A 36 ans, cette photographe japonaise, anversoise d’adoption, dit l’étrangeté d’être au monde au travers de Noise, série de mises en scène gracieuses et subtilement dérangeantes. Qu’elle expose actuellement à Bruxelles aux cimaises de l’Espace Contretype.

C’est d’abord un travail sur le temps. Un autre temps. Long, délié, absolu. Reflet de la démarche lente, très lente que Kumi Oguro adopte pour donner vie à ses images. Une trentaine en six ans. Le fruit d’un amoncellement de contemplations, d’observations et de perceptions du quotidien – lieux, rencontres, émotions – qu’elle retranscrit sur papier au fil des jours. Pour éclore et se concentrer dans un seul cliché. Une mise en scène dense. Maitrisée, forcément : caresses de la lumière, formidable occupation de l’espace, mystérieux.

Sa série, la seule, toujours en cours, porte le nom de Noise. Un murmure. Le reste d’un bruit qui aurait tout dévasté sur son passage, sauf le désir. Et la sensualité. Omniprésente, jusque dans le sommeil le plus profond dans lequel semblent plongées ces (ou ses) jeunes femmes.

Sensualité des matières aussi : neige fragile, terre fraîche, glaçons fondants, fines étoffes, murs pelés, parquet patiné. Donnant aux lieux un caractère, une peau. Rien d’aseptisé, chez Kumi, rien de froid. Le frisson qui vous parcourt l’échine vient d’ailleurs.

De l’étrangeté de ses chorégraphies gracieuses, où les gestes et les poses évoquent tout à la fois la danse de la mort et le ballet des rêves. Des fantasmes, également. Lesbiens, sororaux, suicidaires, maternels. Loin de toute monstration, cependant. Loin de tout cliché. Car Kumi ne raconte rien. Elle murmure. Et c’est assourdissant.

Bio.

Kumi Oguro est née en 1972 au Japon. Formée sur les bancs du Blake College et du City of Westminster College de Londres, elle poursuit ses études de photographie à l’Académie royale des beaux-arts d’Anvers entre 1999 et 2003. Entre 2003 et 2005, elle réalise un post-graduat  » Transmedia, Postgraduate Program in Arts + Media + Study  » à Sint-Lukas, Bruxelles. Enfin, en 2006-2007, elle a suivi des cours de théorie de l’image à l’Université d’Anvers. Ville où elle a élu domicile. www.kumioguro.com

Actu.

Jusqu’au 3 mai prochain, l’Espace photographique Contretype consacre à Kumi Oguro sa première exposition personnelle à Bruxelles (Hôtel Hannon, 1, avenue de la Jonction, à 1060 Bruxelles. www.contretype.org). En 2008, la maison d’édition belge Le Caillou Bleu, spécialisée en photographie, publie la série Noise dans un très bel ouvrage, préfacé par Emmanuel d’Autreppe (www.cailloubleu.com). En mai prochain, l’artiste montrera son travail à la galerie Esther Woerde-hoff, à Paris (www.ewgalerie.com)

Baudouin Galler

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