Icônes électriques: Tom Verlaine, le héros

Tous les quinze jours, Jérôme Mardaga nous parle d’un des musiciens qui a marqué sa carrière.

Imaginez un club long et enfumé dans un sous-sol du Lower East Side, quartier louche de la venteuse Grosse Pomme. Milieu des seventies. Le club se nomme CBGB et s’y déroule une révolution. Une de plus. Quelques années seulement après le séisme Velvet Underground et l’invention du rock dit moderne, New York s’apprête encore une fois à déferler sur l’Europe. Attention tsunami. Il faut dire qu’on y croise du beau monde au CBGB à cette époque : une petite punkette inconnue du nom de Deborah Harry et son groupe Blondie, une grande punkette encore plus inconnue mais brune celle-là, nommé Patti Smith, qui déclame sa longue prose élégiaque superposée à la guitare de Lenny Kaye. Il y a aussi au fond à gauche la joyeuse famille Ramones (one two three four), de véritables boute-en-train qui n’en manquent jamais une. Les intellos de Talking Heads (prononcez talkinette) ne sont jamais bien loin. Et enfin, et surtout, et par dessus tout, les anges de Television. Et l’un de ces anges se nomme Tom Verlaine, guitariste longiligne au nom parfait. Tom a la guitare indiscutable, intouchable, inimitable. Une génération entière de guitaristes britanniques va tomber amoureuse de son jeu aérien et agressif, cisaillé à la façon du plus beau cristal. Tom Verlaine a compris comment électrifier l’immatérialité et ce n’est pas rien. Son groupe, Television, va accoucher du légendaire Marquee Moon. La messe est dite. Alors que les Britanniques sont embourbés dans le prêchi-prêcha longs cheveux carrément insupportable de Led Zeppelin et autres calamiteux Deep Purple, Television, cheveux courts, casaque sobre, débarque sa musique avec la peau sur les os, quelques kilos toute mouillée. Cure de jouvence pour la guitare électrique, soulagement dans les premiers rangs. Moins c’est plus. Tabula rasa. Les maudits anglais vont comme toujours reprendre tout cela à leur compte, s’en déclarer les inventeurs et l’appelleront punk. Finesse en moins, épingle à nourrice en plus. Ils iront même à monter un boys band bien sale sur lui pour légitimer ce nouveau courant musical, les inénarrables Sex Pistols. Le reste appartient à l’Histoire. Vite essoufflé, le punk anglais va pourtant insuffler l’étincelle à des centaines de musiciens en devenir qui auront l’intelligence de se souvenir que le punk est né en Amérique, avec le Velvet Underground, les Ramones, Patti Smith, les Stooges, Television et Tom Verlaine.

Jérôme Mardaga

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