Quel avenir pour Christian Lacroix?

Prononcé le 1er décembre, le redressement judiciaire de l’entreprise a mis fin à ses activités de haute couture et de prêt-à-porter. Analyse de la situation.

Depuis mardi, la mode pleure Christian Lacroix. Le Tribunal de commerce de Paris a décidé d’appliquer le plan de redressement proposé par le groupe Falic (propriétaire de la maison de couture), prévoyant de ne garder qu’une douzaine de salariés sur 120, et de sacrifier le prêt-à-porter et la Haute Couture. Du nom Christian Lacroix ne restera que les licences des accessoires et des parfums.

« Le système de licences à tout-va, et surtout sans « coeur » de création puisque il n’y a plus ni couture ni prêt-à-porter, est pathétique », s’émeut Jean-Jacques Picart, consultant luxe et mode qui a accompagné les débuts de Lacroix dans sa maison de couture. « D’autant qu’avec la crise et le changement de valeurs qui s’ensuit, les consommateurs n’acceptent plus d’être bernés, poursuit-il. Il n’est pas certain que des produits créés par une équipe de mercenaires « à la manière de Lacroix »puissent être suffisamment attractifs pour avoir du succès ». Et même si, ce matin, Louis Pétiet, le PDG de Bernard Krief Consulting (BKC), a indiqué qu’il maintenait son offre de reprise, il n’a apporté à ce jour aucune garantie financière. Rien qui permette d’espérer, dans les mois qui viennent, revoir fleurir les oeillets fétiches du couturier, que le public lançait à son passage, à la fin de chaque défilé…

Il lui a manqué un alter ego financier

Comment en est-il arrivé là? Il a manqué à l’immense artiste qu’est Lacroix un alter ego financier, et il n’a jamais pu ou su transformer son incroyable notoriété en business rentable. S’il a toujours suscité une énorme sympathie, cet amour ne s’est jamais vérifié dans les chiffres de ventes. En 2008, la maison Lacroix a accusé 10 millions d’euros de pertes pour un chiffre d’affaires de 30 millions d’euros.

Lacroix ne s’est jamais plié aux règles du marketing. Le souci des ventes a toujours atrocement ennuyé cet Arlésien de 58 ans qui a le génie des silhouettes baroques, flamboyantes et féériques, souvent nourries des traditions gitanes et de l’histoire du costume. Chez lui, jamais de it bag -ces sacs cultes assurant une bonne partie des recettes-. Ses lignes plus démocratiques (Lacroix jeans ou Lacroix Bazar) ont été négligées, et il devenait très difficile pour les clients de s’approprier son univers.

Certes, Lacroix continue d’exercer son talent exceptionnel ailleurs, via sa société XCLX: design de TGV, d’hôtels et surtout costumes de théâtre comme bientôt Fortunio à l’Opéra Comique mis en scène par Denis Podalydès.

Reste la question cruciale: quel avenir pour le couturier? « Haut les coeurs et Lacroix for ever! », implore Jean-Jacques Picart. « Son talent est entier, exceptionnel, unique et il est A LUI! » Allusion au fait que son propre nom n’appartient plus au créateur. S’efforçant de garder espoir, Picart poursuit: « Qui sait s’il n’y aura pas bientôt un scénario de reprise? Je crois en la force du talent vrai. Je crois donc en un futur surprenant pour Christian Lacroix ». Puisse-t-il avoir raison.

Katell Pouliquen, Lexpress.fr Styles

Diaporama sur la maison Lacroix en dix dates ICI

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content