Barbara Witkowska Journaliste

Au sommet d’un élégant immeuble parisien, dans un bel espace balayé de tous les côtés par la lumière, Lorraine et Patrick Frey ont créé une oasis de douceur et de bien-être. Poussez la porte de cet appartement chaleureusement raffiné.

Carnet d’adresses en page 72.

Le plan de l’appartement est superbe. Un vaste hall d’entrée octogonal, à l’identité visuelle très forte, est son véritable centre d’où rayonnent les différents espaces, en offrant au regard de longues et belles perspectives. Ce qui frappe d’emblée ? Les multiples ambiances chromatiques qui se fondent dans une harmonie douce et subtile, très plaisante à l’£il.  » Lorsque les enfants sont partis, nous avons quitté notre maison avec jardin avec l’objectif de nous rapprocher de nos bureaux à Paris et d’y trouver un espace clair et facile à vivre, raconte Lorraine Frey. Cet appartement situé au dernier étage, occupant un coin et donc extrêmement lumineux, nous a plu tout de suite. On a le plaisir d’être dans le ciel.  » Une terrasse profonde et spacieuse entoure tout l’appartement. De nombreuses portes-fenêtres invitent à sortir et à déambuler parmi les buis, les rosiers et la vigne vierge. On dirait un jardin en ville, d’autant plus que dans cette rue calme de la Rive Gauche, tous les voisins ont une passion pour la nature et le regard profite de tous les balcons joliment garnis de plantes, fleurs et arbustes.

Patrick Frey dirige aujourd’hui la société de son père Pierre Frey, créée en 1935 et spécialisée dans la création, l’édition et la fabrication de tissus d’ameublement. Plus tard s’y sont ajoutées des lignes d’accessoires, de linge de maison et de mobilier. Dans le hall d’entrée de l’appartement, l’ambiance baigne dans des tonalités noires, fauves et dorées. Le tissu à rayures  » Bestseller « , drapé comme une tente, coule avec souplesse sur les murs et crée un effet très graphique avec la moquette panthère. Dans ce cadre surprenant, le classicisme est gentiment bousculé par des clins d’£il contemporains et des £uvres d’art éclectiques. Une photo de Marilyn Monroe et des sculptures de Malevitch en papier mâché apportent une touche d’humour et de glamour à cet imposant piano à queue. En face, une sculpture de Nathalie Decoster a élu domicile au-dessus d’une commode raffinée, égayée de belles marqueteries.

Dans le salon, la palette chromatique change.  » Il a été redécoré il y a deux ans, en fonction de nos envies de couleurs vertes, note Lorraine Frey. Le point de départ a été donné par ce tapis prune, orné d’entrelacs réalisés dans un camaïeu de verts. Le motif date des années 1940 et provient des archives Braquenié, prestigieuse maison de tissus d’ameublement, rachetée par la société Pierre Frey en 1991.  » Les canapés et les fauteuils sont signés Philippe Hurel et Pierre Frey. Peu d’objets, peu de bibelots. Ici, ce sont les tissus qui sont mis en exergue. Ottomans, taffetas et velours dévoilent, dans une belle harmonie, leurs aspects lisses, brillants ou mats, tandis que les tonalités jouent admirablement sur les nuances prune et vertes. Les doubles rideaux, très chics, se terminent avec un pli creux, appelé  » pli Dior « . Un footstool est placé au centre en guise de table basse. On peut aussi s’asseoir dessus, ce qui facilite les contacts et les conversations. A côté de la cheminée, la petite table est l’£uvre de René Prou, designer au début du xxe siècle et grand-père de Patrick Frey. Pas très grand, mais de proportions justes et belles, le salon respire la convivialité et l’accueil chaleureux.

Juste à côté du salon : le bureau du maître de maison.  » Initialement nous souhaitions aménager un double salon, intervient Lorraine Frey. Finalement, Patrick a préféré y installer son bureau . » Le centre est laissé vide pour mettre davantage en valeur ce tapis spectaculaire de couleur rouille, parcouru par des motifs géométriques gris et jaune, dont le dessin original provient également des archives Braquenié. L’autre point fort est ce bureau, dessiné par André Arbus dans les années 1940. On admire le magnifique travail géométrique, réalisé avec du sycomore verni, du bronze noir et de l’ébène. La lampe et la petite étagère sont signées René Prou.

La suite de la visite nous introduit dans une pièce spectaculaire qui associe à la fois la salle à manger et la bibliothèque. Une impressionnante collection de beaux livres est soigneusement protégée par des portes vitrées. On aime l’idée astucieuse de deux tables carrées qui permettent d’organiser les dîners modulables. La juxtaposition de tissus extrêmement différents crée, une fois de plus, une atmosphère singulière. Les murs sont tendus avec un tissu créé par Braquenié en 1818, représentant les grands monuments parisiens. Aux fenêtres on retrouve la même rayure  » Bestseller  » que dans l’entrée, doublée au revers d’une toile de Jouy. Cette dernière cohabite à merveille avec un élément contemporain. Dans cette ambiance cossue et classique, le lustre  » Zettel’z  » d’Ingo Maurer, plus décoratif que fonctionnel, est le seul élément design qui s’y intègre d’ailleurs parfaitement.  » Il y a des éclairages indirects partout et tous les repas se font aux chandelles, souffle Lorraine Frey. Quand les amis viennent dîner, ils écrivent des petits mots et on les accroche au lustre. C’est notre livre d’or.  » La chambre, comme il se doit, est un havre de paix et de sérénité. On évolue dans une ambiance bleu gris, reflétée par ce tissu de Braquenié qui offre un grand confort visuel. Le lit s’appuie sur une bibliothèque, remplie, aussi, de petits objets, de photos et de souvenirs,  » le fouillis qui fait la vie « . Quand on est au lit, on est face à un tableau superbe. D’exubérants rosiers s’épanouissent sur le fond du ciel. Le brouhaha parisien est loin, on a l’impression d’être en pleine campagne.

Barbara Witkowska

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