Sarah Morant, la petite écrivaine

" On parle de couverture, de manuscrit, mais finalement, cela reste abstrait, tel un rêve. " © Frédéric Raevens
Catherine Pleeck

Son livre Timide a été lu plus de 4 millions de fois sur Internet. A tout juste 18 ans, cette future étudiante en médecine prépare son troisième ouvrage, section young adults, signé par Hachette. Portrait.

C’était un jeudi d’automne 2016, après une grosse journée d’école. Tête fatiguée, mais le visage qui s’illumine lorsque Sarah Morant, 18 ans depuis la mi-juillet, découvre un carton, posé en travers de la table de la salle à manger d’une maison ouvrière, dans le centre de Mouscron. A l’intérieur, son premier ouvrage, Timide, qui vient d’être imprimé pour le compte de la maison d’édition Hachette.  » Cela fait quelque chose, avoue-t-elle, dans un sourire, cachée derrière la monture de ses lunettes. On ne s’imagine jamais vraiment qu’on va y arriver. On parle de couverture, de manuscrit, mais finalement, cela reste abstrait, tel un rêve, tant qu’on n’a pas l’objet en main.  » En avril dernier, cet opus est suivi d’un deuxième bouquin, Fragiles, toujours dans la catégorie young adults, qui s’intéresse davantage aux personnages sombres de l’histoire initiale. Les aventures amoureuses de la timide Eléonore se sont depuis vendues à 23 000 exemplaires pour les deux titres. Et un troisième volet est en préparation, à paraître en février 2018. Le sujet ? La colocation dans le cadre universitaire.

Des publications qui n’ont pas vraiment changé le quotidien de l’ado, si ce n’est le surnom de petite écrivaine, que lui donnent parfois les amis de la Hurlue, sans l’ennuyer plus longuement, tant ils savent que la jeune fille reste discrète sur ses activités d’écriture, d’ailleurs gardées secrètes jusqu’à la sortie du roman. C’est que la demoiselle préfère plonger son nez sur sa tablette, plutôt que de sortir avec ses copains, comme le font habituellement les ados de son âge. Son rituel est déjà bien ancré : attendre que le soir tombe pour s’avachir dans un canapé, l’objet calé sur les genoux, lumière tamisée, musiques en tous genres dans son casque. Et, le lendemain, relire consciencieusement ses pages, pour vérifier que le rythme des phrases sonne bien comme elle le souhaite.

Dévorer les livres qui lui passent sous la main et mettre des mots sur ses pensées, Sarah Morant le fait depuis qu’elle a 10 ans.  » Au départ, c’était des textes de dix ou vingt pages. Du fantastique, des chevaliers, princesses et licornes. Très enfantin. Je ne les ai plus jamais relus, c’est trop la honte !  » Une passion qui lui est venue comme cela, comme d’autres chantent ou s’éprennent de football.  » Mon père travaille dans une usine, ma mère est professeur de coiffure. Ma petite soeur de 14 ans ne lit jamais, sauf mes livres. Et je ne sais pas si c’est pour me faire plaisir ou si elle les aime vraiment !  »

C’est à 14 ans que lui vient véritablement le déclic, lorsqu’en réunion des parents, sa prof de français annonce avec certitude qu’elle sera un jour écrivain.  » Jamais je n’avais pensé que des gens pourraient être intéressés par mes écrits.  » Poussée par ce compliment, l’élève poste sur la plate-forme Wattpad les premiers chapitres d’une histoire, sous le pseudo sasa411 – interdiction formelle pour ses proches de lire quoi que ce soit.  » Par peur de les décevoir. Par pudeur aussi, parce qu’on y met un peu de soi quand même.  »

Tous les dimanches, ce sont entre 3000 et 4000 mots qui sont ajoutés sur le site Web. Une manière d’apprendre à construire patiemment son histoire, tout en y distillant assez d’intrigues que pour donner envie à ses lecteurs de revenir le week-end suivant. Effet boule de neige, le récit est vu plus de 4,7 millions de fois. Un engouement qui suscite l’intérêt de Hachette, qui décide de publier l’auteure, l’an dernier. Mais ce n’est pas pour autant que les plans de Sarah en sont bousculés. En septembre prochain, elle commencera des études de médecine à Namur, pour devenir chirurgienne.  » J’écris pour le plaisir. Si j’en fais mon métier, j’ai peur que cela me bloque, ne devienne une obligation et ne m’enlève ma liberté.  » La Mouscronnoise compte bien continuer de parler de ses préoccupations de jeune femme et des sujets qui lui tiennent à coeur, à travers des romans. Et tant pis si cela impliquera de faire l’impasse sur les sorties estudiantines.

BIO EXPRESS

Juillet 1999. Naissance à Mouscron.

2009. Elle s’amuse à rédiger de premières histoires courtes.

Avril 2014. Elle commence à publier un premier passage de son récit Timidesur la plate-forme en ligne WattPad.

Novembre 2016. Son roman est publié chez Hachette.

Fin 2017. Sortie prévue de son troisième opus.

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