20 ans au studio Liaigre: Frauke Meyer veut rafraichir la marque

Frauke Meyer © SDP
Antoine Moreno Journaliste

La directrice du studio Liaigre, qui édite du mobilier chic, aménage des restaurants en vue et des hôtels de référence, veut décomplexer la marque  » intemporelle  » créée il y a trente-cinq ans par le décorateur Christian Liaigre.

Elle dit qu’elle n’a pas le temps de s’ennuyer et on la croit. Pas plus tard qu’hier, Frauke Meyer était en Sardaigne où son client est venu la chercher pour un tour du propriétaire en hélicoptère. Demain, elle se rendra à Tel-Aviv pour un projet de boutique-hôtel 5-étoiles et sera bientôt à Londres où elle achève, avec son équipe de 25 collaborateurs, l’aménagement d’un restaurant gastronomique de 500 m2 sur Waterloo Place. Ce n’est pas la bande-annonce du prochain James Bond mais quelques instantanés des luxueux décors imaginés par le studio Liaigre que dirige, à Paris, Frauke Meyer.

Il y a tout juste vingt ans, elle entrait par la petite porte de ce bureau d’architecture d’intérieur connu dans les années 90 pour ses hôtels chics (Le Montalembert à Paris, The Mercer à New York) et ses résidences privées de personnalités en vue (Carole Bouquet, Calvin Klein, le galeriste milliardaire Larry Gagosian). L’agence a été créée par le décorateur Christian Liaigre, qui a revendu, en 2015, l’intégralité de ses parts à un fonds de private equity. La marque, qui s’appelle désormais Liaigre, sans le prénom de son fondateur, édite également du mobilier, possède des boutiques dans le monde entier, y compris à Bruxelles, mais ne participe à aucune foire, pas même celle, renommée, de Milan. Pas question de se mêler au tout-venant.

Il est important de rafrau0026#xEE;chir les choses.

Voilà donc presque une génération que Frauke Meyer a rejoint cette discrète maison de style tout en sobriété qui voue un culte aux lignes géométriques, au fait main et aux matières naturelles – une excellence qui a un prix, comptez 15 000 euros pour acquérir le petit bureau en chêne Nagoya d’inspiration nipponne. Adolescente, l’Allemande, originaire de la région de Brême, voulait faire médecine. Elle débarque à Paris à 20 ans pour y apprendre le français, tombe sous le charme de la capitale et n’en repart plus. Et les études médicales ? Adieu la blouse blanche. Elle suivra des cours d’anatomie mais avec un fusain dans la main plutôt qu’un scalpel.  » J’ai toujours été à l’aise avec le dessin mais je ne me prenais pas au sérieux.  »

Christian Liaigre, qui fait partie de son jury de fin d’année aux Arts décoratifs, la remarque et l’engage sans attendre. Pourquoi elle ? Elle rit en vous fixant de son regard bleu perçant. Elle n’a pas pour habitude de se mettre en avant. Elle hésite, se lance…  » On a une grande connivence professionnelle, une même sensibilité sur la manière de voir les espaces et le mobilier, l’importance des proportions justes.  » Trois mois après son arrivée chez le  » french designer « , la jeune femme, qui  » aime régler les problèmes plutôt qu’en soulever « , se voit confier la gestion d’un projet à Taipei, puis un autre aux Etats-Unis et bientôt aux quatre coins de la planète.

Il y a deux ans, le mentor quitte le groupe. Frauke Meyer reprend la main, non sans inquiétude.  » Tout à coup, tout le monde vous demande :  » Vous voulez faire quoi ? « .  » Pour répondre à la question, elle fait plus que dessiner des croquis, elle conçoit un flagship de 800 m2 rue du Faubourg Saint-Honoré, aménagé comme un hôtel particulier. Une déclaration d’intention, en trois dimensions, pour y voir plus clair. Au milieu du beige et du blanc, du bois et du bronze qui, depuis toujours, font la signature de la griffe, souvent qualifiée d’intemporelle, elle ose l’orange fluo ou le revêtement plastifié outdoor pour un canapé d’intérieur. Shocking !  » Il est important de rafraîchir les choses « , avance cette passionnée de danse contemporaine. Elle aimerait aller plus loin dans l’expérimentation.  » Même s’il ne s’agit pas d’une révolution mais d’une évolution « , tempère-t-elle. L’audace, oui, l’anarchie, non ! Dans la famille Liaigre, on sait se tenir.

Bio express

  • 1998 : Elle termine ses études aux Arts décoratifs de Paris et entre chez Christian Liaigre.
  • 2014 : Le studio aménage le yacht Vertigo.
  • 2015 : Christian Liaigre quitte le groupe.
  • 2016 : Elle est nommée directrice du studio.
  • 2017 : Nouveau showroom à Bruxelles.

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