Cette grande maison gantoise fut jadis la propriété de la famille de Maurice Maeterlinck, prix Nobel de littérature. Une graphiste et un céramiste en ont fait leur habitation… et aussi leur lieu de travail en y aménageant des ateliers d’artistes, une salle d’exposition et, aussi, un B&B. Le tout dans un esprit ultracontemporain.

Carnet d’adresses en page 153.

On quitte les lieux en emportant une image forte : celle d’un grand cylindre jaunâtre de 2,5 m de diamètre, légèrement en lévitation au-dessus du niveau du sol et qui sert de passage entre deux pièces.  » C’est l’idée de notre architecte, Jo Taillieu. Nous sommes allés le choisir dans une firme qui fabrique des silos d’aliments pour le bétail « , explique Ingrid De Coster qui, avec son compagnon Frank Van Houtte, a conçu cette maison d’art, pertinemment baptisée  » Verzameld Werk  » (Collection de travaux).

Ingrid est graphiste et Frank céramiste. Tous deux cherchaient un immeuble assez vaste pour y abriter à la fois leurs ateliers respectifs, une salle d’exposition de leurs travaux et leur habitation. Lorsqu’ils repèrent cette double maison de la Onderstraat, à deux pas du Vrijdagmarkt, à Gand, elle est alors occupée par deux grossistes ; l’un en emballages, l’autre en textiles. Mais la séduction opère tandis que le couple, prenant connaissance des plans originaux, découvre que cette demeure remontant au xive siècle fut jadis la propriété de la famille de Maurice Maeterlinck, prix Nobel de littérature en 1911.

 » Je suis une citadine, explique Ingrid. Nous cherchions à vivre en ville, que ce soit à Bruxelles, à Anvers ou ailleurs. Et ce fut Gand. J’aurais, sans hésiter, préféré Paris, une très grande capitale. Alors faute de voyager, j’ai fait venir les gens chez nous et de deux manières.  » Elle qui déteste être cloisonnée dans une spécialité, porter une étiquette, a transformé la salle d’exposition en galerie d’art ouverte à toute une série d’artistes et d’artisans. Puis elle a imaginé de convertir une partie de l’une des deux maisons – le numéro 23 – en un Bed & Breakfast nouvelle formule. Elle a ainsi aménagé des chambres avec du mobilier et des objets présentés aussi dans la galerie. C’est ainsi, par exemple, que la vaisselle porte la signature du céramiste Piet Stockmans (qui vient, par ailleurs, de concevoir la vaisselle des desserts du restaurant le Louis XV, à Monaco, pour Alain Ducasse – lire aussi page 109). Parmi les meubles, on pointe des chaises de Jasper Morrison et de Ron Arad, un pouf de Matali Crasset, une lampe de Herman Hermsen… avant de prendre son bain dans l’univers design de Arne Jacobsen ou de Hella Jongerius.

Mais le  » c£ur  » de  » Verzameld Werk  » se trouve au numéro 21. C’est là que des pièces ont été entièrement réservées aux artistes qui se succèdent ici.  » Cela peut paraître curieux, mais nous sommes très peu intervenus sur la structure du bâtiment, souligne Ingrid De Coster. Et nous avons pris le temps d’apprendre à connaître l’espace dans lequel nous évoluons. Nous poursuivons d’ailleurs les transformations par phases, une d’entre elles devant se terminer pour la fin de cette année.  »

De telles décisions conduisent à des solutions pour le moins originales. C’est ainsi que la plus grande pièce du rez-de-chaussée, un ancien entrepôt tout en longueur, compte comme paroi une feuille plastique.  » Les ouvertures étaient béantes, hautes et régulières, nous aurions pu installer des châssis, mais cela aurait alourdi l’espace. Jo Taillieu a opté pour cette feuille plastique de 3 mm. Elle est tendue en deux épaisseurs qui sont séparées par un coussin d’air. Celui-ci est régulièrement « gonflé  » par une pompe, ce qui conforte la rigidité de l’ensemble.  » Pour Ingrid De Coster, ce matériau comporte un autre avantage encore :  » La lumière qui nous arrive de l’extérieur est différente, plus poétique que si nous avions affaire à des vitres.  » Onirique.

Texte et photos : Jean-Pierre Gabriel

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