Hermès et Margiela, un dialogue intime

Cela n’eut rien d’une superposition, tout d’une collaboration intime. De 1997 à 2003, Martin Margiela pensa, dessina, façonna les collections Femme de la maison Hermès.

Hermès - portraits de femme en Hermès : Marie-Anne. Automne-hiver 1999-2000. Photo : Joanna Van Mulder - Maison Martin Margiela. Automne-hiver 1990-1991.
Hermès – portraits de femme en Hermès : Marie-Anne. Automne-hiver 1999-2000. Photo : Joanna Van Mulder – Maison Martin Margiela. Automne-hiver 1990-1991.© Photo: Ronald Stoops. Design Graphique Jelle Jespers

« C’est pour nous une secousse créative et riche d’une énergie à long terme, d’une nouvelle sève dans une branche poussée il y a un demi-siècle déjà, le vêtement féminin d’Hermès », précisait alors son PDG Jean-Louis Dumas, professant que « la vie n’est qu’un processus de changement ».

Vingt ans plus tard, le MoMu, musée de la Mode d’Anvers, scénographie ces années intenses et fertiles qui virent le créateur limbourgeois révolutionner à bas bruit ce vestiaire luxueux, sans laisser le temps défaire son oeuvre. On connaît sa volonté farouche d’ancrer son propos dans la réalité.

« La mode est un métier de l’art appliqué », répétait-il avant de préciser : « Nous cherchons un défi dans le détournement du vêtement sans oublier sa première vocation. » S’il utilisait la forme plurielle de la première personne, c’est parce qu’il détestait tout haut le culte de la personnalité, privilégiait le collectif et le nounoiement participatif.

Hermès - La femme et le photographe : Isabelle. Printemps-été 2001. Photo : Alexia Silvagny - Maison Martin Margiela. Automne-hiver 1991-1992
Hermès – La femme et le photographe : Isabelle. Printemps-été 2001. Photo : Alexia Silvagny – Maison Martin Margiela. Automne-hiver 1991-1992© Photo: Ronald Stoops. Design Graphique Jelle Jespers

A l’époque, Martin Margiela n’est plus un inconnu. Il vient de mettre sur pied sa première expo personnelle au musée Boijmans Van Beuningen à Rotterdam ; cela fait presque dix ans qu’il a fondé sa maison avec Jenny Meirens ; dix-sept qu’il a quitté les bancs de l’Académie royale des beaux-arts, où il a enraciné son savoir.

Déjà son vocabulaire en a bouleversé plus d’un, de même son sens de la perfection, de la coupe et du tailoring, sa façon de dévoiler l’envers du décor, de déstructurer les silhouettes, de chipoter les ourlets, de s’abîmer dans le trompe-l’oeil.

Celui qu’on surnomme parfois le Septième des Six d’Anvers réinvente le vêtement comme personne. Et en jonglant avec les maîtres mots du sellier – qualité, tradition, artisanat, confort -, il fait des merveilles.

Hermès - Losanges. Printemps-été 2003. Photo : Nathaniel Goldberg - Maison Martin Margiela. Printemps-été 1989.
Hermès – Losanges. Printemps-été 2003. Photo : Nathaniel Goldberg – Maison Martin Margiela. Printemps-été 1989.© Photo: Ronald Stoops. Design Graphique Jelle Jespers

Cet ovni à l’exigence esthétique et éthique a réussi le pari du dialogue serein entre son monde à lui, qu’il partageait si bien, et celui de la prestigieuse griffe qui s’en souvient. Cela vaut bien une expo en forme de vibrant témoignage.

Margiela – Les années Hermès, musée de la Mode d’Anvers, www.momu.be

Du 31 mars au 27 août prochains.

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