Par-delà leurs vertus thérapeutiques, les huiles essentielles ont leur place dans nos assiettes. C’est ce que défend la Parisienne Michèle Gay lors de ses ateliers d’initiation à la parfumerie culinaire. Où l’on apprend à créer des exhausteurs de goût. Testé pour vous.

Paris, VIIe arrondissement, au pied de la tour Eiffel. Le Paname qui sent bon le repas bourgeois et les week-ends à Deauville. J’ai rendez-vous dans une parfumerie pour suivre un cours deà cuisine. Si, si. Un atelier, précisément, baptisé  » parfums et saveurs  » par sa conceptrice, Michèle Gay ( lire son interview ci-contre). Fissa, le ton est donné :  » Que voulez-vous boire ? Un jus d’orange géranium, une infusion lavande vanille ou un jus de pomme encens ?  » Va pour le jus de pomme encens, bien meilleur que notre a priori. L’apéro est l’occasion de dresser son propre portrait chinois. Le but est de définir mon  » profil sensoriel  » ( sic.) pour qu’à l’issue de cette petite formation de trois heures, à 195 euros tout de même, je reparte avec un parfum culinaire qui me corresponde et m’inspire des plats audacieux.

Je suis heureux d’apprendre que si j’étais un arbre, je serais un chêne, une couleur, le gris fumé et un acteur Guillaume Canet, ce qui fait de moi, selon la terminologie mise en place par Michèle Gay, un être olfactivement rebelle. Entendre : un être  » élégant  » (merci), qui  » apprécie la cuisine et les parfums de caractère  » (pas faux), et  » la cuisine moléculaire parce qu’elle suscite passion et controverse  » (n’importe quoi). Attention, ni écoles, ni chapelles,  » cette nomenclature nouvelle est une classification émotionnelle plus que technique, assène notre coach. A des degrés divers on est partagé entre les caractéristiques des cinq profils « . Ouf. C’est-à-dire qu’on a tous en nous quelque chose d’intemporel, de sensuel, de maternel, de naturel. Et de rebelle, donc. Chaque caractère correspondant à un cheptel d’arômes, reste à savoir quel est l’assemblage idéal pour encanailler votre pot-au-feu ou électriser votre crème brûlée. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : créer un exhausteur de plat à partir d’huiles essentielles comestibles.

Concrètement, il est nécessaire de stabiliser ces dernières sur une matière première, du sucre pour le coup,  » qui viendra en sus arrondir vos plats « , abonde Michèle Gay. A raison de 300 grammes pour 10 gouttes d’huiles, je compose mon parfum culinaire en me basant sur les caractéristiques de chaque arôme, et en me rapportant aux cinq familles. Je rêve d’Orient ce soir, de chaleur : ce sera donc 3 gouttes de Yuzu pour le côté citronné, 2 de Jasmin pour l’élégance, 3 de Vetiver pour combler ma rebelle attitude et 1 de Cumin pour faire vibrer ma sensualité (humà). Je mélange mon elixir avec des gants en plastique, je passe le tout au chinois, et abracadra, j’ai créé un parfum de table pas trop mal équilibré pour un premier essai.

Une potion magique pour épater mes convives sans acheter une seule épice ? Vraiment ? Coup de bluff efficace ou snobisme un brin gadget ? Si la poésie du temps passé aux fourneaux en prend certainement pour son grade, je dois bien avouer que les deux cuillères à café de mon jus perso ajoutées secrètement à ma mixture (un tajine de poulet aux carottes) ont fait un effet b£uf. Reste maintenant à savoir comment ne pas transformer ma cuisine en laboratoire de parfait petit chimiste. On risquerait vraiment de croire que j’aime la cuisine moléculaire  » parce qu’elle suscite passion et controverse « .

Carnet d’adresses en page 87.

Par Baudouin Galler

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