Portrait d’Alexandre Robicquet

Alexandre Robicquet. © YVES SAINT LAURENT

A 26 ans, le chercheur en intelligence artificielle est l’un des visages du nouveau parfum Y d’Yves Saint Laurent. Ses travaux visant à rendre nos machines plus  » humaines  » pourraient un jour changer – en mieux – la face du monde.

Parlez-vous mathématiques ? Un langage comme un autre,  » à la portée de tous s’il est enseigné comme il faut, avec passion « , Alexandre Robicquet en est convain-cu, lui qui a vu en elles la mère de toutes les sciences, celle qui permet de comprendre ce qui est et de mettre au jour les savoirs à venir. Gamin déjà, il n’avait que ces mots-là à la bouche, pourquoi, comment, habité qu’il était par l’obsession de décortiquer les choses jusqu’à l’essence même de leur fonctionnement. Diplômé de Normale Sup’ Cachan, il a des envies d’ailleurs, ça tombe bien, les universités américaines de UCLA puis Stanford ont des projets pour lui. Son quotidien, ce sont ces algorithmes dits de deep learning qui apprennent à la machine à s’améliorer et à développer de l’empathie vis-à-vis de celui qu’elle sert.

Il faut mettre toute son âme et son énergie dans ce que l’on fait.

C’est peu de dire que ce Français de 26 ans est sorti de sa zone de confort en acceptant de devenir l’un des visages du parfum Y d’Yves Saint Laurent, les deux autres – un rappeur et un sculpteur graffeur – étant plus dans leur rôle ou du moins dans l’idée que l’on s’en fait, les artistes n’aiment-ils pas la lumière ?  » Pour tout vous avouer, je suis un peu perdu, reconnaît-il. Ce n’est absolument pas l’univers dans lequel j’évolue mais c’est cela qui est intéressant. C’est le seul projet de ce type auquel j’aurais pu dire oui, car cette campagne cherche à véhiculer des valeurs saines qui sont les miennes, sur le travail notamment, l’idée d’accomplissement, le fait qu’il faut persévérer, mettre toute son âme et son énergie dans ce que l’on fait.  » Titillé sur l’idée qu’on l’a choisi aussi sur photo pour incarner le slogan à la mode  » smart is the new sexy « , le cador de l’intelligence artificielle (IA) préfère botter en touche.  » Pour moi, cette phrase est complètement fausse parce que smart a toujours été sexy ! Si vous rencontrez une personne qui vous fait vibrer parce qu’elle est passionnante, elle est forcément attirante.  » Il l’admet pourtant, le stéréotype du geek coincé, asocial, a la peau dure.  » C’est un peu comme si dans la tête du grand public, tous les scientifiques devaient avoir le même look pour être crédibles. Et c’est vrai dans les deux sens d’ailleurs, car il est facile pour un chercheur de se laisser enfermer dans cette image.  »

S’il a accepté de jouer ainsi les  » role models  » auprès des Millennials abreuvés d’images de montreurs plutôt que de faiseurs, c’est pour mettre en lumière le job de l’ombre de garçons et de filles qui, comme lui, font bouger les lignes à coups d’équations.  » Notre boulot n’a rien d’abstrait, assure-t-il. C’est au contraire très appliqué, comme les recherches que mène le laboratoire pour lequel je travaille à Stanford. Grâce à nos algorithmes, les machines deviennent plus intelligentes à chaque itération. Un jour j’espère, elles seront capables de détecter la présence d’une tumeur sur une image.  » Aussi bien, si pas mieux, qu’un médecin ?  » Ce n’est pas parce qu’un robot sera plus performant qu’il sera un danger, plaide-t-il. Cela peut effrayer, d’imaginer qu’une machine pourrait remplacer l’humain. C’est d’ailleurs essentiel d’être conscient de l’existence de ces peurs, que ce genre de recherches soit encadré par des programmes gouvernementaux.  » A l’en croire, d’ailleurs, la menace est loin d’être imminente – même s’il travaille lui-aussi à la mise en place de garde-fous contre l’usage abusif de données personnelles.

Car, comme si cela ne suffisait pas, Alexandre Robicquet a également créé sa start-up. Il y est toujours question d’IA, mais la machine, cette fois, pourrait devenir le meilleur assistant personnel qui soit : capable de deviner le moindre de vos désirs sur la base de ce qu’elle sait et continuera à apprendre de vous, mais muette comme une tombe si elle devait tomber dans les mains de quelqu’un d’autre. Pas de risque, dès lors, que l’IA se fasse la malle avec ses semblables comme dans le bouleversant Her de Spike Jonze. Son programme sera sans doute à l’image d’Alexandre. Persévérant et déterminé. A mieux vous aider.

BIO EXPRESS

1990 Naissance à Talence.

2011 Admission à l’Ecole normale supérieure de Cachan.

2014 Intègre le département IA de Stanford. Ses recherches visent entre autres à développer des algorithmes facilitant la détection précoce de cancers par analyse d’images médicales.

2016 Crée avec deux partenaires la start-up Crossing Minds, spécialisée dans la mise au point de plates-formes capables de s’adapter individuellement à chacun de leurs utilisateurs.

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