par florence hainaut

 » Oh mais on ne peut plus rien dire !  » vois-je fleurir sur les réseaux sociaux, à intervalles réguliers. Comment ça ? Faut croire que si, pourtant, sinon cette phrase n’apparaîtrait pas aussi souvent. En fait, on ne peut rien dire sans qu’il y ait des réactions enflammées, outrées, enthousiastes, débordantes. C’est même l’essence des réseaux sociaux. Mais, pour autant, est-ce que notre époque est devenue totalement intolérante ? Est-ce que dans dix ans, seules les blagues de Toto seront autorisées ? Est-ce qu’on aura légiféré sur  » tire sur mon doigt – oh j’ai pété  » pour ne pas stigmatiser les gens qui souffrent d’aérophagie ? Je n’ai pas vu assez d’époques défiler pour juger si, oui ou non, nous vivons actuellement dans un monument de pudibonderie bien-pensant. Mais j’ai plutôt l’impression qu’il était nettement plus confortable de tout affirmer dans un contexte où les gens potentiellement heurtés, ou en désaccord, pouvaient difficilement réagir. C’était beaucoup plus tranquille, évidemment, de faire des plaisanteries sur les gros, les Asiatiques, les femmes, les handicapés, les Noirs, les musulmans, les homosexuels quand chaque réaction nécessitait de tremper sa plume dans l’encre et de faire la file à la poste.

 » Oui mais on ne peut plus rire de rien.  » Si ! Mais c’est un droit, pas un devoir. Pourquoi se sentir obligé d’insulter un groupe de personnes pour (faire) rire ? C’est moins marrant si ça ne rabaisse personne ?  » Les gens n’ont plus d’humour.  » Trouvez-moi un seul roux qui a un jour considéré que les vannes sur les roux qui puent étaient rigolotes. Une seule femme battue qui trouve hilarant d’être le centre de l’attention humoristique. Un seul gros qui pouffe quand on le compare à une baleine. Un seul Asiatique qui s’esclaffe quand on lui lâche  » tchin tchan tchong « . Je ne sais pas si on ne peut plus rien dire, mais notre époque a, par la force des choses, appris qu’il fallait entendre ceux qui répondent  » Merci, mais ta blague pourrie, non merci « . Je profite d’être ici pour envoyer une bise qui claque à Pierre Kroll, drôle et adéquat sans jamais humilier. Preuve que c’est faisable. Et rentable.

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