PREMIERS de classe

Karl Lagerfeld encourage Marine Serre, lors du Prix LVMH. © Benoît Peverelli

La mode aussi a ses concours, ses lauréats, ses trophées. Autant d’événements médiatisés qui sont vitaux pour la jeune garde. Et pour l’avenir de cette industrie.

Les concours ont toujours existé, l’être humain est ainsi fait que pour se sentir vivre, il a besoin de podiums et de médailles. En mode, c’est pareil. Sauf que ce n’est pas uniquement pour la gloire que des milliers de jeunes créateurs s’y inscrivent en rêvant de remporter un award. Il est certes question de reconnaissance mais aussi de visibilité, de tutorat et de soutien financier non négligeable. C’est que les capitales de mode et les groupes de luxe ont intérêt à repérer les futures étoiles et parfois aussi à les former, pourquoi pas ? En juin dernier, à la Fondation Louis Vuitton, à Paris, ils étaient huit à avoir fait le déplacement pour présenter leur collection en dix malheureuses minutes devant un jury sélect formé par les illustres noms qui composent l’écurie du leader du luxe français. Au bout de la course, pour le vainqueur, le LVMH Prize 2017, 300 000 euros et un an de mentorat. L’enjeu est de taille. Faire partie de ce peloton de tête importe (presque) autant que la première place car se retrouver en finale d’une telle compétition offre une belle légitimité, permet de mettre en valeur le travail de chacun, de le confronter au regard des autres créateurs et de tisser des liens avec les journalistes, les acteurs et tous les professionnels de cette industrie qui ne fait pas de cadeau mais qui a cependant compris combien la relève comptait. Pour l’heure, c’est Rihanna en total look Dior Cruise qui monte sur l’estrade pour remettre le Graal à Marine Serre, ovation. Son nom est sur toutes les lèvres depuis quelques mois, sa collection Radical Call for Love n’y est pas pour rien, ni l’intérêt médiatique croissant pour les concours et autres festivals auxquels elle a par- ticipé. Car ces concentrations temporaires rassemblent du beau monde et boostent la notoriété de ceux qui y brillent et de ceux qui les organisent, il serait idiot de s’en priver.

Le vétéran du genre est le Woolmark Prize qui, en 1954, couronnait de concert les tout jeunes Yves Saint Laurent et Karl Lagerfeld avec une robe et un manteau en tricot qui auguraient de leur brillant avenir, tout en mettant la laine à l’honneur. Depuis, les compétitions sont légion, avec des critères parfois très spécifiques. Ainsi le British Emerging Talent Award qui, depuis 2008, récompense et soutient la créativité et l’innovation essentiellement britanniques. Ainsi The Green Carpet Fashion Awards, qui aura lieu à Milan, le 24 septembre prochain, pour la première fois. Il est organisé par la Camera Nazionale della Moda Italiana et entend galvaniser l’artisanat, l’héritage et l’engagement durable de la mode made in Italy, avec un prix spécial pour jeunes designers prometteurs.

En France, trois rendez-vous annuels font vibrer le milieu, le Festival international de mode et de photographie à Hyères, l’ANDAM Fashion Award et le LVMH Prize. Le premier, bouillonnant et décloisonnant, a pour vocation de promouvoir la toute jeune création, celle signée par des étudiants (à peine) diplômés. Imaginé par Jean-Pierre Blanc en 1986, en parfait accélérateur de particules, il a adoubé ceux qui aujourd’hui font Saint Laurent (Anthony Vaccarello), Paco Rabanne (Julien Dossena) ou Lacoste (Felipe Oliveira Baptista). Le deuxième existe depuis 1989, fut fondé par Nathalie Dufour, est une initiative publique avec mécènes et a pour mission, comme le rappelle son président Pierre Bergé, de  » repérer les talents émergents, leur offrir les moyens d’exister, de défiler au sein de la Fashion Week parisienne, de développer leur marque et de s’implanter durablement en France « . Parmi les labels sacrés par l’ANDAM Fashion Award, on trouve Maison Martin Margiela, Véronique Leroy, Viktor & Rolf et Christian Wijnants, qui ne démentiront pas. Le troisième, enfin, est né en 2013, au sein de LVMH, à l’initiative de Delphine Arnault. Il a pour lui d’être le plus richement doté et d’avoir, en trois éditions, seulement généré un engouement qui booste le secteur. Lequel depuis vingt ans s’est reconfiguré autour des groupes de luxe désormais arrivés à maturité, qui savent que l’avenir de la discipline passe impérativement par l’avant-garde et par le renouvellement de ses talents.

Par Anne-Françoise Moyson

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