La course aux étoiles des chefs bruxellois

© Jean-Pierre Gabriel

Notre capitale compte aujourd’hui cinq chefs doublement étoilés. Autant dire que tous lorgnent déjà vers la marche la plus haute du prochain classement Michelin…

Il est toujours bon de le rappeler, Bruxelles compte aujourd’hui pas moins de cinq noms affichant 2-étoiles au prestigieux guide Michelin : Lionel Rigolet (Comme chez soi), Pascal Devalkeneer (Le Chalet de la forêt), Christophe Hardiquest (Bon-Bon), Alexandre Dionisio (Villa in the Sky) et Yves Mattagne (Sea Grill) (en photo, de gauche à droite). Ces chefs font l’objet de tous les regards. Le moindre écart à la qualité attendue, et les voilà sous le feu nourri de critiques. Car leur statut prestigieux fragilise autant qu’il offre des opportunités. Parmi celles-ci, la voie vers la troisième étoile…

Pour mémoire, le guide lui-même, qui s’adresse historiquement aux consommateurs des pneumatiques éponymes, cadre le propos de ces distinctions.  » Une étoile signifie une cuisine d’une grande finesse, qui vaut l’étape ; deux, une cuisine d’exception, qui vaut le détour ; trois, une cuisine unique, qui vaut le voyage.  » André Poës, un des meilleurs spécialistes de la haute gastronomie belge, connaît bien le mode de fonctionnement du fameux livre rouge, jusque dans ses moindres arcanes, pour y avoir été inspecteur.  » Trois étoiles, c’est bien entendu une cuisine d’auteur, avec des plats signatures. Mais c’est aussi un tout. Ce qui veut dire que le service en salle doit être impeccable. Michelin attache aussi de l’importance à ce que le chef soit derrière les fourneaux. D’aucuns sont reputés voyager beaucoup, d’autres pour ne pas être présents au moment de la mise en place et ainsi laisser trop de liberté à leur équipe. Plus encore, il ne faut pas oublier que recevoir une étoile, ce n’est pas signer un bail. Au contraire, elle est remise en jeu chaque année. Un chef pourrait très bien se voir en course pour la troisième et perdre la deuxième !  »

Vers le Saint Graal

Cinq chefs, cela signifie autant de fortes personnalités, tant en cuisine que dans l’assiette. D’Yves Mattagne, on peut dire que ses nombreux voyages, en Asie entre autres – sa belle-famille a toujours concocté des plats indiens – ont marqué ses préparations, notamment ses sauces.  » Depuis le changement d’actionnariat, les efforts consentis sur le service en salle sont remarquables « , confie notre expert. Lionel Rigolet, lui, appartient à la lignée initiée par la famille Wynants. Le Comme chez soi est une maison qui allie tradition et modernité. Les compositions sont recherchées, très élaborées et complexes. De son côté, bien que souvent présenté comme  » le  » futur 3-étoiles belge, comptant de nombreux aficionados, Christophe Hardiquest cherche encore sa voie. Ayant ainsi pris récemment l’axe de la cuisine bruxelloise, il gagnerait sans doute à laisser s’exprimer son talent à l’état pur. Sur le site Web du Chalet de la forêt, Pascal Devalkeneer, le gentleman de notre gastronomie, annonce clairement qu’il partage la création des recettes avec son chef de cuisine, Kasper Kurdahl. Les deux hommes ont été formés par un maître en la matière, le célèbre cuisinier limbourgeois Roger Souvereyns, qui les inspire encore aujourd’hui. Une table faite de beaux produits, aux influences internationales mais discrètes.

Reste le plus récemment promu, Alexandre Dionisio.  » Comme nombre d’observateurs, commente André Poës, on peut dire qu’il prend des risques et cela marche.  » Pourtant, les conditions de travail, au sommet de la tour IT qui surplombe l’abbaye de La Cambre, sont loin d’être idéales. Celui qui aime s’inscrire en dehors du cadre est lui aussi un candidat potentiel pour une troisième étoile. Mais il lui faudra arrondir les angles et affirmer davantage encore sa personnalité. Le reste se décidera dans les alcôves du célèbre guide.

PAR JEAN-PIERRE GABRIEL

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