La seconde vie de Courrèges

© Stephane Cardinale/People Avenue

André Courrèges, c’est le génial inventeur de la robe trapèze, du blouson en vinyle, des petites bottes plates… Une vision futuriste de la mode qui a influencé toute la décennie des sixties. Cinquante ans plus tard, cette maison parisienne renaît de ses cendres avec, à sa tête, Jacques Bungert et Frédéric Torloting, deux ex-pointures de la pub. Interview, conjuguée au passé, présent et futur.

Au cinquième étage du n°40 de la rue François-Ier, dans le VIIIième arrondissement parisien, les années ont filé, sans rien modifier. Toujours un décor rétro-futuriste aussi immaculé qu’épuré, des canapés virginaux, un sol en marbre blanc fatigué par les pas, des flacons de parfum au graphisme désuet enfermés dans des étagères transparentes, quelques robes en Plexiglas affichées sur les murs… Seul un écran plasma posé en travers de la table en verre semble avoir été installé là dans l’unique but de rappeler que nous sommes en 2012. Et non plus en 1965, date à laquelle André Courrèges et Coqueline, sa complice de toujours, emménagent dans cet immeuble cossu de la capitale française.

1965, une date qui reste aussi dans les mémoires pour la collection avant-gardiste signée alors par le créateur. Les magazines de mode de l’époque la qualifient de bombe, tant les pièces imaginées par cet ancien étudiant de l’École nationale des ponts et chaussées, formé par Balenciaga, révolutionnent le vestiaire féminin : robe raccourcie qui dévoile le genou, taille et hanches effacées, pantalon à porter au quotidien, chaussures plates, couleurs franches ou blanc omniprésent, matières qui ne compriment pas le corps… Les trente glorieuses sont à leur apogée, tout semble possible, la France et l’Europe ont soif de liberté, jusque dans leurs garde-robes.

Le mot d’ordre qui prédomine, dans toute réflexion de la griffe ? Allier la fonctionnalité à l’esthétisme. Aucun zip ne doit ainsi être placé par hasard. Chaque couture, chaque détail doit avoir du sens, que ce soit pour libérer la silhouette ou en corriger un défaut. André Courrèges est également convaincu que l’industrie peut être aussi performante que l’artisanat d’un point de vue qualitatif, du moment que le vêtement soit bien construit. Un point de vue qui permet de rendre la mode accessible au plus grand nombre. La révolution est définitivement en marche et la marque s’intéresse aussi à d’autres domaines, comme ceux du design, de l’art ou de l’automobile.

Après un rachat catastrophique par le groupe japonais Itokin dans les années 80, le créateur visionnaire finit par récupérer sa maison de couture. En 2002, année de son dernier défilé, la marque devient confidentielle. Les Courrèges cherchent en vain un repreneur qui les agrée… jusqu’à la parution, dans Madame Figaro, d’un édito signé par Jacques Bungert et Frédéric Torloting, alors présidents de la filiale française de l’agence de pub Young & Rubicam. Séduite, Coqueline les contacte et, au fil des rencontres, la magie des relations humaines fait son effet. Le duo d’entrepreneurs, qui se connaît depuis l’École de commerce de Lyon, a l’ambition de racheter une société. Quelques millions plus tard, l’affaire est entendue, juste à temps pour fêter les cinquante ans de cette maison, fondée en 1961.

Rencontre avec ces nouveaux venus dans la sphère fashion, forcément rompus au discours marketing.

A lire dans votre Vif Weekend en vente dès aujourd’hui.

C.Pl.

www.courreges.com

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