La Fashion Week parisienne atterrit en beauté avec Chanel, Miu Miu et Louis Vuitton

© Imaxtree

Depuis longtemps déjà, Chanel a pris ses habitudes au Grand Palais – avec une propension à la surenchère, l’invitation avait d’ailleurs annoncé la couleur #ChanelGroundZero, fusée blanche et noire dûment siglée, il serait question de s’en aller très loin dans la stratosphère avec la maison de Mademoiselle confiée il y a 34 ans déjà à monsieur Karl Lagerfeld. Lequel sait y faire quand il s’agit de délivrer un message pas même subliminal. La bande-son de Michel Gaubert laisse entendre le  » Radioactivity  » de Kraftwerk, qui visionnaire date de 1976 mais trouve aujourd’hui son entière justification : il est plus que temps de quitter la terre, sans se retourner, de trouver refuge ailleurs, sur une autre planète, voire dans une autre galaxie. Et pour ce grand départ, mieux vaut prévoir un vestiaire idéal, qui permettra peut-être à l’humanité de ne pas disparaître, quelques basiques bien pensés mais dans des matières pur luxe, les ateliers de la rue Cambon ont une main qu’il serait dommage de ne pas honorer. Sur la liste de ces vêtements d’un nouveau départ : un cycliste à enfiler sous la jupe, on ne sait jamais que la gravité fasse défaut, une couverture de survie pour parer les épaules, un jumpsuit qui pourrait faire penser à une combinaison de travail s’il n’était tout de sequins rebrodés, des vestes en peau lainées aux reflets argents ou aurore boréale pour coller à cette odyssée de l’espace, des bottes glitter pour narguer les constellations, des prints littéralement  » astronaute « , une palette chromatique essentiellement noire et blanche, un sac banane XXL porté en bandoulière, une minaudière lune pleine, des manchons de fourrure, un chemisier blanche impeccable, du tweed pour le souvenir et la voix de Brigitte Bardot qui quémande une  » transfusion de mercure, contact  » pour cause de coeur transpercé par une météorite. A cette panoplie pur luxe, on ajoute quelques mâles en tenue crème pour veiller à la reproduction de la race et l’on emmène aussi un petit d’homme, le filleul du créateur, mêmement vêtu qui dans l’espace intersidéral sera le vrai visage du futur. Final count down.

Miu Miu s’est installé au très sérieux siège du Conseil économique, social et environnemental du Palais Iéna et par la même occasion lui a filé un coup de jeune en recouvrant ses murs, ses rampes, ses escaliers de fourrure parme – les bruits du dehors sont heureusement assourdis, dans ce cocon étrange, il est permis de voir soudain la vie en couleur et en douceur. Justement, les filles pensées par Miuccia Prada n’en font qu’à leur tête, toute disproportion assumée, elles s’engoncent dans leur manteau de fourrure monochrome ou bi ou multi, en une fraîche variation pastel. Elles jouent le contraste avec bottes non assorties, escarpins de satin strassé ou sandales d’hiver. Elles croisent la peau, les poils et le plastique en trench-coats légers. Elles ennoblissent leur anorak de ski référence sixties et le marie à une jupe en maille sous le genou. Il y a beaucoup de jeunesse dans cette collection qui n’a pas peur de l’overdose, un style en soi fait de mélanges qui n’ont rien d’hasardeux. Et qui affiche le sourire dans ces imprimés chat, perroquet, réveil ou téléphone d’avant le Gsm. Un je-ne-sais-quoi d’ultra libéré et sans a priori qui fait office de bain de jouvence.

Louis Vuitton s’offre la Cour Marly du Musée du Louvre, une certaine idée de la statuaire française marmoréenne confrontée aux silhouettes nerveuses voulues par Nicolas Ghesquière. Dans mon champ de vision, le  » Méléagre tuant un sanglier  » signé Nicolas Coustou (Lyon 1698 – Paris 1733) et une armée de mannequins donnant vie à la vision d’un créateur innovant qui prône la recherche comme méthode de travail. Il faut toujours regarder à deux fois son vestiaire qui emprunte ses codes au sportswear, mais pas seulement, et brode en free style une silhouette qui ne ressemble jamais à celles que l’on vient de s’enfiler durant une semaine, c’est sa particularité. Sûr par contre que la saison prochaine, on reconnaîtra partout, en filigrane ou pas, son influence notoire, c’était déjà le cas, dès ses premiers pas chez Balenciaga, en 1997. Sa vision moderniste de la mode ont fait de lui un chef de file, et son sens de la coupe, le reste, décuplé par son approche osée des mariages de matières. Ses bottes ont quelque chose du motard et du cow-boy, les blousons sont courts, le noir dominant, surtout s’il est en cuir – on n’est pas directeur artistique d’un maroquinier pour rien. Les robes chez lui ont toujours une puissance dans la forme qui crisse au premier coup d’oeil puis déclasse le reste. Comme elle fait plaisir à voir, l’inventivité de ce créateur autodidacte tombé dans la mode à l’adolescence, entre le hasard et la nécessité.

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