Traces

© IRVING PENN - CAFE IN LIMA (JEAN PATCHETT) [CAFÉ À LIMA (JEAN PATCHETT)] - 1948 - ÉPREUVE GÉLATINO-ARGENTIQUE, 1984 - 49,2 X 47,

Il aimait les traces, celles laissées par les êtres vivants sur leurs mégots de cigarettes, sur la table qu’ils occupaient au préalable, sur la toile de fond d’un studio de photographie, sur la peau elle-même, les visages et les mains, les détritus. C’est pour cela qu’il ne faudrait pas seulement se souvenir d’Irving Penn (1917-2009) comme d’un photographe de mode qui quitta la rue pour le studio et magnifia en vestale haute couture Lisa Fonssagrives, muse et épouse. Et c’est à cela que s’emploie l’exposition au Grand Palais, à Paris, qui porte simplement son nom et célèbre le centenaire de sa naissance en plus de 235 tirages, esquisses et peintures. Car l’homme, formé au Pennsylvania Museum and School of Industrial Art, avait le sens du dessin, un instinct de sculpteur et un attrait pour les volumes. L’été 1938, il s’offre un Rolleiflex avec l’argent qu’il a gagné en publiant ses croquis dans Harper’s Bazaar, il immortalise des devantures du xixe siècle, des enseignes et des panneaux de signalisation d’une Amérique en pleine dépression. Puis il se met à composer ses premières images, de préférence des natures mortes, avec taches de rouges à lèvres sur verre de cognac, allumette brûlée et restes de repas sur assiette vide – le dépouillement comme puissant medium révélateur. Avec la même minutie, il traque l’essence de ceux qui se posent de plein gré devant son appareil, lequel le fascinait –  » Je le reconnais pour l’instrument qu’il est, mi-stradivarius, mi-scalpel.  » Avec un tel mode opératoire, ne pas s’étonner que ses clichés aient, selon son voeu,  » la même force irréductible que des tableaux « .

Irving Penn, Grand Palais, à Paris. www.grandpalais.fr. Du 21 septembre au 29 janvier 2018.

A.-F.M.

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