques, pas la distorsion de la réalité

La publicité et les médias suscitent sans arrêt de nouvelles envies de consommation mais dans le cas d’un trouble, les causes sont bien plus profondes. « Deux facteurs se combinent: une mauvaise image de soi et un excès d’optimisme envers le pouvoir des objets. » Une fausse croyance qui prendrait sa source dans l’enfance. Le psy déplore ces petits, habitués à recevoir toujours des cadeaux comme seuls témoins de l’amour de leurs parents. Résultat, à l’âge adulte, le seul moyen de se choyer consiste à faire une virée au centre commercial.

Ces personnes (un petit nombre finalement et essentiellement des femmes) ont donc intérêt à consulter un psychiatre pour suivre une thérapie comportementale et cognitive. « A l’hôpital Bichat, nous les aidons à analyser leur comportement et à retrouver une bonne image d’elles-mêmes ainsi qu’un rapport sain aux choses matérielles », conclue le thérapeute.

A lire : Deux ouvrages de Michel Lejoyeux, Les secrets de nos comportements (Livre de Poche) et Du plaisir à la dépendance (Editions du Seuil).
Par Katrin Acou-Bouaziz, L’Express.fr

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