L’été 2009 à New York

Retour sur les temps forts des défilés Eté 2009 de la Fashion Week new-yorkaise.

« Fashion = change », « Electoral couture », « Fashion wins », « Vote fashion »… La mode a parfois de l’humour, finalement… En témoigne cette profusion de logos affichés à la façon de grands badges colorés sur les tentes de Bryant Park, QG des défilés new-yorkais, singeant l’esthétique militante. Le 5 novembre, l’Amérique aura son nouveau Président, et la mode a déjà largement choisi -Diane Von Furstenberg, Derek Lam, Tracy Reese et tant d’autres ont créé une pièce aux couleurs d’Obama, en vente bientôt sur www.barackobama.com

Au défilé Hervé Léger, Olympia Le Tan (créatrice de sacs et clubbeuse effrénée), Olivier Zahm (fondateur et directeur du magazine Purple), entre autres, ont chacun leur veste en jean brut Levi’s customisée vendue en exclusivité (et en série limitée, bien sûr) dans la mini-échoppe éphémère Colette X GAP, qui vient d’ouvrir sur la cinquième avenue (680 5th Av.).

Chez Hervé Léger, donc, du mini, du sexy, des bandages voire du bondage! Max Azria multiplie les propositions autour de la robe, mini toujours, asymétrique un jour, coeur croisé le suivant, bustier encore, dans des tonalités audacieuses allant du jaune au tangerine, du saumon au rouge vif. Il envisage la robe comme une accumulation de bandelettes lacérant le dos jusqu’aux épaules, découpant le corps en diagonales infinies. Des momies en mini, absolument sexy! « J’adore les bandages, c’est mon obsession! », nous confiait, enthousiaste, la comédienne Lou Doillon, elle-même ceinte dans une création grise Hervé Léger. « Avec ce genre de robes, on peut sauter en boîte, on est ultra-féminine sans être princesse neuneu ». La jeune femme s’est autorisée quelques escapades aux shows tandis qu’elle répète une pièce de Beckett, The Image, pour le festival Crossing the Line de l’Alliance Française.

Chez Diane Von Furstenberg, on a le loisir d’apercevoir Anna Wintour sans ses lunettes de soleil… mais qui oserait pour autant chercher à croiser son regard? Diane Von Furstenberg, présidente du Council of Fashion Designers of America, esquisse une néo-bohémienne (bien que sa collection s’appelle « Rock Goddesses », on cherche un peu le rock…) en robes multi-volantées, en tunique imprimée de papillons, en bermuda à sequins ou en sarouel marron.

Les filles de Diane sourient de se voir si belles dans ces couleurs chatoyantes (orange, fuschia, vermillon) et ces fleurs dans leurs cheveux, nouées en serre-tête sur le haut du front, telle Coco Rocha, qui irradie sous sa capeline jaune. La guipure reprend ici du service, en version blanche sur une robe courte très 60’s. Une énergie joyeuse ondoie sur le podium et au premier rang, où applaudissent Uma Thurman et Jennifer Lopez.

Plus de vigueur et d’acuité chez Proenza Schouler, brillant jeune duo de la mode américaine, vite adoubé par Anna Wintour, encore elle, qui est personnellement remerciée sur le bristol distribué au défilé. « Please, be patient! » implore l’homme de la sécurité à quelques minutes du début du show, osant faire patienter Andre Leon Talley (Vogue US) et Suzy Menkes (International Herald Tribune) debout parmi la foule des anonymes… tout ca pour laisser passer la starlette Nicole Richie et son escorte! Bill Cunningham, photographe chenu du New York Times, prend le temps d’immortaliser quelques-unes des plus belles allures de l’assemblée. Enfin, show must go on! Le duo Proenza Schouler (Jack Mc Collough et Lazaro Hernandez) revisite les années 80 à l’aune de 2008 avec des combi-pantalons et combi-shorts très architecturés (dont un très beau passage argenté zébré), des pantalons larges à taille haute, des vestes courtes à dos décollé portés avec des gants de motard noir, une salopette en cuir et chemise blanche avec bretelles harnais, très hot couture! L’ensemble, d’une bichromie noire et blanche, est énergique, très cohérent.

« Ladies & Gentlemen, please take your seat! The show is about to begin! » Dès 9.10 p.m. (21h10) soit 10 minutes seulement après l’heure affichée sur le carton, une voix grave résonne dans le New York State Armory, lieu du défilé Marc Jacobs. Ereinté par la critique l’année dernière pour avoir fait patienter ses hôtes pendant deux heures (« I would like to murder him with my bare hands », avait notamment dit Suzy Menkes), l’enfant terrible de la mode new yorkaise veut se rattraper. A 21h15, le temps que Jennifer Lopez, Nicole Richie, Victoria Beckam, Sofia Coppola, Winona Ryder, Kelly Osbourne…, s’installent, c’est parti. Avec Gerschwin en bande-son, sur un podium piqué de miroirs rectangulaires dressés vers le ciel créent un effet de labyrinthe et de diffraction, Marc Jacobs campe une sorte de Mary Poppins en jupe longue bouffante et asymétrique, corsage étroit et canotier de paille. Mais le créateur brouille les pistes avec des tissus ethniques, des effets de brillances métalliques, des sequins à l’indienne, des carreaux bûcheron Country s’entrechoquant à des madras lamés, des tweeds multiclores, des kimonos… Entre déjeuner sur l’herbe, fantaisie victorienne et inspiration kabuki, toutes les sources fusionnent et composent une fraîche élégance.

La veille, Calvin Klein fêtait ses 40 ans dans une installation éphémère aux abords de Meatpacking District, immense boîte immaculée dans laquelle James Turrell avait conçu une oeuvre bleu Klein, « Two Blues ». Sur une centaine de mètres, les invités cheminaient à loisir le long d’un chemin d’acier posé sur une ancienne voie ferrée aérienne qui desservait auparavant la côté ouest de Manhattan.

Calvin Klein himself était absent (le maître minimaliste a vendu sa griffe au groupe Philipps-Van Heusen Corporation en 2003), mais tous les socialite new-yorkais s’étaient donné rendez-vous à cette belle party, venus danser sur trois tubes r’n’b de la chanteuse Estelle. Où l’on croisait Brooke Shields, muse de la marque en 1978 avec une torride campagne pour les jeans, Eva Mendes, nouvelle égérie lingerie de la griffe, Halle Berry… et encore Anna Wintour, flanquée ce soir-là de Bee, sa ravissante fille.

Le 9 septembre, la directrice du Vogue US a donné, avec Sarah Jessica Parker, une soirée pour soutenir Barack Obama, avec un défilé mettant en scène des looks de Diane von Furstenberg, Marc Jacobs ou Zac Posen. Les fonds récoltés seront reversés à Barack Obama. C’est donc ça, l’ « electoral couture »!

Katell Pouliquen (Lexpress.fr)

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