Paris Fashion Week: Ennui chez Nina Ricci, magie chez Manish Arora

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Il a des jours où ça commence mal, très mal et puis il suffit d’un magicien qui fait apparaître et disparaître des filles et soudain la vie vous sourit.

Donc, d’abord l’ennui. Avec Zac Posen et ses robes red carpet un peu mémères et sexy gluantes, rien d’incompatible. Ultime chic bourgeois, porter une bague au petit doigt, et des talons hauts, très hauts et très pointus.

Ensuite, ouf, la magie. Avec Manish Arora, dans un ancien garage où son feu d’artifices incendie l’assemblée. Un homme avec flambeau, grande barbe, tout de noir vêtu, pose un drap sur une cage vide, fumée, hocus pocus et hop, le voile enlevé, derrière les barreaux, une fille apparait « un peu gipsy et new age » en Manish Arora des pieds à la tête, sauf les shoes made in collaboration with Nicholas Kirkwood. Il y a des borderies en veux- tu en-voilà, des perles, des strass, des imprimés chamarrés inspirés par le travail de l’artiste berlinoise Amrie Hoffstater et trois accessoires signés Christophe Coppens – « des bijoux de corps », plutôt, rectifie-t-il, « en feutre et avec embellishments ». Ce n’est pas la première fois que ces deux-là s’acoquinent, c’est même la deuxième, et c’est plutôt top. Abracadabra.

Puis la poésie. Avec Ann Demeulemeester. Au couvent des Cordeliers, elle décline le noir, son parti pris, et le cuir plus la fourrure et des plumes partout, posées sur la tête, en ceinture fichées dans des gibecières, à l’encolure sur des robes longues et vaporeuses. Rien de sombre, aucun noir n’est pareil, tous laissent parler les matières, les contrastes, les drapés, les envolées si belles. Un même chemin jamais identique, comment fait-elle ?

Ensuite le pragmatisme. Avec l’homme d’affaires Luc Duchêne pour Luc.Duchene, dans sa nouvelle boutique show room parisienne, refaçonnée « atelier ». Une autre histoire, « Chine m’emmerdait », il a fait « table rase », tout balancé ou presque, juste gardé Tim Van Steenbergen qu’il « utilise pour ce qu’il sait faire », des drapés et des coupes millimétrées, plus à sa demande, quelques vestes jackiekennedy en pied de poule ou stevemcqueen en cuir.

Puis après, la création. Avec Lutz, et soudain du jaune pour des robes légères à peine ceinturées ou portée sous des vestes très travaillées, avec attention particulière aux revers. « Soft armour », c’est le titre de sa collection, donc très logiquement, il y de l’armure là-dedans, avec des cachemires et des laines rigides et protectrices, et aussi de la douceur, dans la soie qui vient en contraste. Avec ses pulls recouverts d’un film d’argent à effet cotte de maille, Lutz emprunte le trajet le plus court pour aller de Jeanne d’Arc à Mars. On est partante.

Dans la foulée, la (re)création. Avec A.F. Vandevorst, en une variation maîtrisée, et décalée, de l’uniforme, du plastron, du plissé, du faux cul. Un orchestre life – trompette, contrebasse, batterie, une sonnerie aux morts pour débuter, et du papier journal glissé dans les silhouettes, en guise de geste de dernière minute, comme un écho aux jupes plissées, aux chemises imprimées, aux jabots effilochés. Les vestes très courtes devant, avec des pans comme ramenés vers l’arrière donnent un allant vraiment bluffant.

Et rebelote, l’ennui. Avec Nina Ricci et Peter Copping, qui fait des vêtements de cocktails inspirés de John Currin, Ingres, Marlene Dumas, John Singer Sargent, Tamara de Lempicka et Vanessa Beecroft, tout ça à la fois. On nous dit que la silhouette est « parisienne », l’élégance « glamour et sensuelle », en bleu layette et galons de fourrure. Il a certes du métier, il fut assistant de Marc Jacobs, ça n’empêche pas les clichés.

Anne-Françoise Moyson

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