Downtown Los Angeles, de la décrépitude au luxe

People wait in line to get into the popular sausage restaurant Wurstküche in downtown Los Angeles’ trendy, upscale Arts District, March 31, 2017. Once a bleak and rundown neighborhood filled with half-empty office buildings and deserted streets, downtown Los Angeles is experiencing a stunning revival as scores of restaurants, businesses and new residents pour into the city. / AFP PHOTO / Robyn Beck © AFP

Jadis sinistre et désert, le quartier de Downtown Los Angeles, centre administratif et culturel historique de la métropole californienne, fait l’objet d’une spectaculaire revitalisation urbaine.

Lofts, hôtels, galeries, restaurants tous plus fastueux et branchés les uns que les autres, s’installent dans des immeubles de bureaux restés longtemps semi-vacants et dans de nouveaux buildings rutilants.

Les anciens théâtres et cinémas Art Deco de Broadway, réhabilités, retrouvent leur splendeur passée, faisant de « DTLA » le quartier le plus couru de la deuxième ville américaine et détrônant Beverly Hills ou West Hollywood. « Quand j’ai grandi, Downtown était comme une ville fantôme, décrépie, un endroit où on ne s’arrêtait pas », se souvient Brigham Yen, 35 ans, agent immobilier qui chronique cette renaissance dans son blog, Downtown LA Rising. « Ces dix dernières années et particulièrement depuis 2013, il y a eu un virage, c’est comme si se créait ici une ville dans la ville ».

Downtown Los Angeles, de la décrépitude au luxe
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Carol Schatz, directrice de l’Association du centre-ville, native de Los Angeles, situe le début de ce renouveau à 1999, quand les autorités locales ont assoupli la législation pour convertir des bâtiments commerciaux en logements.

Les investisseurs ont d’abord traîné des pieds. Le théâtre philharmonique flamboyant conçu par l’architecte vedette Frank Gehry et l’hôtel « hip » Standard Downtown ont insufflé une étincelle au début des années 2000, mais la crise financière de 2008 a ensuite frappé.

Alignement des étoiles

Ces dernières années, les étoiles se sont finalement alignées. L’installation en 2014 du chic Ace Hôtel dans un ex-bâtiment gothique du studio United Artists, puis l’ouverture du musée Broad ont consacré le quartier comme destination en vogue.

« Au moment où nous avons démarré l’effort de (revitalisation), il y avait 18.000 résidents downtown », remarque Carol Schatz. « Maintenant il y en a environ 69.000 ».

Downtown Los Angeles, de la décrépitude au luxe
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D’après elle, depuis 2000, 30 milliards de dollars ont été injectés dans le quartier, une dynamique qui lui semble « impossible à arrêter ». Des projets immobiliers pharaoniques sont en train de pousser sur d’anciens parkings, métamorphosant le paysage de la ville.

Plusieurs gros investisseurs chinois sont impliqués dans certains projets phare, y compris Metropolis, complexe comprenant un hôtel et trois gratte-ciels, qui doit ouvrir l’an prochain.

Comme dans tous les cas de « gentrification » extrême, cette effervescence s’est accompagnée d’une brutale inflation immobilière. « Le loyer d’un studio dans certains immeubles vaut maintenant au moins 2.300 dollars par mois alors qu’en 2013 ça tournait autour de 1.700 », souligne M. Yen.

La zone, surnommée « Art District », est sans aucun doute celle où le boom est le plus impressionnant à l’heure actuelle.

La boutique de luxe Guerilla Atelier dans l'Art district de Ddowntown Los Angeles
La boutique de luxe Guerilla Atelier dans l’Art district de Ddowntown Los Angeles© AFP

Evolution luxueuse

De mois en mois, les entrepôts cèdent la place aux boutiques, cafés et glaciers hors de prix ou galeries flamboyantes.

La très snob Soho House devrait s’y installer et Warner Music Group prévoit d’y déménager de la banlieue de Burbank pour ouvrir de nouveaux bureaux dans une ancienne usine Ford.

« Je suis là depuis trois ans et ces douze derniers mois le changement a été drastique », observe Victor Go, gérant de la boutique de décoration et accessoires Poketo. « Les projets et les entreprises qui arrivent sont de plus en plus gros ».

Si cette mutation est bonne pour les affaires, elle a aussi mis fin à l’ère des entrepôts et logements aux loyers dérisoires qui avaient initialement attiré beaucoup d’artistes. « Le changement est super pour les privilégiés (…), moins pour ceux qui habitaient là avant », remarque Victor Go.

Le Challenge Cream and Butter Building, batiment commercial des années 20 dans Art District
Le Challenge Cream and Butter Building, batiment commercial des années 20 dans Art District © AFP

L’évolution luxueuse du quartier rend aussi plus visible Skid Row, un périmètre de cinquante pâtés de maison longtemps loin des regards, où vit la plus forte concentration de SDF du pays, en plein milieu de Downtown.

Brigham Yen reconnaît que le contraste entre l’opulence des nouveaux bars du quartier et l’extrême pauvreté des milliers de sans-abris à Skid Row est choquante, mais que la responsabilité en revient aux autorités municipales qui pendant des décennies n’ont pas su régler le problème. « Avant que les gens s’installent Downtown, personne ne s’intéressait aux SDF », dénonce-t-il.

D’après Carol Shatz, certains investisseurs ont été rebutés par le problème des sans-abris, mais la vaste majorité reconnaît les efforts de la municipalité pour faire bâtir de nouveaux centres d’hébergements et logements à loyers abordables. Pour elle, le succès « extraordinaire » de la revitalisation de Downtown est source de « fierté » pour les « angelenos »: « Notre ville a finalement un centre florissant ».

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