Monstruosités de choix

© photos : Jim Heimann Collection/Courtesy Taschen

Ils ont la forme d’un donut, d’un hot-dog ou d’une tasse de café. Des bâtiments étranges, qui ont commencé à fleurir en masse le long des routes de Californie et du Sud des Etats-Unis, dans les années 20. A l’époque, l’automobile connaît un engouement croissant et donne aux Américains des envies de voyages. De quoi inciter une nouvelle vague d’entrepreneurs ingénieux à tirer parti de ce mode de transport inédit. Ils imaginent de surprenants magasins et restaurants, conçus pour attirer les routiers de passage à la recherche d’en-cas, de provisions, de souvenirs ou d’un repas sur le pouce. Les élans créatifs n’ont pas de limites, avec des formes d’édifices géants totalement excentriques, qui déclinent chouettes, figurines, cochons, vaisseaux, cafetières et fruits divers. La visée est principalement publicitaire, puisqu’il s’agit de dessiner, en version XXL, les contours du produit vendu à l’intérieur.

Monstruosités de choix
© photos : Jim Heimann Collection/Courtesy Taschen

Vu leur manque de portée symbolique, ces monstrueuses constructions en bordure de chemins seront rejetées en bloc par l’establishment architectural. Ce n’est qu’il y a un peu plus de quarante ans que ces bizarreries gagneront leurs lettres de noblesse, comme l’explique l’anthologie California Crazy, récemment parue aux éditions Taschen. L’ouvrage présente non seulement les plus beaux exemples de ce mouvement, qualifié au choix d’architecture-objet, de programmatique mimétique ou plus simplement d’architecture Canard, un terme trouvé en 1972 par l’architecte Robert Venturi. Ce dernier faisait référence à la boutique Big Duck, érigée dans les années 30 à Long Island, et dont la forme de canard géant rappelait les animaux à acheter sur place. Mais le recueil présente également des essais qui décryptent les courants ayant favorisé la naissance de cette tendance. A noter que cette dernière reste toujours de mise et influence, depuis, certaines productions de l’art de bâtir contemporain se réclamant du déconstructivisme. On pense ainsi au travail du designer français Philippe Starck, quand il semble enfoncer un couteau dans le toit de l’usine Laguiole. Ou quand l’incongru se décline dans un registre contemporain, plus subtil.

Monstruosités de choix
© photos : Jim Heimann Collection/Courtesy Taschen

California Crazy, par Jim Heimann, aux éditions Taschen.

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