Jeremy Scott pour Adidas

Jeremy Scott signe une deuxième collection ObyO pour Adidas. Des pièces excentriques et anticonformistes, parfaitement en phase avec la philosophie de ce créateur américain.

Jeremy Scott signe une deuxième collection ObyO pour Adidas. Des pièces excentriques et anticonformistes, parfaitement en phase avec la philosophie de ce créateur américain.

Jeremy Scott est un original. Il cultive l’anticonformisme, adore la provocation. Et a fait de l’excentricité sa marque de fabrique. Jeremy Scott n’est pas n’importe qui. Ce créateur américain été classé, en 2004, parmi les personnalités les plus influentes de la mode, par le magazine The Face. Le nouveau Karl Lagerfeld (dont il aurait été la muse et l’amant), disent ses admirateurs. Digne de Pierre Cardin, juge Suzy Menkes, célèbre journaliste dans le monde de la mode.
Cet incontournable de la nouvelle scène pop art, pourtant originaire de la région rurale du Missouri, lance sa marque à 21 ans. Il se fait remarquer avec ses pantalons à une jambe et ses créations fantaisistes, ressemblant à une barre chocolatée ou à un billet vert. Ami des stars, il habille les plus grands : Kylie Minogue, Madonna, Björk, Robbie Williams… Son style décalé se repère aussi au gré des collaborations multiples, qu’il a signées depuis 2005 : des lunettes de soleil pour Linda Farrow Vintage, l’aménagement du Club Happy Valley à New York, ses interprétations déjantées du sac Pliage de Longchamp – sa toute dernière version présente un imprimé reprenant des avions et des roses -, ou encore plusieurs partenariats avec la marque Adidas. Après avoir conçu quelques modèles de basket, il est un des trois artistes à avoir reçu carte blanche, pour revisiter le look de la griffe aux trois bandes. La première collection de cette ligne ObyO – Originals by Originals – est sortie ce printemps. On y trouve des tee-shirts de base-ball transformés en mini robes à franges ou des baskets parées d’ailes. Un résultat qui a plu, puisque Jeremy Scott a réitéré l’opération et présenté sa version automne hiver 2009-2010, lors de la dernière fashion week de Paris.

Est-il difficile de rester original ?
De nombreuses idées, c’est vrai, sont déjà développées par d’autres créateurs. Depuis le premier jour, mon boulot consiste donc à proposer quelque chose de différent, qui n’a jamais été vu ailleurs. Les vrais créateurs doivent façonner leur propre univers. Il faut de l’inédit, pour prospérer. C’est plus que jamais d’actualité, en ces temps de crise. Dernièrement, j’ai conçu des chaussures, qui se sont vendues en deux jours ! Ce fut le cas, parce qu’elles étaient originales. Les gens veulent vivre de nouvelles expériences, qu’importe le prix. Le caractère unique d’un objet les stimule.

Où avez-vous trouvé votre inspiration, pour cette deuxième collaboration avec Adidas, qui sortira à l’automne prochain?
J’ai pensé à l’Afrique. Ou plutôt à ma vision personnelle de ce continent, car je n’ai jamais été sur place. D’après ce que j’ai vu à la télévision et dans le National Geographic, les vêtements des Africains sont en général un véritable mélange de tout. Certaines pièces viennent d’Europe, d’autres sont composées à partir d’objets qu’ils trouvent. Il y a des imprimés plein de couleurs, des empreintes d’animaux… L’aspect « fake » est aussi très présent : ils se fabriquent des GSM avec du carton, peignent des postes de télévision sur leur mur. J’ai donc joué avec tous ces aspects, pour imaginer quelque chose de plus créatif et personnel. Les Jeeps de safari deviennent des voitures à moitié animale, les planches de surf côtoient des boucliers estampillés du trèfle d’Adidas, on y trouve des bandes de couleur comme celles qui apparaissaient sur les anciennes mires de la télévision…

Vous êtes aussi très passionné par la culture pop et les eighties.
J’ai 34 ans : il est évident que l’époque durant laquelle j’ai grandi m’influence, tout comme Tom Ford a été inspiré par les années 1970. C’est une question de génération. Cela laisse ne fut-ce qu’une trace dans la formation des opinions et des idées. Durant les eighties, Cindy Lauper, Madonna, Annie Lennox et Boy George passaient en boucle à la radio. Cindy Lauper est d’ailleurs une des artistes qui m’a le plus enthousiasmé. Elle s’habillait d’une façon incroyable et excentrique. En matière de style, elle m’a appris à quel point il est précieux de suivre sa propre inspiration.

Les années 2000 sont-elles alors ennuyantes ?
Non, car j’ai l’impression que nous vivons à nouveau une époque bouillonnante, culturellement parlant. Surtout quand on voit que Lady Gaga est numéro 1 aux USA. Elle porte des vêtements qu’elle se fabrique elle-même. Elle chante en petite culotte, sans y donner une connotation sexuelle. Dans cette époque changeante, les portes s’ouvrent. Aux États-Unis en tout cas, c’est flagrant. Même si l’instabilité de l’économie génère des craintes, j’espère que cet état d’esprit novateur stimulera davantage la créativité et l’originalité.

Vous collaborez avec de nombreux artistes. Est-ce un moteur d’inspiration ?
Il n’y a aucun doute là-dessus. Björk, Madonna, Kanye West ou MIA font partie des personnalités les plus inspirantes au monde. J’ai la chance de bénéficier de leur amitié et de leur soutien, notamment quand ils portent mes créations. J’ai énormément appris d’eux. C’est très excitant ! Quand je crée une collection, je pense à eux, à ce qu’ils aimeraient porter. Des vêtements dans lesquels on peut danser, donner un concert… Des vêtements confortables, que l’on n’a pas peur d’abîmer. C’est une mode fun, consommable.

Votre propre collection pour l’hiver prochain met largement en scène Mickey Mouse, un personnage ludique que vous affectionnez…
Mickey est plus que jamais dans l’air du temps. Ce personnage a été créé dans les années 1930, en période de grande récession économique. Partout dans le monde, il est le symbole de l’optimisme, du bonheur et de la joie. Son succès perdure dans le temps. Et puis, il vit une histoire d’amour éternelle avec Minnie. Qu’a-t-on besoin de plus aujourd’hui que d’amour ?

Certaines personnes ne vous prennent pas au sérieux. Les critiques vous atteignent-elles ?
Je préfère susciter une réaction forte que pas de réaction du tout. Mais ces personnes ne sont pas celles qui portent mes vêtements. Je ne peux pas prétendre que mes créations plaisent à tout le monde. Cependant, elles sont sincères et authentiques. Et je reçois un feedback très positif de la part d’une certaine génération. Qu’importe les critiques, je me concentre sur mon travail, en restant fidèle à mes convictions originelles. L’important n’est pas de vendre le maximum de pièces, mais bien de développer mon univers créatif.


Propos recueillis par Catherine Pleeck ?

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content