La mode est à Hyères

Le Festival international de mode et de photographie d’Hyères fête ses trente ans. Roulez, jeunesse.

Quand Jean-Pierre Blanc a ouvert très officiellement son Festival international de mode et de photographie d’Hyères, sa voix a tremblée. C’était jeudi 23 avril en début de soirée, dans les jardins de la Villa Noailles, il était ému, c’est peu de le dire. Il y a trente ans il avait une petite vingtaine d’années et osa rêver de créer cet événement atypique où se rencontrent les jeunes créateurs et les professionnels , où le mot « partage » a vraiment du sens. Il a laissé couler quelques larmes et dressé la longue liste des partenaires, avec en haut de l’affiche Chanel invité d’honneur de cette 30e édition. Fleur Pellerin, ministre française de la Culture, avait fait le déplacement, sûr que Jean-Pierre Blanc y a vu plus qu’un signe – soutenir la création est un acte politique.

Vendredi 24 avril, place à d’autres discours, ceux des stylistes sélectionnés qui ont un quart d’heure montre en main pour défendre leur travail, leur univers devant un jury de haut vol présidé par Virginie Viard, directrice du studio Chanel, et composé, notamment, d’un créateur belge (Anthony Vaccarello), d’un musicien (Sébastien Tellier), d’une actrice (Anna Mouglalis), d’un journaliste et réalisateur (Loïc Prigent), d’une architecte et designer (India Mahdavi), d’une altesse royale (la Princesse de Hanovre). Un jury qui a de quoi impressionner ces jeunes venus d’un peu partout et, cette fois-ci, beaucoup d’Helsinki (Finlande), il semble que l’Université d’Aalto forme des futurs grands. Dans une tente immaculée, sous un soleil caressant, ils tremblent un peu en détaillant leurs silhouettes. C’est aussi ça, le métier de créateur de mode : mettre des mots sur un imaginaire, des volumes, des matières, des vêtements. Certains s’en sortent mieux que d’autres. On retiendra l’humour d’Anna Bornhold et son travail sur le vrai et le faux, les accessoires stylés de Sophie Harand, l’imagerie « Rambo » et « Rocky » très Stallonienne de Heini-Maria Hynynen et Elina Aarela, l’élégance d’Annelie Schubert, la fraîcheur irisée de Wieke Sinnige, le masculin-féminin de Christina Braun, la flamboyance klimtienne de Sophie Salekari…

Le soir, au Hangar de la Mouture, dans le Salin des Pesquiers d’habitude uniquement habité par les moustiques, les collections des dix finalistes s’offrent un joli tour de piste. Ca défile professionnellement, l’occasion de voir grandeur nature et en mouvement leur garde-robe idéale, une signature forgée à l’école et désormais confrontée à la réalité portée. Le lauréat de l’année dernière, Kenta Matsushige défile lui aussi avec sa collection (sublime) réalisée avec les maisons des Métiers d’art de Chanel, le brodeur Lesage, le plumassier Lemarié, le bottier Massaro et le chapelier Maison Michel. Avec lui, on comprend combien dieu est dans les détails – la mode, quel bel artisanat.

Anne-Françoise Moyson

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