Les créateurs, les éditeurs mais aussi les produits et concepts qui font le buzz. Compil express de tout ce et ceux qu’il faut connaître pour parler néo-design en 2011.

1. JOSÉ LÉVY.

Les passerelles mode-design sont nombreuses mais rares sont les stylistes qui réussissent à proposer des créations originales dans le secteur de la maison. Connu pour sa marque José Lévy à Paris, l’ancien directeur artistique d’Emanuel Ungaro a parfaitement réussi sa reconversion dans le design et l’aménagement d’intérieur. La pharmacie qu’il a relookée à Bastille a été élue  » meilleure pharmacie du monde  » par le magazine Monocle. Après une ligne de meubles très haussmanniens créés pour Roche Bobois, il vient de présenter à la Gallery S. Bensimon une collection de tables basses. Et signe pour les Cristalleries Saint-Louis des objets mixtes, baptisés Les Endiablés (photo), entre vase, verre et photophore.

2. LESS IS MORE.

Le mantra de Mies van der Rohe n’a pas pris une ride, surtout quand on l’applique à la nouvelle version de la chaise Superleggera 699 de Gio Ponti pour Cassina. L’assise traditionnellement disponible en cannage des Indes est désormais proposée en cuir ou en tissu de différentes couleurs. Avec pour conséquence immédiate une diminution du prix de ce classique de près de 30 %. De quoi saper le moral des faussaires.

3. LE TAPIS LOSANGES.

Incontestablement l’un des hits absolus de l’édition de janvier dernier de Maison & Objet. Et pas seulement parce que les frères Bouroullec, designers du dessin original de ce kilim reproduit par des artisans du nord du Pakistan, ont décroché le titre de créateurs de l’année 2011 de la section  » now ! design à vivre  » du salon parisien. Magnifiquement contemporain, le tapis confectionné pour la marque espagnole Nanimarquina à partir d’une laine afghane tissée et colorée à la main, a l’air d’avoir vécu quand on l’approche. Il est tout à la fois d’hier et d’aujourd’hui. Il met le meilleur du design moderne au service d’un savoir-faire ancestral à préserver à tout prix.

4. BERTJAN POT.

Ce passionné de textile est le nouveau Hollandais volant la vedette à Marcel Wanders, Jurgen Bey et Maarten Baas. Édité d’abord par des entreprises néerlandaises (Moooi, Montis…), il est devenu le chouchou des labels pointus toujours en quête de talents surprenants. Sa chaise Jumper (photo) en lainage présentée l’an dernier par Established & Sons préfigurait le boom du tricot dans la maison. Remarquées aussi, lors du dernier Salon du meuble de Milan, la suspension Fold Up pour Moustache et la liseuse Pion pour Skitsch.

5. LA VAISSELLE SELON LES CAMPANA.

Ces assiettes-là, créées pour Bernardaud, ont de quoi bousculer la table du dimanche. Si à première vue, on ne croit voir que des taches de couleurs et des formes abstraites, des amas de jouets en peluches, des lattes en bois et des entrelacs de matières végétales et organiques tellement caractéristiques du travail des frères Campana finissent par se détacher de ce trompe-l’£il kaléidoscopique.  » En général, nous travaillons en volume, mais ici, nous avons dû mettre à plat ces motifs à l’aide de collages, découpages, assemblages « , détaillent les deux Brésiliens. La composition symétrique est bousculée par l’imagerie convoquée. Le nouveau et l’ancien monde se rejoignent : cela donne Euro Tropiques !

6. HOMEBOY BAGS.

 » Le  » cabas que toute designista se devra de porter à l’épaule au tout prochain Salon du meuble de Milan (du 12 au 17 avril). Les slogans qui s’affichent sur ces sacs sont le fait d’anciens membres de gangs de Los Angeles aujourd’hui réinsérés par le programme Homeboy Industries fondé par un prêtre jésuite, le père Greg Boyle. Ce sont eux aussi qui les impriment pour la ligne Design with Conscience de la société californienne Artecnica qui reverse une partie des bénéfices de la vente de ces it bags à cette association qui soutient plus de 12 000 jeunes à risque aux États-Unis.

7. MOUSTACHE.

Il fallait un sacré culot pour lancer en pleine crise une nouvelle marque de meubles et d’accessoires design. Pour nager à contre-courant de la globalisation galopante en choisissant de travailler avec des créateurs et des fabricants proches, géographiquement autant que philosophiquement, d’ailleurs. Pointus sans être trop élitistes – en tout cas en termes de prix -, les objets qui peuplent la maison selon Moustache sont signés François Azambourg, Inga Sempé, Big Game, Bertjan Pot ou Matali Crasset. L’audace, jamais gratuite, est toujours au rendez-vous. Plutôt que de courir coûte que coûte derrière la nouveauté, Stéphane Arriubergé et Massimiliano Iorio, les deux fondateurs du label, voient leur collection un peu comme une grande famille : cohérente mais riche des personnalités bien tranchées qui la composent.

8. ENVIRONMENT.

Basé à Los Angeles, cet éditeur, qui compte parmi ses clients influents Leonardo DiCaprio et Julia Roberts entre autres, affiche ses préoccupations vertes d’entrée de jeu. Le meuble design écologiquement correct se devra demain de sourcer ses matières premières, de démontrer qu’il est fabriqué sans colles ni produits toxiques, que tout est pensé dès sa conception pour réduire l’empreinte de son packaging, de son stockage et de son transport. Pour ses débuts à Milan en avril 2010, la marque s’était adjoint les services de Jean-Marie Massaud pour lancer sa collection e’pack (photos : Egard Coffee Table et Grace Lamp). Des meubles légers, confortables et compacts conçus pour durer et limiter l’impact négatif de leur production sur la planète.

9. NACHO CARBONELL.

Incontestablement le plus arty et le plus expérimental des jeunes designers. Sa série Diversity – 20 itérations de la même forme, une chaise attachée à un bureau couvert, habillée de textures et de matériaux différents – avait fait sensation lors du dernier Salon du meuble de Milan. Pour la première fois, le créateur espagnol présente à Paris, jusqu’au 16 avril prochain, un travail incluant la lumière. La collection de lampes Luciferase (photos) éditées par la galerie BSL s’inspire d’une pierre fragmentée ramassée l’été dernier en Espagne. Des  » créatures  » en résine à l’allure raffinée et primitive, déjà emblématiques du  » style  » Carbonell. On attend avec impatience que sa démarche séduise un éditeur.

10. PHILIPPE NIGRO.

L’asymétrie, le décalage, le déséquilibre stable… autant de thèmes chers à ce designer français qui, en quelques années, a réussi à imposer son langage esthétique sur la scène internationale.  » J’aime penser le quotidien à travers des objets surprenants mais sensés « , insiste-t-il. Ses meubles atypiques, truffés de bonnes idées – comme ces  » entailles  » fonctionnelles tranchées dans les coussins d’un canapé pour y insérer de petits guéridons – font désormais de lui l’un des complices récurrents de Ligne Roset.

11. LE SET KALI.

Ce n’est pas tous les jours qu’un kit d’objets on ne peut plus triviaux en apparence – une armoire et des accessoires de salles de bains présentés par le fabricant allemand Authentics lors du salon Maison & Objet – fait buzzer la planète design. Bien sûr, ils sont signés Doshi Levien, le duo de créateurs londoniens jusqu’ici plutôt associé à des meubles audacieux et précieux signés Moroso ou Cappellini. Mais surtout, chaque petit détail a été pensé jusque dans les coins pour en améliorer l’ergonomie et la plurifonctionnalité. Que l’on soit gaucher ou droitier, homme ou femme, consommateur ou non de cosmétiques taille XXL, ça fonctionne !  » Nous avons pris énormément de plaisir à dessiner une collection grand public, confie Jonathan Levien. Des objets tout simples que les gens utiliseront quotidiennement. C’était un défi pour nous de les réinventer, de les améliorer. Un atout aussi que nous soyons un couple : nous avions chacun une vision bien particulière des fonctions que ces accessoires devaient remplir.  » Avec en toile de fond l’idée qu’ils peuvent en faire toujours plus. Comme la déesse indienne aux innombrables paires de bras, qui leur a donné son nom.

12. RÉ-CRÉATION.

La nouvelle manière de parler de recyclage, plus fun que le terme upcycling déjà daté 2010. La ligne petit H d’Hermès qui édite des produits réalisés à partir des déchets des ateliers de la maison mère donne ainsi à l’art de la récup – déjà défendu par le magasin parisien Merci et bon nombre de jeunes créateurs – ses lettres de noblesse.

13. LA FABRIKA.

La nouvelle adresse design qui fait bouger Bruxelles, c’est d’abord un showroom de plus de 230 m2 dans lequel on se sent  » comme à la maison  » – une équipe d’archis d’intérieur est là aussi pour vous offrir du conseil sur mesure – ouvert par Kelly Claessens, une mordue de design qui y propose ses coups de c£ur sélectionnés aussi bien chez des éditeurs classiques (Artek, Kvadrat…) qu’auprès de labels prometteurs. Le lieu se double également d’une galerie ouverte aux artistes. Et accueille aussi le studio du compagnon de Kelly, le designer Benoît Deneubourg, qui fait partie de la sélection 2011 de 101 % Designed in Brussels.

14. 5.5 DESIGNERS.

Baptisé  » Réanim « , leur premier projet – un ensemble d’attelles en plastique vert qui permettaient de  » soigner  » les objets abîmés – aurait pu les cataloguer à vie dans la catégorie des anars anti-conso. Pourtant l’approche non conventionnelle de ce cabinet de recherche et de consultance en design a réussi à séduire de nombreuses marques de luxe et de grande distribution. Après Skitsch et Häagen-Dazs, Nespresso vient de leur commander une collection d’accessoires (photos). Ce qui n’empêche pas le collectif de mener en parallèle ses propres projets d’édition, comme ces objets faits maison – un tabouret façon Tatin, un fondant de bougies, une patère en croûte… –  » cuisinés  » loin des chaînes de production industrielle.

15. RAW-EDGES.

En couple à la ville et complices en affaires, Yael Mer et Shay Alkalay, tous deux nés à Tel-Aviv, tous deux anciens étudiants de Ron Arad au Royal College of Art à Londres, n’ont peut-être encore que trois produits édités à ce jour. Mais la commode Stack créée en 2008 pour Established & Sons fait déjà partie des collections permanentes du MoMA. L’an dernier, leurs bancs en bois  » gonflables  » – ils prennent forme et se déforment sous la pression d’une mousse en expansion – ont séduit Giulio Cappellini. Leur duo auto-édite aussi de nombreuses pièces plus expérimentales que les galeries s’arrachent. Dernier show en date ? Une expo de sièges en feutrine et résine acrylique à la Fat Galerie, à Paris (photo en bas).

PAR ISABELLE WILLOT

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