Inde: Bombay redécouvre son patrimoine Art déco

This photo taken on November 8, 2017 shows vehicles passing by an Art Deco building on Marine Drive in Mumbai. The seafront is lined with brightly coloured buildings boasting curved corners, stylish balconies and exotic motifs but this isn't Miami's famous Art Deco district -- it's Mumbai. Bombay, as the Indian city was formerly called, is known more for its Victorian Gothic edifices than the sleeker architectural designs that swept Europe and America during the 1920s and '30s. / AFP PHOTO / PUNIT PARANJPE / To go with 'INDIA-ARCHITECTURE-HERITAGE-ARTDECO, FEATURE' by Peter HUTCHISON © AFP

Quand on évoque la capitale économique indienne, on pense d’abord à ses édifices gothiques légués par la Grande-Bretagne victorienne. Pourtant, son patrimoine recèle aussi des centaines de monuments Art déco, cette tendance architecturale qui a fait fureur aux États-Unis et en Europe dans les années 1920-1930.

Des passionnés réunis au sein du projet Art Deco Mumbai veulent désormais valoriser cet héritage. Ils se sont lancés dans un recensement de ces bâtiments afin de sensibiliser la population à cette richesse et assurer sa préservation.

« Bombay a l’une des plus grandes collections de bâtiments Art déco au monde. C’est un héritage incroyable », explique à l’AFP Atul Kumar, à l’origine du collectif.

Sur la promenade de Marine Drive, les palmiers se balancent doucement. À un coin de rue est planté le Soona Mahal, immeuble jaune décoré de lignes oranges et surmonté d’une tourelle. « C’est un bâtiment iconique qui ressemble à un navire se frayant un chemin dans les vagues », décrit avec fierté Mehernosh Sidhwa, 70 ans. Ce lieu a été construit par son grand-père et sa famille l’habite depuis trois générations.

Un peu plus loin, autour du grand parc Oval Maidan, des édifices de cinq étages portent cette si reconnaissable patte Art déco: frontons, escaliers en spirale, sols de marbre… Quelques minutes de marche encore et on arrive aux célèbres cinémas Eros et Regal.

Message politique

Ces quartiers forment le coeur du Bombay Art déco, que ses défenseurs rêvent de voir inscrit par l’Unesco au patrimoine mondial de l’humanité.

« Il y a une fusion intéressante d’Art déco européen classique et sa version Bombay », s’enthousiasme Atul Kumar. « Vous avez des ziggourats (édifice religieux mésopotamien à terrasses, ndlr), des balcons arrondis en forme de locomotive, des images tropicales, du mouvement, des lignes de fuite et des motifs égyptiens aussi bien que des motifs indiens. »

Ces édifices ont été construits entre le début des années 1930 et le début des années 1950, crépuscule de la période coloniale britannique, par de riches Indiens. Ces derniers ont envoyé leurs architectes en Europe pour étudier le style Art déco et en revenir avec des idées modernes permettant de se différencier des canons des bâtiments coloniaux.

S’ils pâtissent de l’ombre des imposantes constructions britanniques, comme la grande gare, la Haute Cour et le principal musée de la ville, les édifices Art Deco à Bombay possèdent « un style coloré, vibrant, libre, sophistiqué qui traduisait les aspirations d’une nouvelle classe », dit M. Kumar.

Les ériger à l’époque où « l’Inde était dirigée par un régime colonial oppressif » fut « une manière unique d’envoyer un message à travers l’architecture », estime-t-il.

Les volontaires d’Art Deco Mumbai ont déjà recensé 136 bâtiments et estiment que la ville en compterait au total entre 200 et 300. Ils publient cet inventaire sur leur site internet www.artdecomumbai.com et en diffusent les photos sur Twitter et Instagram.

Pourtant, la spéculation immobilière dans la mégapole, qui a les loyers les plus chers d’Inde, menace ce patrimoine.

Au cours des ans, des bâtiments Art déco ont été détruits ou altérés. Les développeurs immobiliers sont en mesure d’offrir des sommes alléchantes pour les remplacer par de luxueuses tours d’habitation. « Notre objectif ultime est de conserver cette superbe collection. Plus nous parlons aux gens, plus ils en deviennent farouchement fiers et cela se manifeste dans un désir de la préserver », conclut le passionné Atul Kumar.

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