Un zeste d’américanisme, une pincée de romantisme rétro et un soupçon de fantaisie… Voici la recette du succès de la créatrice de mode Anna Sui.

Nous avons rencontré Anna Sui quelques jours après les attentats du 11 septembre, dans une ville de New York blessée dans sa chair et dans son âme. Ces événements tragiques n’ont pas abattu la créatrice. New-Yorkaise pure souche, elle a toujours présenté ses collections à Big Apple et n’imagine pas un seul instant le faire ailleurs.  » Ma mode est américaine, explique-t-elle. C’est un pur produit de la culture pop. Je voyage énormément et suit de près le travail des créateurs japonais, anglais, français et italiens tout en y ajoutant un petit supplément d’âme américaine. J’adore découvrir de nouveaux horizons pour les interpréter à ma façon. « 

Des sources d’inspiration, Anna Sui n’en manque pas: voyages, livres, objets originaux dénichés au marché aux puces, photos découpées dans un magazine ou encore faits de société… Rien ne lui échappe. Sa collection été 2002 évoque un voyage en Suède et en Finlande qui l’a beaucoup marquée. Elle y a visité la maison du peintre Carl Larsson. Et elle s’est imprégnée de cette atmosphère picturale privilégiant les tons doux et les motifs fleuris pour l’ intégrer dans ses babydolls et ses blouses hippie transparentes.

Cet été, les petites robes fluides, le flower power et la dentelle envahissent sa mode.  » Le passé constitue une source d’inspiration inépuisable, reconnaît Anna Sui. Par exemple, j’adore les vêtements cousus main mais ils deviennent malheureusement de plus en plus rares. Les gens n’ont plus la patience de coudre leurs propres habits. L’artisanat et la nostalgie sont des thèmes récurrents dans mon travail.  » Son style? Une combinaison subtile de diverses influences: culture pop, rock ‘n roll, marchés aux puces, tendances nostalgiques et contemporaines.  » Ce sont des thèmes qui touchent les gens. Ils se reconnaissent dans mes créations et cela les rassure. »

Le succès d’Anna Sui s’inscrit dans le grand  » revival  » des années 1970.  » Nous évoluons dans un monde impitoyable. Les gens aspirent à plus de sérénité et se réfugient dans le passé, note la styliste. Cette tendance ne se traduit pas uniquement en mode, on la retrouve aussi dans les domaines de la musique et du cinéma. Aux Etats-Unis, nous avons des chaînes de télé qui ne diffusent que des vieux films et qui remportent un succès fracassant aux heures de  » prime time « . Des groupes de l’époque se reforment et ont encore plus de succès qu’auparavant. Les gens ont besoin d’être rassurés par tout ce qui leur rappelle le bon vieux temps. »

C’est vers la fin des années 1980 que les robes signées Anna Sui, inspirées par des modèles des années 1940 chinés aux puces, ont séduit les femmes élevées dans l’esprit  » sportswear  » qui ont apprécié leurs lignes fluides et féminines, les imprimés originaux et les détails raffinés comme les smocks, la dentelle et les boutons.  » Les femmes ont rapidement perçu les avantages de la robe par rapport aux autres types de vêtements. En effet, on peut s’offrir deux robes pour le prix d’un ensemble composé d’une veste, d’un chemisier et d’un pantalon. En outre, il ne faut jamais se préoccuper d’assortir les différents éléments de sa tenue. On peut porter une robe pour aller travailler et ensuite s’offrir un restaurant en tête à tête sans devoir se changer. »

L’univers riche et raffiné d’Anna Sui domine également la ligne de cosmétiques qu’elle a lancée dans la foulée de ses défilés. Les boîtiers et les produits sont en effet ornés de roses, sa fleur fétiche.  » Tous les produits se ressemblent, déplore la créatrice. Les lignes de maquillage et de soins sont standardisées à l’extrême. Résolument pratiques et fonctionnelles, elles n’accordent pas de place à la fantaisie. C’est pour cette raison que j’ai lancé une ligne à l’image de ma mode. » Les produits de maquillage bénéficient d’un design soigné, offrent un large éventail de tons  » différents  » et embaument tous la rose.  » Je veux que les femmes puissent jouer avec mes produits, qu’elles mélangent les teintes pour créer de nouvelles harmonies très personnelles. Mon approche de la beauté est très différente de ce qui existe déjà sur le marché. « 

Les parfums révèlent, eux aussi, une personnalité unique. Le premier, Anna Sui, incarne l’univers de la créatrice. Le flacon est violet, comme la décoration de ses magasins et show-rooms et s’inspire des miroirs de conte de fées. Il fait également preuve d’une grande audace olfactive. De subtils accords de roses se détachent sur un fond d’encens et de poudre.  » Tous mes parfums contiennent des éléments que j’adore, précise-t-elle. Anna Sui incarne mon monde et Sui Dreams reflète mon mode de vie qui m’engage à aller au bout de mes rêves. Lorsque l’on cherche à concrétiser un rêve, on dépasse souvent les frontières de l’entendement. J’avais à peine 4 ans lorsque j’ai décidé de devenir créatrice de mode, même si à cet âge-là je ne savais pas exactement en quoi consistait ce métier. Je ne l’ai su qu’après avoir mis le doigt dans l’engrenage de la création. C’est ce rêve d’enfance qui m’a permis d’arriver là où je suis aujourd’hui. Véritable clin d’oeil, le packaging de Sui Dreams rappelle une forme de sac, l’un des accessoires préférés d’Anna Sui.  » Mes amis se moquent toujours de moi parce que j’emporte mon sac à main partout, même à la plage. Sans mon sac, je me sens toute nue! « 

La nouvelle senteur, Sui Love ( NDLR : lancement en avril prochain) s’inspire plutôt du thème rock’n roll. Il s’agit d’un parfum joyeux, plein de fantaisie, à l’image du petit papillon qui symbolise l’univers d’Anna Sui et que l’on retrouve dans la quasi-totalité de ses produits. Les couleurs psychédéliques de son packaging rappellent, elles, le style musical cher à la créatrice.

Sofie Albrecht

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