Rencontre avec la chef congolaise Augustine Mabaka, du restaurant le Gri Gri à Bruxelles

© KRIS VLEGELS
Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Cela fait plus de trente-cinq ans qu’elle promène sa bonne humeur en cuisine. Pondu, chikwangue, moambe… La cuisine congolaise n’a plus aucun secret pour elle.

Surprenant parcours que celui d’Augustine Mabaka. Cette Congolaise de 60 ans au sourire radieux et à l’énergie solaire a débuté sa carrière professionnelle dans la diplomatie. Un univers qui lui plaisait beaucoup… jusqu’à ce que l’amour bouleverse ses plans.

Augustine Mabaka
Augustine Mabaka© KRIS VLEGELS

Dans les années 80, elle rencontre son mari, un Belge avec lequel elle ouvre un restaurant : le Ventre Saint Gris. Quelques années plus tard, elle imagine un écho africain à cette enseigne, le Gri Gri. Cet établissement ucclois affiche une longévité assez remarquable – 25 ans de bons et délicieux services – qui en fait l’une des tables de référence à Bruxelles pour qui souhaite se régaler congolais.

Originaire de Kinshasa, Augustine a appris son art dans les jupes de sa mère et de sa grand-mère. Elle explique : « Au Congo, il y a une tradition qui veut que les mamans ne préparent pas le repas le dimanche. Elles laissent faire leurs filles pour que celles-ci apprennent à se débrouiller et n’interviennent que pour rectifier le tir et superviser. »

Evoluant dans une cuisine tout ce qu’il y a de plus moderne, Augustine Mabaka s’entoure de certains objets qui assurent le lien avec ses origines. Ainsi du mortier et du pilon en bois qu’elle utilise pour écraser les épices et les herbes aromatiques. La présence de ces ustensiles traditionnels n’est pas sans évoquer une pointe de nostalgie pour son pays. On sent également ce soupçon de mélancolie quand elle évoque la saveur du chikwangue, le fameux pain de manioc qui passe pour l’en-cas idéal du voyageur, ou celle de l’huile de palme et de la pâte d’arachide. Idem quand elle se rappelle sa grand-mère et « toutes ces choses qu’elle aurait aimé lui demander », elle qui était « une cuisinière hors-pair ». Il y a aussi les calebasses, qui protègent les boissons du soleil et dont elle se souvient avec tendresse, et le Kwilu, le rhum local, délicieux lorsqu’il est mélangé avec du jus de gingembre et du sucre de canne. Sans parler des petites sauterelles, termites et autres chenilles que l’on grignote en guise d’apéritif.

Au mur de son restaurant, qui se découvre comme une sorte de petit îlot ensoleillé, une reproduction donne à voir des couples congolais enlacés dans la moiteur d’un bar. Le tableau est signé Moke, le « peintre reporter de l’urbanité » de Kinshasa. Décédé en 2001, l’artiste laisse derrière lui une oeuvre qui raconte la vie quotidienne kinoise, entre fêtes nocturnes et bouteilles de Primus. Il y a une certaine similitude entre cet homme et Augustine. A sa façon, elle s’emploie également à restituer la chaleur d’une ville pas comme les autres. Et cette proposition ne manque pas de plaire à tous les publics, comme le précise l’intéressée : « Beaucoup de Belges viennent ici pour s’initier à ce pays. Ceux qui goûtent ma moambe reviennent à coup sûr. Ils adorent aussi mes poissons braisés et ma chèvre grillée. Mais il y a également les Congolais qui profitent du Gri Gri pour déguster des plats qu’ils n’ont plus le temps de faire à la maison. »

Gri Gri, 16, rue Basse, à 1180 Uccle. www.gri-gri.be

D’autres adresses pour manger congolais

– Inzia

Dans un joli décor, une adresse réputée pour ses buffets congolais.

37, rue de la Paix, à 1050 Bruxelles. Tél. : 02 513 81 67.

– La Terrasse d’Inzia

Un bar en plein air qui propose des cocktails exotiques et des plats d’inspiration congolaise.

25, rue Longue Vie, à 1050 Ixelles.

– L’Horloge du Sud

Un bistro à la déco taillée au cran d’arrêt réputé pour son liboke, une préparation de poisson dans une feuille de bananier.

141, rue du Trône, à 1050 Bruxelles. www.horlogedusud.be

– La Paillote Africaine

La cantine de Tantine Wivine est connue dans toute la province de Liège.

144, chaussée de Waremme, à 4500 Huy. www.la-paillote-africaine.be

– Les Saveurs Cuisinées

Un traiteur réputé pour ses apéritifs ethniques et ses réceptions aux contours africains.

www.lsctraiteur.be

– Gloire à Dieu

L’épicerie congolaise de référence.

51, chaussée de Wavre, à 1050 Bruxelles. Tél. : 02 502 34 59.

– Kobo

Ce très beau restaurant est également une boutique de décoration dans laquelle on peut acheter des objets africains.

4, rue François Libert, à 1410 Waterloo. www.koboresto.be

– Zando Ya Matonge

Une épicerie réputée pour la fraîcheur de ses arrivages.

89, chaussée de Wavre, à 1050 Bruxelles. Tél. : 0484 73 28 83.

Côté saveurs

Banane plantain

Elles jouent un rôle important dans les mets congolais mais ne peuvent être utilisées qu’en cuisine. La raison : leur taux élevé en amidon, celui-ci ne se transformant en sucre qu’avec la chaleur. C’est lorsqu’elles sont vertes qu’on les coupe pour les frire.

Manioc

Cette racine tubéreuse se décline en diverses variétés dont le manioc amer, impropre à la consommation s’il n’est pas détoxifié et dont les racines sont transformées en tapioca, et le manioc doux qui peut être mangé sans attendre. Cet ingrédient sans gluten est riche en glucides.

Feuille de manioc

Les feuilles de manioc, utilisées comme légumes, contiennent des vitamines A et C. Le pondu (ou saka-saka) consiste à piler des feuilles de manioc et à les préparer avec de l’huile de palme, des aubergines vertes, du piment, du poisson séché… pour un résultat qui s’approche vaguement des épinards.

Moambe (Mosaka)

Rencontre avec la chef congolaise Augustine Mabaka, du restaurant le Gri Gri à Bruxelles
© KRIS VLEGELS

  • 1 kg de darne de crocodile (à défaut 1 poulet),
  • 1 kg de noix de palme (à défaut 1 boîte de 400 g de sauce de palme « Moambe »),
  • 1 gros oignon,
  • 2 gousses d’ail,
  • 1 brin de ciboulette,
  • 1 poireau,
  • 1 grosse tomate fraîche,
  • 1 feuille de laurier,
  • 1 cube de bouillon de poule,
  • 1 piment,
  • 1 pincée de gros sel,
  • poivre,
  • muscade.

Dans une casserole remplie d’eau salée, faire bouillir les morceaux de crocodile (ou de poulet) avec l’ail écrasé, le laurier, le cube de bouillon, le poivre et la muscade, pendant environ 30 minutes.

Ajouter l’oignon, la pâte de noix de palme, le poireau, la tomate (la sauce à défaut), la ciboulette et le piment entier et couvrir avec de l’eau bouillante. Laisser mijoter le tout à feu doux et laisser réduire pendant 30 bonnes minutes.

Cette préparation s’accompagne de pondu (feuilles de manioc pilées), de riz et de bananes plantains frites.

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