4 choses à savoir sur l’achitecte Souto De Moura, pritzkerisé et modeste

© Sofia Moro

Couronné en 2011 par le prestigieux Pritzker Prize, le Portugais poursuit sa route avec modestie, prônant une architecture de qualité mais intemporelle et non tape-à-l’oeil. Il est ce mois-ci en Belgique pour présenter son projet pour le crématorium d’Evere.

1. IL N’EST PAS STARCHITECTE

L’oeuvre de Souto De Moura n’est pas univoque, frivole ou pittoresque ; elle est emplie d’intelligence et de rigueur ; elle nécessite plus qu’un rapide coup d’oeil et, comme la poésie, transmet des émotions à celui qui prend le temps de l’écouter.

Ecole de Musique de Braga
Ecole de Musique de Braga © Getty Images

Cette phrase, énoncée en 2011 par le jury lorsqu’il s’est agi de lui décerner le Pritzker Prize, sorte de Nobel en matière d’art de bâtir, explique à elle seule pourquoi le concepteur n’a pas la notoriété de certains de ses confrères – Frank Gehry, Jean Nouvel et consorts.

Si l’homme, originaire de Porto, a signé d’imposants ouvrages, à commencer par le stade érigé pour l’Euro 2004 et l’Escola de Musica, tous deux à Braga, il reste pour le grand public un parfait inconnu. Et pour cause, ses réalisations requièrent une lecture attentive et dénotent dans le paysage bâti très bling-bling de cette décennie. Il revendique d’ailleurs de pratiquer « une architecture bien pensée, mais presque anonyme », évoquant l’importance, pour un building, « d’avoir l’air là depuis toujours » et de ne pas vouloir absolument raconter une histoire hors normes. C’est dès lors ce qui ressort de tous ses immeubles, toujours implantés avec soin dans leur environnement et imaginés pour être vécus plutôt qu’admirés. Pour lui, « mieux vaut ne pas être original mais bon, que de rechercher la différence à tout prix, au point de livrer un résultat médiocre ».

2. LA PIERRE EST SA MUSE

Pour son stade destiné à la coupe d’Europe de football de 2004, sis à flanc de montagne à Braga, Souto De Moura a mené une vaste réflexion sur les ressources locales et plus particulièrement la pierre qui composait le relief avoisinant. Plus d’un million de mètres cubes de granit en a ainsi été prélevé à l’époque pour fabriquer le béton de structure du complexe sportif. Une autre paroi rocheuse a également été refaçonnée pour fermer l’arène sur l’un de ses côtés. Plus largement, c’est toute l’oeuvre du concepteur qui rend hommage au minéral, s’exprimant tantôt brut, tantôt recomposé, avec toujours une recherche d’expressivité. Le Portugais se positionne dans la lignée du maître de la discipline, Mies van der Rohe (1886-1969), qui lui aussi accordait une importance toute particulière à ces matières et avait commencé sa carrière dans une entreprise de taille de pierre…

Stade municipal de Braga
Stade municipal de Braga© DR

3. LE PORTUGAL EST SA PATRIE

Né à Porto, en 1952, et ayant collaboré un temps pour l’un de ses compatriotes, Alvaro Siza, pritzkerisé, lui, en 1992, Souto De Moura a dessiné énormément de bâtiments dans son propre pays, qu’il connaît dès lors sur le bout des doigts. S’il réfute qu’il existe une « école » portugaise, il relève néanmoins, dans une interview pour le magazine spécialisé Igloo, que l’architecture de sa nation se distingue par « une tradition pour la modestie, le pragmatisme, l’ancrage dans un contexte sans tenter d’impressionner ». Une définition qui lui sied parfaitement mais qui ne signifie pas pour autant que ses oeuvres se fondent toutes dans le paysage.

4 choses à savoir sur l'achitecte Souto De Moura, pritzkerisé et modeste
© DR

A l’instar du musée qu’il a conçu à Cascais, en 2005, à la demande de l’artiste Paula Rego. Implantés à l’orée d’une forêt, les volumes de ce lieu culturel, en béton terracotta, se dressent pour faire face à elle, créant une certaine opposition entre bâti et végétal. « Au départ, la relation établie entre la nature et mes projets était plutôt soft, aujourd’hui elle est dialectique », expliquait-il encore dans Igloo, précisant que le lien entre constructions et environnement immédiat ne doit pas forcément se baser sur la continuité mais parfois sur le contraste et le dialogue.

4. IL SIGNE UNE DEUXIÈME OEUVRE CHEZ NOUS

4 choses à savoir sur l'achitecte Souto De Moura, pritzkerisé et modeste
© ASSOCIATION MOMENTANÉE SOUTO MOURA ARQUITECTOS / ATELIER D’ARCHITECURE MATHEN

S’il n’a réalisé que quelques ouvrages à l’étranger, il s’apprête à mettre en chantier, chez nous, un deuxième projet. Après le crématorium de Courtrai, Souto De Moura va en effet en ériger un autre, à Evere, en Région bruxelloise, en collaboration avec le Belge Jean-Christophe Mathen. L’édifice, qui devrait ouvrir en 2017, sera situé près du cimetière de la commune et se distinguera, comme le résume l’équipe de conception, « par son minimalisme et sa discrète intégration dans le paysage ». Et d’ajouter : « L’utilisation des toits plats permettra de conserver un bâtiment au gabarit bas, silencieux, mettant ainsi la nouvelle construction en relation plus intime avec son environnement et cherchant à préserver l’échelle humaine nécessaire. » Autant de valeurs chères à cet anti-starchitecte.

Conférence de Souto De Moura, ce 27 octobre, à Bozar, à Bruxelles, à l’initiative de la revue A+, du CIVA, de BOZAR et de l’ULB.

Réservations : www.bozar.be

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