Le business culinaire n’en finit pas de faire recette. Dernière tendance en date ? S’offrir une cuisine haut de gamme, signée par la crème des designers.

Alors que les mauvaises langues prédisaient la retombée incessante du soufflé, les foodies font de la résistance. Un coup d’oeil aux programmes de télévision ou aux rayons des librairies suffit déjà à nous rassurer quant à la santé rayonnante du secteur. Ou devrait-on dire du marché, car les bénéfices générés sont aussi juteux qu’un fruit d’été. Toujours plus raffinées, ou plus saines, ou plus respectueuses de l’environnement, les denrées alimentaires sont désormais traitées au moyen d’un matériel des plus sophistiqués, à faire pâlir d’envie les pros du métier. Et après les conseils, les produits et les ustensiles, que peut-il bien manquer au bonheur des mégastronomes suréquipés ? La cuisine de leurs rêves, évidemment. D’autant que celle-ci n’est plus considérée comme un temple exclusivement féminin à l’abri des regards, mais occupe une position centrale parmi les pièces de vie du logis. Les principales enseignes l’ont bien compris, car outre les cuisinistes tels qu’Eggo ou Ixina, bien décidés à prendre leur part du copieux gâteau à grand renfort de publicité, on notera tout de même que le géant Ikea vient de refondre entièrement son offre via son nouveau système Metod, pour mieux concurrencer les deux précités. Du côté des vénérables maisons italiennes, si certaines marques historiques préfèrent agir dans la continuité, à l’instar d’Arclinéa, qui a confié tant son identité que ses collections à l’architecte Antonio Citterio, d’autres n’hésitent plus à faire appel à des noms ultrabankables pour appâter les clients. Habituée à travailler avec des noms connus pour sa division salle de bains, le label italien Boffi a décidé de marquer son temps avec la sortie de Salinas, première cuisine intégralement pensée par la très demandée Patricia Urquiola. S’il ne fallait toutefois citer qu’un label pour illustrer cette tendance à faire appel à des créateurs bien cotés pour dessiner l’antre des nouveaux maîtres queux, ce serait sans conteste Scavolini. Car après Karim Rashid, Michael Young ou Ora-ïto, l’entreprise des Marches s’est offert les services du studio nippon Nendo (lire par ailleurs) pour mettre au point sa dernière nouveauté au total look dépouillé, Ki. Une façon inédite d’envisager cette pièce d’ordinaire si chargée, avec l’idée de la  » faire disparaître  » dans une succession de récipients blancs sur des étagères en bois.

En Belgique, il est également question de cuisines griffées, à la différence qu’il s’agit plutôt d’un revival, porté par deux des plus importantes signatures du design noir-jaune-rouge du XXe siècle : Jules Wabbes et Louis-Herman de Koninck. Imaginés dans les années 30, les mythiques modèles Cubex de De Koninck se voyaient réédités en 2013, et n’ont évidemment rien perdu ni de leur charme, ni de leur fonctionnalité. Visionnaires pour l’époque, ils constituent l’ancêtre de la cuisine équipée, dont les modules de 60 centimètres contribuèrent à la standardisation des équipements dans toute l’Europe. Dans le même ordre d’idées, One To Be redonnait vie à une réalisation confidentielle du plus éminent concepteur belge de l’après-guerre, imaginée par Wabbes pour un appartement de la rue de Livourne, à Bruxelles, en 1964. Une petite merveille de bois exotique et de laiton susceptible de trouver sa place dans plus d’un intérieur contemporain. Indémodables, ces fleurons de notre histoire ménagère nous reviennent semblables à leur version d’origine, à l’exception de l’un ou l’autre ajustement aux normes actuelles. De quoi donner aux derniers réfractaires l’envie de se mettre aux fourneaux.

MATHIEU NGUYEN

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