Gagner à la loterie ne change pas forcément la vie

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Ils ont gagné jusqu’à 3,5 millions d’euros et continuent à travailler: quand la traditionnelle loterie de Noël a favorisé un quartier de Madrid elle n’a pas changé drastiquement la vie des heureux gagnants.

La loterie de Noël est une institution en Espagne depuis 1812. Elle a continué même pendant la guerre civile quand les deux camps ont organisé leur propre tirage de 1936 à 1938.

Le 22 décembre 2014, 80% des 1.600 billets gagnants du premier prix ont été vendus dans le quartier d’Almagro, au coeur de la capitale espagnole.

Et d’après l’enquête menée par l’AFP, une bonne partie des gagnants a gardé le même emploi. Les plus âgés ont avancé leur départ en retraite, certains ont ouvert une boutique, et un jeune accro aux paris sportifs a tout joué et tout perdu.

Gagner à la loterie ne change pas forcément la vie
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Les gagnants du gros lot, « el Gordo » en espagnol, 320.000 euros net pour un coupon, ont des profils des plus divers: les 32 employés du musée de cire -dont 80% y travaille toujours-, ceux d’un cercle d’entrepreneurs, des commerçants, des courtiers en assurance et même des religieuses.

Arturo Aguirre, propriétaire de la papeterie Kalko, raconte son incroyable histoire: « le mercredi, j’ai signé un emprunt à la banque » pour devenir propriétaire de son commerce, « le jeudi, le vendeur m’a offert un ticket et le lundi, j’ai gagné le prix », raconte-t-il. « Quand j’entends parler de contes de Noël, je rigole… », dit ce père de deux adolescents, rencontré dans l’arrière-boutique de sa papeterie, héritée de son père dans ce quartier d’ambassades et d’études d’architectes.

La chance lui a souri grâce à Lino Cuervo, gérant du point de vente de loterie situé à quelques mètres de la papeterie, au 26 de la rue Zurbano.

C’est lui le « père Noël » qui a vendu 1.300 billets du premier prix, soit 416 millions d’euros sur les 2,2 milliards qui ont été distribués cette année-là dans toute l’Espagne. La chance a aussi souri à sa famille. Toute émue d’avoir touché le « Gordo », l’une de ses filles a même accouché le lendemain.

L’importance de la gestion

La sagesse des gagnants d’Almagro n’est pas exceptionnelle. Une étude de l’université de Göteborg en Suède en 2005 constatait que 62% des bénéficiaires suédois avaient continué à travailler.

Bien leur en a pris car une autre étude publiée en 2010 aux Etats-Unis, analysant les parcours de près de 35.000 gagnants à la loterie de Floride entre 1993 et 2002, conclut que gagner à la loterie « ne fait que retarder la banqueroute », et augmente même les chances de se retrouver à sec trois à cinq ans après.

Javier Gaite, conseiller financier spécialisé dans la gestion de patrimoine, conseille aux gagnants d’économiser en vue de dépenses imprévues, de solder leurs dettes et « d’investir judicieusement ».

Beaucoup des gagnants de 2014 semblent avoir appliqué ces conseils, comme José Ynglada, à l’époque le chef du restaurant chic El Mentidero de la Villa dans la même Calle Zurbano.

Sa fille l’a encouragé à acheter une quarantaine de billets. Il en a gardé une partie pour sa famille et certains de ses employés se sont répartis le reste des tickets, une pratique courante dans les entreprises espagnoles. Plus de dix étaient gagnants et José Ynglada a reçu 3,5 millions d’euros. « Je n’y ai pas encore touché. Il est à la banque, sur un compte de mes filles », dit ce cuisinier qui n’a aucune intention de s’éloigner de ses fourneaux. « C’est ma vocation », assure-t-il.

Daniel Drouet, serveur dans ce restaurant, n’a pas non plus choisi de tout plaquer. Cet Équatorien a placé ses plus de 100.000 euros sur un compte en dollars dans une banque internationale, en attendant d’ouvrir peut-être un commerce plus tard. « Je ne me presse pas, je veux bien y réfléchir », explique-t-il.

Daniel Domingo, l’ancien chef de la cuisine, s’est lui éloigné des fourneaux, investissant les 360.000 euros qu’il avait gagnés avec un collègue et sa femme dans un point de vente… de billets de loterie.

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