Métro bio dodo : Le restaurant de demain sera durable et sain

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Comment mangera-t-on demain et plus encore où mangera-t-on ? Ces questions, des spécialistes de la nébuleuse agro-alimentaire les ont posées ce lundi 28 janvier à l’occasion du World Cuisine Summit, un congrès organisé du Sirha, le célèbre salon professionnel de l’alimentation et de la restauration mieux connu parce qu’il est le théâtre des fameux Bocuse d’Or.

Comme toute journée d’études, le World Cuisine Summit a voulu mettre en présence des avis contradictoires à l’image de l’extraordinaire prestation en matinée de Carlo Petrini, président et fondateur de Slow Food et en fin d’après-midi du lamentable plaidoyer pro-domo de Jean-Pierre Petit, un des vice-présidents de Mc Donald’s, qui – soit dit en passant – sert 70 millions de clients par jour répartis dans 120 pays autour de la planète. Pour rappel, Carlo Petrini avait créé le mouvement Slow Food lors de l’ouverture à Rome du premier Fast Food de l’enseigne … Mc Donald’s.

Ces deux personnages aux engagements totalement opposés illustrent deux théories. Petrini défend la thèse que notre planète produit assez pour nourrir près de 10 milliards d’habitants. A l’opposé l’industrie, agitant le développement de la demande en protéines animales en Asie entre autres considère qu’il faudra de nouvelles réponses technologiques et une intensification des agricultures traditionnelles pour nourrir la planète à l’horizon 2050.

L’ère du gaspillage Parmi les orateurs on comptait entre autres le très affable Frank Riboud, président de Danone ou le charismatique Tristram Stuart, auteur du livre Waste et organisateur des Banquets des 5.000 où les cinq milliers de convives sont nourris à partir d’ingrédients destinés à être jetés.

Le gaspillage alimentaire a ceci d’étonnant : tous les spécialistes le reconnaissent et le déplorent, identifiant notamment comme responsable la recherche absolue du produit esthétiquement parfait. L’étude a confirmé la responsabilité importante des réseaux de distribution, en l’occurrence les supermarchés.

Vers un nouveau type de restauration Mais la vraie légitimité du World Cuisine Summit – comme son intérêt majeur – réside dans une étonnante étude réalisée dans 10 pays : France, Italie, Espagne, Allemagne, Grande-Bretagne, Brésil, Chine, Japon, Turquie et Etats-Unis. Un postulat est tout d’abord posé. Le monde de demain sera de plus en plus urbain. De ce fait à l’image des USA où un repas sur deux est pris à l’extérieur, contre un sur quatre chez nous, nous devrions de plus en plus nous restaurer dehors et devenir ainsi des clients d’une activité en plein développement, le food service.

Contournant la célèbre phrase d’Hippocrate, on estime en effet qu’à court terme « On mange ce que l’on est plutôt que l’on est ce que l’on mange. » Dans le monde entier, on constate de plus en plus que la fréquentation du type de restaurant, la manière de manger, l’équilibre alimentaire, dépendent de l’âge, du niveau social et de l’éducation. Il y a de plus en plus de restaurants pour les riches et de restaurants pour les pauvres. Et de moins en moins de restaurants pour les classes moyennes.

Reste à savoir ce que nous allons manger. En la matière les aspirations s’inscrivent pour partie dans l’air du temps.

Le développement durable, le mieux-être et l’expérience sont les tendances clés dans tous les pays consultés, les consommateurs sont de plus en plus conscients et attentifs à ce qu’ils mangent et ont besoin d’être rassurés sur la naturalité et la traçabilité des produits. Ce phénomène est encore plus prégnant en Chine et au Japon, où la sécurité alimentaire est une préoccupation constante.

Parallèlement, la crainte de l’obésité et le déséquilibre nutritionnel améneront la restauration à rechercher des solutions pour proposer des menus de plus en plus sains et équilibrés, en particulier en restauration rapide et restauration quotidienne.

Quête des sens vs budget serré Cependant, au delà de la santé et de la naturalité, les consommateurs veulent de la nouveauté et de la sensorialité. Les restaurants doivent permettre de vivre une expérience globale : unique, intense et sans cesse renouvelée. Selon les régions du globe, il existe cependant des sensibilités différentes. C’est ainsi que la santé représente une valeur clé pour l’évolution de la restauration, particulièrement en Europe du Nord, en Asie et au Brésil.

L’Europe du Sud priorise davantage la sensorialité et la convivialité et particulièrement la France, qui est très en retrait sur la santé.

Quant aux Américains, ils accordent une grande importance au restaurant comme lieu de divertissement. Les restrictions budgétaires doivent être prises en considération en particulier en Europe du Sud mais la pression monte également dans les pays du Nord, aux Etats-Unis et au Japon. Dans ces pays, l’enjeu de la restauration est de proposer aux clients de pouvoir manger plus sainement à un prix qui reste abordable.

En résumé, à très court terme, le client de restaurant est averti, en quête plaisir et de santé, avec un budget de plus en plus serré… Et le restaurant doit permettre à ce client de vivre une expérience différente de celle qu’il peut créer chez lui, au surcroît pour un prix acceptable.

Jean-Pierre Gabriel depuis Lyon

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