Emilie Dequenne : « Le harcèlement ne se limite pas au cinéma »

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Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

L’actrice belge nous a confié son opinion sur le débat du moment, autour de l’affaire Harvey Weinstein, lors de notre rencontre pour la présentation de son film, Au revoir là-haut, en salle ce 25 octobre.

La parole féminine sur le harcèlement dans le monde du cinéma s’est libérée ces derniers jours suite aux révélations sur les agissements du producteur Harvey Weinstein. S’agit-il selon vous d’un phénomène médiatique ou d’une vague de fond propre à changer les choses ?

Je n’en ai aucune idée. Ce que je sais, c’est que ça ne se limite pas au cinéma! Il y a une histoire de pouvoir, les gens qui en ont peuvent avoir tendance à en user et à en abuser. Qu’ils soient hommes ou femmes. Mais le problème essentiel est et reste la place de la femme dans la société, dans le monde du travail. On est encore très, très en retard. Il est grand temps d’en finir avec l’inégalité de traitement en matière professionnelle. Ma cousine vient d’avoir son diplôme d’enseignante. Son pote a terminé les mêmes études et commence à travailler en même temps qu’elle. Et il a déjà un salaire plus élevé qu’elle. Vous trouvez ça normal ? Moi je dis :  » Allô ? On est en 2017 !  » A même diplôme, mêmes compétences, mêmes responsabilités, commençons enfin à payer un individu et pas un sexe ! La question du harcèlement relève à mes yeux plus du rapport au pouvoir et de la perversion. C’est compliqué.

Mais en tant que comédienne, pensez-vous êtes particulièrement exposée?

On est certes plus fragile en tant que comédien ou comédienne parce qu’on dépend du désir des autres. On doit forcément susciter le désir du metteur en scène ou du producteur, y compris dans une dimension sensuelle. Et les barrières deviennent alors très fines, trop fines parfois… Je pense qu’une bonne partie des comédiennes qui passent à la réalisation sont stimulées par l’envie de ne plus dépendre du désir des autres, mais d’être soi-même à l’origine de la création. Si je le faisais un jour moi-même, ce serait pour ne plus être dans cette position d’être choisie, qui n’est pas très agréable.

En novembre prochain, sur France 3, vous incarnerez Flavie Flament dans La Consolation. Une histoire vraie, une histoire d’abus…

Une magnifique rencontre avec Flavie, que j’adore. La comédienne qui la joue enfant, Lou Gable, est juste fabuleuse. J’espère que ce film va permettre de soulever le problème de la prescription, qui fait qu’un monsieur qui va violer des enfants ou de très jeunes pré-adolescentes, va échapper à toute sanction si ses victimes, traumatisées, ne parlent qu’au bout d’un certain temps. Je pense que je ne suis pas la seule à trouver ça insupportable…

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