Citron, échalote, gingembre: un Français invente les huîtres parfumées

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Plus besoin de citron ou de vinaigre à l’échalote, un ostréiculteur français a inventé les huîtres déjà aromatisées et exporte ses bourriches jusqu’à Hong Kong ou aux Emirats arabes unis, en passant par la Belgique, la Suisse, l’Estonie et la République tchèque.

Joffrey Dubault, 29 ans, revendique d’être le premier au monde à parvenir à aromatiser des huîtres.

Il les commercialise depuis octobre mais il aura fallu quatre ans d’expérimentation et de tâtonnements à cet ostréiculteur du bassin de Marennes en Charente-Maritime (ouest) pour mettre au point son procédé, breveté auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi).

« Sur les marchés parisiens, les clients demandaient toujours du citron. Ça m’a donné l’idée », dit-il.

Après des centaines d’essais dans son garage, il a « trouvé la bonne formule ». « J’ai essayé différents arômes, différents dosages, différentes tailles d’huîtres. C’était assez décourageant au début, j’avais 90% d’échecs. Aujourd’hui j’ai 95% de réussite », affirme-t-il.

Au-delà du citron et de l’échalote, il a créé trois autres parfums: gingembre, framboise et muscat.

En théorie, le procédé est simple. Il suffit de plonger les coquillages dans un bac de 500 litres d’eau de mer parfumée avec un arôme naturel, deux à 12 heures avant la commercialisation selon le type d’huître. En filtrant l’eau, le mollusque s’imprègne du parfum.

Mais en fait, « il y a seize étapes dans la production. Et si une seule est mal faite, le résultat est nul », tempère M. Dubault.

Après chaque cycle d’aromatisation, les bacs sont entièrement vidés et nettoyés.

‘Chocolat, ce sera non !’

Les délais sont un peu courts cette année pour la jeune société de Joffrey Dubault qui, le bonnet enfoncé au-dessus de son regard bleu, s’active dans la chambre froide, sortant les coquillages de la quinzaine de bacs où ils marinent.

Pour Noël 2018, il y aura l’arôme truffe et l’arôme poivre, dit le chef d’entreprise. Il teste également le pamplemousse et la mirabelle, pour le printemps prochain. « On m’a aussi demandé chocolat, mais ce sera non! ».

Son innovation lui a valu un prix au salon Sea food de Bruxelles en avril dernier. A cette occasion, « des Chinois m’ont félicité et m’ont dit que cela fait sept ans qu’ils essayaient » d’aromatiser des huîtres, raconte le jeune homme longiligne.

Joffrey Dubault a créé à Marennes en septembre une société propre à cette production, So’ooh, alimentée en matière première par son activité d’ostréiculteur. La douzaine d’huîtres parfumées est vendue aux professionnels entre 50 centimes et 1 euro plus cher que les huîtres naturelles. Et 70% de cette production est vendue à l’étranger, surtout en Asie où le gingembre et le muscat font un tabac, assure M. Dubault.

Le jeune ostréiculteur produit environ 40 tonnes par an d’huîtres naturelles, non manipulées génétiquement (ainsi que des palourdes) et indique être aujourd’hui capable de fournir plus d’une tonne d’huîtres parfumées… par jour.

« Pour les périodes de fortes demandes comme en décembre, ou pour éviter les huîtres en lait que les consommateurs dédaignent, je n’aurai pas le choix: j’aurai recours à d’autres producteurs locaux ainsi qu’à des courtiers », admet-il.

Il a adapté les arômes à la clientèle: le citron et l’échalote pour la France, le muscat et la framboise en Italie, le gingembre en Asie…

Les Français sont les plus durs à convaincre, dit-il, « des puristes » habitués à l’huître naturelle. Mais il est optimiste et précise avoir tout juste signé avec la centrale d’achat d’une grande chaîne d’hypermarchés. « Aujourd’hui, les gens mangent des yaourts aromatisés, boivent de l’eau aromatisée, alors pourquoi pas des huîtres ? »

Le résultat respecte le mollusque: « On sent bien le goût de l’huître, ça ne cache pas le produit, c’est bon ! », juge Dylan Cottin, un salarié ostréicole.

L’arôme framboise, par exemple, le relève comme une seule goutte de vinaigre.

Ludovic Lestrat, ostréiculteur à Marennes lui aussi, a goûté également. « Je n’aime pas tout: j’aime bien framboise et muscat », confie-t-il, moins emballé par l’échalote.

M. Dubault espère conquérir une clientèle plus jeune avec ses huîtres parfumées au packaging revisité. C’est même son coeur de cible, alors que la moyenne d’âge des amateurs d’huîtres « est assez élevée », dit-il.

AFP

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