Paris Byzance aller-retour

Le défilé des métiers d’art de Chanel a fait la part belle aux influences orientalistes. Récit avec notre journaliste mode.

J’ai fait l’aller-retour Paris-Byzance en quelques dizaines de minutes, les fesses sur un coussin à sequins, sans bouger de la Rue Cambon, premier étage, avec une petite centaine de personnes à peine, stars comprises, tous embarqués dans la même aventure. N’allez pas croire que je suis ultra fortiche, c’est Chanel qui l’est, avec son défilé et son hommage annuel aux métiers d’art. Un truc fou que seule cette maison hors du temps et les deux pieds dans le 21 ème siècle peut (s’) offrir. Un voyage spatio-temporel très Mademoiselle, puisque chez elle tout était toujours byzantin et que Karl Lagerfeld, en digne successeur, a fait de même pour cette neuvième collection qui met à l’honneur le parurier Desrues, l’orfèvre Goossens, le plumassier Lemarié, le brodeur Lesage, le bottier Massaro, le modiste Michel et le parurier floral Guillet.

Dans un décor hollywoodien, entre le Palais Ottoman avec dorures sur traversins et la Basilique Saint Vital à Ravenne avec mosaïques sur sofa moelleux, Clémence Poésy (actrice), Marianne Faithfull (chanteuse et photographe) et Bambou (femme de.) croquent des macarons à l’eau de fleur d’oranger et à la menthe. Je fais de même. Michel Gaubert aussi, le sound designer a préparé une bande-son qui colle au décor, me dit-il, de l’ordre « d’un orientalisme rêvé ». Battements de coeur, cliquetis du rideau de perles, c’est de là qu’entrent en scène les mannequins (plus en cerise sur le gâteau, Baptiste Giabiconi, top model chouchou de la maison et également chanteur à ses heures). Décollage en douceur, avec des silhouettes presque austères, puis feu d’artifice. En Français : tuniques, toges, chasubles en tweed brouillé d’or, satin cuir, velours, cachemire, mousseline, dentelle et tulle avec galons, broderies, boutons cabochons, ceintures en carrés de pâte de verre, minaudières incrustées. Une longue liste de matières somptueuses, d’accessoires et d’inventions stylistiques signées CC, le tout porté sans talons ou presque, maximum 4 centimètres à vue de nez.

Quand ce tourbillon prend fin, que tout le monde se lève comme un seul homme après que Karl Lagerfeld fut venu saluer en bonne et due forme, on est un peu sonnée de tant de magnificence. On se répète légèrement hébétée « c’est Byzance ». Et jamais cette expression n’a si bien voulu dire ce qu’elle voulait dire.

Anne-Françoise Moyson

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