Diane von Furstenberg ou l’élégance d’être soi

© Terry Richardson

Qui est la femme derrière la créatrice de DVF et comment s’est-elle construite ? Une autobiographie dévoile son destin en toute sincérité.

Il n’est que 8 heures du matin à L.A., mais madame von Furstenberg est déjà en train de s’habiller. Dans la mythologie, Diane est « la divine incarnation de la lumière ». Un prénom qui lui sied bien, comme en témoigne son récit autobiographique. Sa personnalité, sa créativité et sa fameuse wrapdress – la robe portefeuille iconique qui a révolutionné l’idée du chic -, l’ont transformée en star de la mode.

Mais derrière les paillettes et le glamour, il y a les coulisses d’une existence, qu’elle relate au fil des pages. A commencé par son enfance à Bruxelles. La styliste et femme d’affaires n’a pas oublié ses racines, qu’elle dessine à travers ses parents. Deux exilés qui lui ont permis de prendre son envol. « Je suis qui je suis grâce à eux », dit-elle.

L’amour et la maternité lui donneront des ailes. Elle s’ouvrira à d’autres mondes et son besoin d’indépendance s’imposera. Sa force ? Oser s’écouter. Un parcours qui se lit comme un roman : « La vie m’a appris qu’elle vaut la peine d’être vécue », résume-t-elle.

Quel est votre lien à la Belgique ?

Elle incarne mon enfance. Dommage que le climat y soit si triste et monotone. Même si j’ai toujours voulu partir, je reste fascinée par ses habitants. Comment trouve-t-on une telle créativité dans une si petite nation ? Je suis ravie que le pays soit fier de moi. Dire que je pensais que rien ne m’arriverait, car j’étais une petite fille de rien du tout.

Dans ce livre, vous confiez que votre mère était « votre roc », en quoi vous a-t-elle façonnée ?

J’étais rebelle et je n’avais pas envie d’elle comme modèle. Mais depuis sa mort, je réalise qu’elle m’a rendue forte et indépendante et m’a toujours encouragée à faire ce dont j’avais envie. C’est pourquoi je voulais lui rendre hommage dans ces pages. Son plus beau cadeau ? Me dire que « la peur n’est pas une solution ». Cette survivante des camps de concentration n’a jamais adopté de position victimaire. Au contraire. Les religions me font peur, mais le judaïsme fait partie de mon identité. J’ai seulement compris tardivement que j’étais une miraculée.

Diane von Furstenberg ou l'élégance d'être soi
© Terry Richardson

Pourquoi rêviez-vous, depuis votre plus jeune âge, d’être « une femme glamour » ?

Je voulais surtout être en charge de ma propre vie. La mode correspond à ce dont une femme a besoin pour être qui elle veut être. C’est ma manière d’exprimer qui je suis. Un vêtement incarne votre meilleur ami dans l’armoire. Comment aurais-je pu deviner que ma petite robe portefeuille allait toucher tant de générations ? C’est insensé ! Elle libère le corps, séduit les hommes et donne confiance à celles qui la portent. A l’image de ma griffe DVF, au style sexy, simple et très féminin. Ma marque honore aussi la joie de vivre.

Votre autobiographie fait défiler un tapis rouge de stars et de mannequins. Pour vous qui les côtoyez, qu’est-ce qui fait finalement la beauté ?

J’aime les filles exigeantes, qui ont beaucoup de caractère – Anouk Aimée, Marlene Dietrich, Jackie Kennedy entre autres… La beauté émane de la force qu’on a en soi. Aussi est-il très important de s’accepter ; c’est la relation la plus importante au monde en réalité. Il ne s’agit pas de narcissisme, mais d’une volonté de dépasser ses défauts. La vieillesse ne représente pas un choix, elle signifie qu’on a vécu. Physiquement, j’ai appris à assumer ma différence et à maintenir mon corps en alerte. Je suis une femme libre, parce que je suis avant tout en bonne santé.

Quels sont vos plus grands défis aujourd’hui ?

Le monde a tellement changé, on peut acheter n’importe quel article sur Internet. J’ai récemment engagé Jonathan Saunders, à la tête de la création artistique de DVF. Tout comme moi, ce jeune Britannique est porté sur la couleur et les imprimés. Ayant carte blanche pour l’avenir, il reprend le label en main, tout en préservant mon ADN. Je préfère désormais me consacrer au soutien des femmes. Mon succès me permet d’offrir une voix à celles qui n’en ont pas. Ainsi, je contribue à l’ONG Vital Voices (NDLR : Voix vitales, cofondée par Hillary Clinton) qui soutient des filles « leaders », désireuses de changer le monde. Bon nombre d’entre elles ont connu des situations épouvantables, mais elles se servent de leur expérience pour soutenir les autres. Les rencontrer est l’une des choses les plus inspirantes qui soit. Créer des vêtements ou des accessoires permet aux femmes d’être qui elles veulent, mais on doit aussi faire émerger leurs forces. Surtout si elles sont brimées par un frère, un mari ou une religion. J’aimerais les accompagner pour qu’elles puissent aller de l’avant. Je crois beaucoup au changement local et au pouvoir des mères.

Si, à vos yeux, « vivre c’est apprendre », qu’avez-vous appris de vos échecs ?

Qu’on doit les accepter. Il est nécessaire d’en tirer une leçon, afin de les maîtriser. Les échecs nous construisent. Mais on peut ensuite les oublier et tout recommencer.

Vous écrivez que « l’amour est la vie ». Qu’en est-il du bonheur ?

Aimer c’est tout : vivre, respirer, regarder la nature. Il y a la destinée qu’on ne maîtrise pas (NDLR : elle a vaincu un cancer), mais je suis persuadée que le caractère est fondamental. On doit rester fidèle à soi, sinon on risque de se perdre. Le bonheur ne s’inscrit pas dans la durée, il est composé de moments, de sensations. Même dans les épreuves, je dis merci à la vie chaque jour. Telle est la clé du bonheur.

Diane von Furstenberg ou l'élégance d'être soi
© SDP
La femme que j’ai voulu être, par Diane von Furstenberg, Flammarion, 330 pages.

PAR KERENN ELKAÏM

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content