Les Seychelles, paradis pour tous

© PHILIPPE CAMILLARA

Longtemps réservé à quelques (très) riches happy few, l’archipel est devenu accessible à tout un chacun. Grâce au développement d’une infrastructure touristique nettement plus abordable, jusque chez l’habitant dont l’hospitalité est inscrite dans les gênes. Grâce aussi à une politique tournée vers l’écotourisme, dont le pays fait désormais office de modèle… planétaire.

Certains évoquent le paradis sur Terre et franchement, ils ont des arguments solides. En fait d’Eden, c’est un jardin tropical planté sur un caillou en plein océan Indien. Ou plutôt un ensemble de cailloux, roches granitiques et coralliennes aux formes très caractéristiques, sculptées par le sable, le vent et les vagues pendant des millénaires.

Les Seychelles, paradis pour tous
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Avec ses 27 km de long sur 7 de large, Mahé est la plus grande des 116 îles qui composent l’archipel des Seychelles, micro-Etat indépendant émergé à 1 500 km à l’est des côtes du Kenya. C’est aussi la plus haute, avec son Morne Seychellois qui culmine à 906 mètres et déroule de somptueux sentiers de randonnée, sur des pentes étoffées par une végétation unique, tant les espèces endémiques foisonnent ici. Ça, c’est pour l’intérieur des terres, et on ne se lasse pas d’en arpenter les chemins – à pied, à vélo ou en voiture.

Les Seychelles, paradis pour tous
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Puis il y a la mer. Emeraude ou turquoise de loin, translucide de près, elle flirte toute l’année avec les 30 °C et abrite toute la richesse animale et végétale qu’offre encore le seul océan chaud de la planète. A portée de palmes, masque et tuba. Si les plongeurs se régalent à la traque du gros gibier marin des profondeurs, nul besoin de bouteilles pour s’en mettre plein la vitre. La moindre trempette vous plonge dans l’intimité des poissons-clowns, papillons ou perroquets, des poissons anges, coffres et ballons, des chirurgiens et des mérous, des balistes et des rascasses, des congres et des murènes. Sans oublier les raies et les tortues, si peu farouches ici qu’elles se laissent caresser. Certaines périodes de l’année vous autorisent même à couler quelques brasses avec les requins-baleines, qui viennent refaire le plein de plancton à proximité des côtes, dans les lagons de Mahé. Là où la végétation marine est aussi luxuriante, si l’on peut écrire, que sa cousine terrestre. Pour une raison simple : les Seychelles sont l’un des pays les plus avancés au monde en matière de protection de la nature et de l’environnement. Un paradis, ça se préserve ou ça peut vite devenir l’enfer ! Ici, ils l’ont compris.

ÉCOTOURISME PIONNIER

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En nous véhiculant sur les chemins escarpés de la montagne surplombant Victoria, la petite capitale de cette république d’à peine 90 000 habitants, Hugues est intarissable sur les vertus de « sa » forêt tropicale. Ce Seychellois métissé pur jus, aux lointaines racines chinoises, y a construit sa maison de ses mains, comme celles de ses voisins, tous membres de la famille. « A l’époque, c’était encore possible, explique-t-il. Aujourd’hui, toute la zone est interdite à la construction dans un but de préservation. C’est vrai d’une grande partie de l’île, et c’est pareil dans tout l’archipel. On ne s’en plaint pas. »

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Dès l’indépendance en 1976, le gouvernement seychellois a officiellement inscrit la protection de l’environnement au rang de ses priorités. Le putsch qui a suivi et, avec lui, le règne du parti unique, d’un socialisme de façade, d’une presse bâillonnée et d’une corruption débridée n’ont heureusement pas (trop) freiné cette politique pionnière. Avec deux parcs nationaux terrestres, sept parcs marins et un paquet de réserves et sanctuaires, dont plusieurs îlots tout entiers, près de 50 % du territoire national sont aujourd’hui protégés. Un record. « On ne peut même plus chasser ce qu’on veut, ajoute Hugues. Heureusement pour les roussettes ! » Cette chauve-souris géante – parfois surnommée Batman – qui envahit le ciel au crépuscule est une espèce endémique réputée pour sa chair tendre et savoureuse. Elle fut longtemps menacée d’extinction.

Hugues et son épouse Jeanine, elle aussi seychelloise mais d’ascendance française, version bagnarde (au XVIIIe siècle), ont aménagé avec goût trois délicates chambres d’hôtes. A flanc de montagne, vue imprenable sur la ville, la baie, et au large, les îles de La Digue et Praslin, que l’on visitera plus tard. On croit les Seychelles réservées aux milliardaires, où les villas de stars coudoient des hôtels aussi luxueux qu’inaccessibles. Ce fut vrai, longtemps. Ça ne l’est plus. Le tourisme s’y est largement démocratisé ces dernières années, sous l’effet conjugué de la concurrence aérienne qui pèse sur les tarifs et du développement volontaire d’une hôtellerie très abordable.

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Petits hôtels de charme et familiaux, chambres chez l’habitant, maisons et appartements meublés en location (ou « self-catering ») côtoient désormais les resorts 5-étoiles, auxquels ils n’ont rien à envier côté authenticité. Même pas leurs plages idylliques ! Si les grands hôtels ont pris soin d’annexer les plus belles, elles sont toujours accessibles au public, comme l’impose la loi. Voilà comment on se retrouve à croiser l’une des femmes fatales du cinéma français sur la plage d’Anse Georgette à Praslin, classée parmi les plus spectaculaires du monde, après avoir traversé l’incroyable terrain de golf du Constance Lémuria – les connaisseurs apprécieront ! Les habitants du coin en profitent aussi, le sable est à tout le monde. Pour autant, on est loin de se marcher dessus. Aux heures d’affluence, ces plages de rêve sont aussi bondées que celles du Zoute en hiver, par temps de pluie. Sauf qu’il y fait toujours beau.

PÊCHE AU GROS

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Côté pile, tout tient ici de la carte postale. Côté face, il y a une vie aux Seychelles et elle ne demande qu’à être approchée. Les Seychellois ne sont pas parqués dans des îles ou des villages ghettos, comme c’est notamment le cas aux Maldives, pas très loin de là. Beaucoup s’en tirent relativement bien. On rencontre peu de pauvreté extrême et l’urbanisme fait la part belle aux jolies maisons colorées de toutes tailles, souvent cernées d’un jardin soigneusement dessiné. D’où émergent de gros rochers de granit burinés par le temps. Chez Jeanine et Hugues, il y en a un énorme au coeur de la maison…

Les Seychelles, paradis pour tous
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Deux ombres au tableau, quand même. Un système de santé défaillant, qui conduit les plus riches habitants à se faire soigner à La Réunion, Maurice, voire en Afrique du Sud. Et un système politique qui reste peu démocratique, malgré le retour à un multipartisme de façade. Toute velléité de contestation est réprimée et la corruption reste un fléau. Ce qui n’empêche pas la population d’afficher une bonne humeur contagieuse. Toutes les occasions sont bonnes pour faire la fête et il n’est pas rare de tomber, au hasard d’une promenade, sur une manifestation folklorique ou une assemblée villageoise vibrant au son de la musique créole. Sous le fumet de poissons et crustacés qui grillent au barbecue.

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Le poisson est roi et, si vous disposez d’une kitchenette, n’hésitez pas à en acheter sur le bord de la route, aux pêcheurs qui exposent ici et là l’impressionnant produit de leur pêche du matin. Fraîcheur garantie. Et puisqu’aux Seychelles, l’une des activités phares consiste à rallier les petites îles désertes pour en explorer la flore sauvage et la faune aquatique, demandez-leur de vous y conduire pour un prix abordable au lieu de rejoindre une excursion de groupe, histoire d’éviter le bain de foule (pour certaines, la présence d’un guide naturaliste est cependant obligatoire). Sous la mer comme sur terre, la faune se laisse facilement approcher. Les amateurs d’oiseaux rares seront servis par une profusion d’espèces endémiques. Autre rencontre incontournable : les tortues géantes vivent en totale liberté sur certaines îles facilement accessibles. Préhistorique !

JARDIN EXTRAORDINAIRE

La plupart des îles sont désertes et protégées, certaines, les plus éloignées, accessibles seulement en bateau de croisière (Amirantes et îles extérieures). D’autres hébergent des hôtels de luxe ou, comme Bird à l’extrême nord, des écolodges dédiés à l’observation de la nature et des oiseaux. Mais Mahé n’est pas la seule où se concentrent les populations. Il y a aussi Praslin et sa voisine, La Digue. On s’y rend en bateau au départ de Victoria, plusieurs fois par jour. Plus petites et nettement moins peuplées, elles valent largement le détour. Fût-ce pour la beauté de leurs criques et lagons.

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Praslin cache un autre trésor : la Vallée de Mai, une forêt unique au monde inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. Ce jardin extraordinaire abrite de nombreuses espèces d’arbres et de palmiers exceptionnels dont les derniers spécimens du cocotier de mer, connu pour la forme particulièrement suggestive de son fruit, le coco-fesse. Les marins qui le voyaient flotter sur la route des Indes en ignorant sa provenance lui prêtaient des vertus magiques et aphrodisiaques. C’est aujourd’hui l’emblème des Seychelles, et il jouit d’une protection rapprochée. Pas question de le cueillir ni de l’exporter.

La Digue, elle, se visite à vélo ou à pied, les moteurs y sont en principe interdits. Elle concentre sur quelques kilomètres carrés quasi tous les charmes des Seychelles. Plages mythiques, granit rose, végétation luxuriante, cases et maisonnettes en bois et de paille, sentiers de randonnée… Une journée suffit pour en faire le tour. Dommage qu’on n’y soit pas tout seul. Pour plus de tranquillité et une communion profonde avec une nature vierge, il faut rejoindre Silhouette, la quatrième plus grande île dont la… silhouette caractéristique se détache à l’horizon de Mahé. Montagneuse, abrupte, sauvage, couverte de jungle, cernée de falaises et de plages de sable fin désertes, elle offre les plus belles randonnées dont on puisse rêver dans l’archipel. Au coeur d’un jardin botanique fabuleux. Ou d’une autre facette du jardin d’Eden.

PAR PHILIPPE CAMILLARA

En pratique

SE RENSEIGNER

Pas de visa nécessaire pour les ressortissants de l’UE. Infos sur le pays : www.seychelles.travel

Ambassade : 28, boulevard Saint-Michel, à 1040 Bruxelles. Tél. : 02 733 60 55.

Y ALLER

La compagnie nationale Air Seychelles travaille en partenariat avec Etihad. Vols quotidiens Etihad et Emirates depuis Bruxelles, via Abu Dhabi ou Dubai. Entre 600 et 1 000 euros selon la saison.

CLIMAT

Tropical. Températures clémentes toute l’année, avec une moyenne annuelle de 29 °C et un ensoleillement de 7 heures par jour. Soleil plus présent d’avril à novembre. Saison sèche de mai à septembre. Averses plus conséquentes en décembre et janvier. Humidité ambiante assez élevée toute l’année. Pas de cyclones.

SUR PLACE

Mahé est bien desservie par le bus, mais l’attente est parfois longue. Mieux vaut louer une voiture pour circuler sur Mahé et Praslin. A vélo, les côtes sont très abruptes. Pour aller d’île en île, il existe un service quotidien de navettes par bateau entre Mahé, Praslin et La Digue.

SE LOGER

A Mahé

Le Sans Souci Guesthouse. Charmante maison d’hôte noyée dans la forêt, sur un balcon naturel surplombant Victoria. Piscine et terrasse panoramique, location de voiture et patronne aux fourneaux pour une savoureuse cuisine locale. www.lesansouci.com

A Praslin

Les Lauriers. Eco-hôtel de charme sur la plage fréquentée d’Anse Volbert. www.laurier-seychelles.com

Le Coin d’Or. Petite maison en self-catering au bord de la superbe Anse Possession, une adresse secrète pour les amoureux. E-mail : coindor@rocketmail.com

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