Le trench, la parka, la marinière ou la combinaison d’ouvrier : conçues à la base pour travailler, ces pièces fonctionnelles se taillent une jolie place dans le vestiaire de ville. Avec réinterprétations à la clé.

Non, les podiums des défilés ne sont pas réservés à la dentelle, à la soie, aux robes du soir et aux autres tenues d’exception. On y voit également parader des pièces aussi basiques et fonctionnelles qu’un pantalon en denim brut, une veste imperméable ou une chemise militaire. Cet été, c’est le trench qui a la cote. Il se pare de plumes d’autruche chez Prada, se porte asymétrique chez Michael Kors, court et totalement déconstruit chez le maître du genre, Burberry. La parka n’est pas en reste, avec un joli travail créatif, notamment chez Stella McCartney, Marc Jacobs et Isabel Marant. Et si la marinière ne se démode toujours pas, la combinaison d’ouvrier, qui s’est imposée sur le devant de la scène il y a quelques saisons déjà, sort son épingle du jeu chez Vanessa Seward ou Sonia Rykiel.

 » Ces vêtements fonctionnels plaisent particulièrement, confirme l’historien de la mode Xavier Chaumette. La mode est un phénomène cyclique. Après une période un peu baroque et excentrique, on aime revenir à des valeurs refuges. Ce sont des pièces qui rassurent, elles sont assez pudiques, loin du répertoire sexy. Elles permettent d’éviter toute erreur éventuelle de style et s’adaptent facilement à n’importe quelle personnalité. Pour les créateurs, pas besoin d’inventer quelque chose de neuf ; il suffit de réinterpréter ces classiques.  » Ceux-ci s’amusent donc à combiner des matières raffinées à des formes ou détails issus de vestiaires utilitaires. Ils actualisent à peine les volumes historiques, pour les rendre désirables ou les font évoluer grâce aux découvertes et évolutions technologiques de l’époque, comme le Zip en plastique, la toile en Nylon imperméable, le bouton-pression ou, plus récemment, les matières au pouvoir thermorégulateur. Tout est possible, du moment que l’ADN de base est respecté.

Si ce workwear est autant apprécié aujourd’hui, c’est aussi parce qu’il a un riche passé.  » Son caractère un peu masculin est synonyme d’émancipation de la femme, précise l’historien français. Il est porteur de liberté et d’égalitarisme, comme le rappelle d’ailleurs la maison Dior depuis que Maria Grazia Chiuri est arrivée à la tête de sa création.  » A noter qu’il a également pu se faire politique lorsque, durant la Révolution française, le pantalon a été adopté en signe de protestation contre la culotte des aristocrates.

 » Ce dressing, conçu à la base pour les ouvriers, les militaires, les ruraux et les domestiques, sera aussi repris par la noblesse à la fin du xviiie siècle, mais pour d’autres raisons, poursuit Xavier Chaumette. Le monde a alors changé. Les chemises empesées et les corsets ne conviennent plus aux nouveaux modes de vie. Les nantis se mettent à faire du tourisme, séjournent l’été à la campagne, pratiquent un sport… Il leur faut donc trouver une façon plus confortable et pratique de s’habiller.  » Une nouvelle tendance qui inspirera plus tard des créateurs comme Chanel et Patou. Ces derniers reprendront l’aspect solide, protecteur, rationnel et sobre de ces pièces, pour les introduire dans la haute couture, donnant par là un caractère fashion, et donc un peu plus éphémère, à un vêtement initialement pensé pour durer…

Par Catherine Pleeck

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content