Bordeaux, « ville du bonheur » victime de son succès

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Flambée immobilière, engorgements routiers, ressentiment contre la « gentrification »: l’arrivée du train à grande vitesse à Bordeaux a mis en relief les nombreux défis que doit relever la métropole du sud-ouest de la France, au risque de devoir réviser ses ambitions.

Les années 2000, avec la rénovation du centre historique et la construction du tramway, avaient sonné l’heure du réveil pour la « belle endormie ». Quinze ans plus tard, l’arrivée du TGV, qui place Bordeaux à deux heures de Paris, a ouvert une nouvelle période de transformations pour la désormais capitale de la Nouvelle-Aquitaine, plus vaste région de France.

« Un million d’habitants en 2030 »: le maire et ex-Premier ministre français Alain Juppé (LR), également président de Bordeaux Métropole (760.000 habitants dont 250.000 dans la ville-même), ne cesse de marteler cet objectif. Car « quand une ville pèse au niveau démographique, elle pèse au niveau économique, politique et de l’emploi », rappelle Michel Duchène, vice-président de la métropole chargé des grands projets urbains.

Et depuis deux ans, les transformations sont visibles et côté entreprises, outre les traditionnels secteurs du vin (60.000 emplois en Gironde), de l’aéronautique (50.000 emplois), de la santé (25.000 emplois), la métropole a lancé une politique volontariste pour attirer les entreprises du numérique, de l’industrie créative et de l’innovation.

Un « écosystème en plein essor » se félicitait récemment l’ex-présidente d’Endemol France, Virginie Calmels, première adjointe à la mairie en charge de l’économie et vice-présidente de Bordeaux Métropole, après les installations de bureaux par Ubisoft (jeux vidéo), OVH (hébergement internet), Betclic (paris en ligne)…

Bordeaux the place to be !

Bordeaux, au splendide coeur XVIIIe siècle classé par l’Unesco, a mis les bouchées doubles pour attirer, au-delà des touristes, cadres et entreprises. Qualité de vie, gastronomie, ville « durable » sont régulièrement vantés.

Bordeaux,
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« Bordeaux, the place to be! », clame « Invest in Bordeaux », l’agence de développement économique, aidée par le classement de la ville comme première destination à visiter au monde en 2017 par le guide Lonely Planet ou le label « Best European Destination » décerné en 2015 par une agence de promotion du tourisme européen.

L’attractivité est forte. Mais Bordeaux n’est-elle pas victime de son succès? Au risque d’un retour de bâton dont a témoigné fin octobre une querelle autour d’autocollants « Parisien rentre chez toi » et de tags « anti-riches » dans le quartier historique et populaire de Saint-Michel touché par une « gentrification » galopante.

« Il y a eu une communication outrancière sur « Bordeaux la ville du bonheur » », dénonce Vincent, urbaniste soucieux d’anonymat, un des deux animateurs de la page Facebook humoristique « Front de libération bordeluche (parler populaire de Bordeaux) face au parisianisme » (7.000 abonnés). Se défendant de tout « racisme, il relève surtout l’aggravation de problèmes « structurels » devenus plus saillants avec l’arrivée du TGV.

« C’est vrai qu’il faut gérer cette crise de croissance », reconnaît Patrick Seguin, président de la Chambre de commerce et d’industrie de Gironde.

Presque une fronde!

Parmi les défis, celui du logement. Bordeaux connaît depuis deux ans un marché immobilier très tendu, avec une hausse spectaculaire des prix (+15% en 2016) couplée à une explosion des offres de locations saisonnières (10.000 biens proposés sur Airbnb).

Début octobre, le recteur de l’académie de Bordeaux, Olivier Dugrip, a dû lancer « un appel à tous les propriétaires privés » pour loger les étudiants. Selon le syndicat Unef, un millier d’entre eux étaient toujours sans solution de logement.

Autre point noir, l’engorgement récurrent des transports routiers dans la métropole, troisième agglomération de France la plus congestionnée, après Marseille et Paris, selon le baromètre TomTom Traffic Index.

Malgré le plus grand réseau de tramway de France, la « thrombose » bordelaise, alimentée par d’incessants bouchons sur la rocade, portion de l’autoroute vers l’Espagne et Toulouse empruntée quotidiennement par 130.000 véhicules, pèse toujours plus sur les temps de transport.

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