Que Choisir déconseille 5 crèmes solaires pour enfants, les fabricants contre-attaquent

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Malgré des mentions rassurantes sur leur emballage, les produits solaires ne seraient pas aussi fiables qu’ils ne le laissent entendre, selon l’association française de consommateurs UFC-Que Choisir. Elle dénonce « de graves carences » en termes de protection aux UV dans plusieurs produits, après les avoir testés en laboratoire. Les fabricants s’insurgent, de leur côté, contre la méthode d’analyse utilisée.

On ne le dira jamais assez, une protection solaire adaptée est primordiale pour protéger la peau des enfants. En pleines vacances d’été, l’association française de défense des consommateurs UFC-Que Choisir vient de publier un test assez interpellant sur la fiabilité des crèmes solaires destinées aux plus petits après avoir testé en laboratoire 17 produits de protection solaire d’indices élevés (50 et 50+) présentés sous forme de crèmes, sprays et laits solaires.

Alors que l’on peut lire des mentions rassurantes telles que « Haute protection », « Très Haute Protection », sur leur emballage, ces crèmes solaires « n’offrent pas la protection minimale contre les UVA requise par les experts français et les autorités européennes », dénonce UFC-Que Choisir.

L’association déclare avoir constaté une très faible protection aux UVA sur près d’un tiers des produits testés et certains de marques de renom. Dans le lot incriminé, on trouve cinq produits disponibles en France et deux en Belgique, dont les labels Clarins, Bioderma, Biosolis, Alga Maris ou encore Lovéa. Le ‘lait solaire spécial enfant’ de Clarins, disponible sur le marché belge, est le plus mal noté du test et écope, au côté du spray solaire ‘Photoderm kid’ de Bioderma, de la recommandation très peu enviable ‘Ne pas acheter’ (voir la liste complète des références ci-dessous. )*

Par ailleurs, Que Choisir a constaté que certains produits bios ne tenaient pas leurs promesses en terme de protection. En effet, les filtres anti UV à base de minéraux naturels qu’ils contiennent sont inefficaces pour contrer correctement les UVA. Sur les 5 produits testés, 2 offrent une protection à peine correcte et 3 une protection très insuffisante.

L’association annonce dans la foulée que « soucieuse de garantir la sécurité des consommateurs, particulièrement les plus jeunes », elle dépose plainte contre ces 5 fabricants « pour pratique commerciale trompeuse et tromperie » pour des produits solaires aux indices élevés (50 et 50+), indique l’association dans un communiqué. Elle demande aussi que ces marques retirent « sans délai » leurs produits des rayons, menaçant à défaut de saisir la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en France.

Les fabricants contre-attaquent

Les accusations du magazine ont fait l’effet d’une bombe parmi les fabricants des produits incriminés, chacun d’entre eux y allant de leur contre-attaque.

Clarins a ainsi réagi à cette enquête par voie de communiqué. Le label rassure sur la fiabilité de ses produits solaires aux normes européennes. L’entreprise met en doute les méthodes d’analyse de l’association des consommateurs et déclare qu’elles « ne sont pas fondées sur des preuves scientifiques indiscutables »: « UFC Que Choisir a choisi d’évaluer la protection UVA de ce produit selon le test in vitro ISO 24 443, où la peau est remplacée par une plaque de plastique texturée dont les propriétés ne s’apparentent pas parfaitement à celles de la peau humaine. Ce test peut donc donner des résultats erronés. »

Clarins explique dans un communiqué faire évaluer l’efficacité protectrice de ce produit vis-à-vis des rayonnements UVB et UVA par des laboratoires indépendants en utilisant des méthodes in vivo sur la peau de personnes volontaires, « méthodes qui bien que plus contraignantes et couteuses, sont plus proches de la réalité lorsque le produit est utilisé par des consommateurs, ajoute la société », commente la marque de cosmétiques.

Bioderma, de son côté, a aussi fait savoir par voie de communiqué que la méthode d’analyse in vitro utilisée par Que Choisir n’était pas adaptée pour tester de l’efficacité de ses produits solaires: « Le test qui a été réalisé par le magazine UFC Que Choisir est un test dit « in-vitro » effectué en laboratoire qui reproduit artificiellement les conditions de rayonnement solaire et leur impact selon une méthode alternative théorique. Cette méthode de test n’est que partiellement adaptée pour ce type de produit. »

Même son de cloche du côté de Biocos, le fabricant de la marque de produits solaires Lovea, dont un spray pour enfants est dans le collimateur de Que Choisir. Le label condamne dans un communiqué des « propos diffamatoires » et annonce sa volonté de poursuivre le magazine. « Notre produit est tout à fait conforme à la réglementation européenne. Tous les tests sont réalisés par un laboratoire indépendant garantissant des résultats objectifs et conformes à la réglementation », a ajouté Biocos.

UFC-Que Choisir a fait « une mauvaise interprétation » des données, a réagi Cédric Mourlon, PDG et fondateur du laboratoire belge Biosolis, lui aussi, visé par le magazine. « Nous faisons des analyses deux à trois fois par an sur nos produits, qui sont vendus dans plus de 30 pays, dont les États-Unis », a-t-il souligné. « C’est complètement aberrant », a-t-il ajouté, précisant qu’il envisageait de lui réclamer des dommages-intérêts au magazine pour le préjudice subi.

La Febea, le syndicat professionnel du secteur cosmétique en France, s’insurge également contre ces accusations. « Je suis sûre que les produits mis sur le marché sont conformes à la règlementation », a estimé Anne Dux, directrice des affaires scientifiques et réglementaires du syndicat, interrogée par l’AFP.

Pourtant, selon Olivier Andrault, chargé de mission d’UFC-Que Choisir sollicité par l’AFP, « c’est la méthode la plus utilisée et la plus recommandée » pour les UVA.

Des tests réalisés ailleurs dans le monde confortent cette analyse, argumente Le Soir. Test-Achats a ainsi analysé 13 produits présents sur le marché belge. Si la protection contre les ultra-violets B est adéquate pour tous les produits testés, celle pour les UVA, qui font particulièrement vieillir la peau, n’atteint pas le niveau légal requis pour deux crèmes sur treize, produites par Bioderma et Clarins. « Nous avons dénoncé ces faits aux SPF Santé et Droits des consommateurs », explique Julie Frère, porte-parole de l’association au Soir.

UVA ou UVB ?

Sur les emballages des produits solaires, on retrouve communément les logos UVA et UVB. Quelle est la différence entre ces deux mentions ? Les UV sont les rayonnements ultraviolets émis par le soleil. Il en existe de trois types : les UVA, les UVB et moins connus, les UVC. Les UVC sont filtrés par la couche d’ozone mais les UVA et les UVB arrivent jusqu’à nous et peuvent endommager la peau. Ce sont les UVB, les plus énergétiques, qui sont les principaux responsables des coups de soleil.

Les effets des UVA, de longueur d’onde plus importante, sont, pour leur part, moins visibles sur le très court terme mais ils ne sont pas moins nocifs : ils pénètrent la peau en profondeur, jusqu’au derme et accélèrent également le vieillissement cutané. Ils provoquent aussi des cancers.

Pour préserver la peau, une crème solaire efficace doit donc protéger à la fois des UVA et des UVB. On la choisit en fonction de son type de peau (phototype) et sa propension à avoir des coups de soleil : SPF (ou IP) très haute protection (50+) pour les peaux claires qui ne bronzent jamais ou très légèrement ; indices de 30 à 50 au début de l’exposition, de 15 à 25 pour les peaux intermédiaires ou les peaux mates ; indices de 15 à 25 pour les peaux brun foncé ou les peaux noires. Inutile de rappeler que les UV sont particulièrement intenses sous les tropiques, en montagne, sur la neige, le sable et sur l’eau, une protection maximale (l’écran total n’existe pas) est alors indispensable. Il est utile de rappeler qu’un an après leur ouverture, les crèmes perdent de leur efficacité.

* Lait solaire spécial enfant 50+ de Clarins, Photoderm kid 50+ de Bioderma, Lait solaire kids 50+ « bio » de Biosolis, crème solaire enfant 50+ « bio » d’Alga Maris et Spray hydratant kids « bio » 50 de Lovéa.

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