C’est l’une des valeurs montantes de la scène londonienne. En quelques saisons, le Canadien Mark Fast a réussi à susciter le buzz et capter l’attention des plus grands. Dernier exemple en date : une collaboration avec la griffe italienne Pinko. Découverte.

Dans l’église de San Carpoforo, nichée sur la minuscule Formentini Piazzetta, en plein c£ur de Milan, Mark Fast contemple le travail accompli par l’équipe Pinko. Une quinzaine de bustes trônent au centre de l’édifice, dans une ambiance boîte de nuit. Battements de cils et de mains du créateur. Sourire d’extase. Hauts cris, tonalité soprano. La star de l’événement, barbe de trois jours et fine queue de cheval, peut s’avachir dans un canapé. Soulagé.

De son enfance paisible au Canada, dans une maison construite en bordure de forêt, jusqu’à son diplôme décroché en février 2008 à Londres, au célèbre Central Saint Martins College of Art and Design, il y avait un océan de différences, franchi au final sans trop de remous par Mark Fast. Aujourd’hui, à 29 ans à peine, il peut même se targuer de faire partie de la nouvelle scène mode londonienne. Ses explorations dans le domaine de la maille, qu’il réalise à la main sur une simple machine à tricoter, sont ainsi unanimement applaudies.

Dès ses débuts, le jeune créateur n’a pas hésité à jeter un pavé dans la mare en faisant défiler des filles rondes, ou à tout le moins des belles dont les formes se rapprochent bien plus de celles croisées en rue que des brindilles foulant habituellement les catwalks. Une question de conviction, et non de controverse ou de buzz, se défend-il. Pas question pour lui d’acquérir une notoriété à n’importe quel prix. La preuve : il a refusé d’habiller Lady Gaga, synonyme pour lui de fast-food fashion.  » Certaines tendances peuvent être in un jour, et périmées le lendemain, regrette-t-il. Or, je ressens le besoin de créer des vêtements qui perdurent, pour leur sens du style. Et qui permettent aux femmes de se sentir bien dans leur corps. « 

Si sa collection printemps-été 2011 – de maille toujours très arachnéenne – a été moins bien accueillie par la critique, Mark Fast peut toujours se consoler avec les modèles imaginés dernièrement pour Pinko (griffe italienne célèbre pour son caractère sexy) mais aussi Topshop (marque britannique à l’affût des nouvelles tendances, qui soutient les jeunes créateurs). Sans oublier le lancement de sa nouvelle ligne baptisée Faster, un condensé de robes, tops et sous-vêtements, réalisés pour la première fois dans une usine, en Italie, et non plus artisanalement… Rencontre.

Peut-on refuser une collaboration avec Pinko ?

Non ! Les attentes que la marque avait à mon sujet étaient telles que je ne pouvais pas décliner cette proposition. J’aime l’énergie et l’identité forte qui se dégagent de cette griffe. Je ne parle pas vraiment italien, mais lors de notre première rencontre, je me souviens particulièrement d’un mot : sexy. C’est vraiment le point de ralliement entre nos deux marques, entre nos deux visions. Nous aimons mettre en valeur les jambes, créer pour une femme qui a confiance en elle, qui est glamour dans l’âme, quelle que soit sa tenue.

Pour un jeune créateur comme vous, c’est aussi une formidable opportunité d’apprentissage.

C’est juste… waouh ! J’ai la chance de pouvoir étendre mes compétences artistiques, de m’adresser à un public plus large, et d’expérimenter de nouvelles idées : des chaussures, bijoux, vestes… Autant de projets qui sont difficiles à réaliser dans le cadre de mon propre label, pour lequel nous devons tout faire nous-mêmes, à la main. Or, avec une entreprise aussi importante que Pinko, vous êtes en contact avec des usines, avec une équipe bien plus grande. Les perspectives s’élargissent.

Ce n’est pas votre première collaboration. Vous avez déjà travaillé avec Christian Louboutin, Stuart Vevers (Loewe) et Bora Aksu…

Le fait d’échanger avec des artistes de cette stature est une expérience extrêmement riche. On comprend bien mieux ce que signifient travail de qualité et précision dans les coupes. Le fait d’évoluer à leurs côtés m’inspire. Nous nous comprenons, chacun donne à l’autre un petit bout de lui-même. Un designer qui débute dans le métier est par nature seul dans son atelier, face à ses esquisses. Pouvoir interagir avec des personnes ou compagnies qui suscitent mon admiration est déjà synonyme de succès. Ce rêve accompli est bien plus important pour moi qu’une éventuelle notoriété apportée par ce type de collaboration.

Votre travail est décrit comme étant une extension organique du corps. Est-ce votre préoccupation première lorsque vous créez ?

En tant que designer spécialisé dans la maille, je suis attentif aux formes féminines qui transparaissent en dessous des points de tricot. Je réfléchis à la façon dont ils peuvent mettre le corps en valeur. J’adore voir comment de nouveaux effets et structures apportent d’infinies possibilités. Ce n’est pas juste un vêtement. Il est aussi question d’un corps. Les deux interagissent et £uvrent ensemble. La matière se met à vivre dès que la silhouette se meut.

PAR CATHERINE PLEECK

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