Barbara Witkowska Journaliste

Mystérieux et énergisant, serti dans un flacon talisman, Alien est le premier parfum du IIIe millénaire signé Thierry Mugler.

En matière de parfums, Thierry Mugler ne fait jamais rien comme tout le monde. Pas de lancements multiples qui se suivent et se ressemblent, pas de fragrances composées à la va-vite. Angel, le premier jus du couturier, est sorti en 1992 et a révolutionné le monde de la parfumerie. Un nom soyeux, percutant et international, un ange protecteur qui nous tend une étoile et, enfin, cette fragrance,  » praline-bonbon-caramel « . Enveloppante et appétissante, à nulle autre pareille, souvent imitée mais jamais égalée, elle a lancé une nouvelle famille olfactive, celle des parfums gourmands. Son succès ne s’est jamais démenti et aujourd’hui encore Angel caracole au sommet des hit-parades et occupe, dans de nombreux pays, la très enviable place numéro un.

Treize ans ont passé et Thierry Mugler a été titillé par la création. Le défi n’avait rien de simple. Comment égaler, voire dépasser le concept fort et exceptionnel d’Angel ? En appliquant la même recette : un nom choc, un écrin symbolique et une fragrance originale.  » Un nom commençant par « A » et composé de cinq lettres, nous a porté chance, explique Vera Strübi, PDG de Thierry Mugler Parfums. Alors, je me suis souvenue de cette belle chanson que Sting chantait dans les années 1990 :  » I am an Alien in New York « . Il y a eu, aussi, en 1979, ce film de science-fiction, mélangeant l’horreur et l’anticipation, un thriller dans l’espace où Alien fait peur. Pour moi, toutefois, Alien n’avait jamais eu une connotation négative, il symbolisait une personne venue d’ailleurs. J’en ai parlé à Thierry Mugler. Il a adoré ce nom et nous l’avons racheté à la Century Fox.  »

Alien recèle une belle histoire qui commence avec l’arrivée d’une femme étrangère, mais pas extraterrestre, dotée de pouvoirs transmis de génération en génération. Sorte de chamane, elle peut apporter à l’humanité le bonheur, la joie et les idées positives. Victimes de la civilisation, nous l’avons oubliée. Or, selon Vera Strübi, même si nous sommes éloignées de cette femme, nous sentons sa présence, nous la rencontrons dans nos rêves, nous entendons son appel.

Pour retrouver notre nature ancestrale, Thierry Mugler nous glisse en mains une améthyste : une pierre précieuse synonyme de sagesse, de spiritualité et de sérénité. Le flacon d’Alien, taillé en cabochon, est serti comme un bijou. Les griffes dorées sont acérées, voire agressives. L’ensemble est à la fois étrange et précieux, très  » muglerien « . Le nom est gravé sur la surface lisse du verre, difficilement lisible, on dirait des signes cabalistiques.  » Il faut garder le mystère et la surprise jusqu’au bout, note Vera Strübi. On pourrait imaginer qu’on a trouvé cette pierre en grattant le sable.  »

La fragrance, enfin. Thierry Mugler l’a voulue à l’image de la messagère : mystérieuse, joyeuse, féminine et énergisante. Pour la composer, Dominique Ropion et Laurent Bruyère ont pris leur temps : deux ans et demi. L’ambre blanc est en vedette. Avec son odeur  » animale « , de sable et de plage, il est plus subtil et plus transparent que l’ambre gris. Il se mêle et se fond, tout au long de la fragrance avec le cashmeran, une matière boisée suave et moelleuse. Ces deux notes denses et intenses forment la colonne vertébrale du parfum. La tête est joyeuse et pleine d’énergie. Le jasmin Sambac lui donne ce côté agréable et familier, tout en étant différent.  » On aimait cette idée de jasmin Sambac, souffle Vera Strübi. Savez-vous que le jasmin Sambac était cueilli dans l’Antiquité tous les jours pour être offert aux dieux ? »

Tina Baltzer est Alien

Thierry Mugler, très impliqué dans l’univers de ses parfums et dans leur image, a dirigé toute la campagne de communication. Il voulait pour ambassadrice d’Alien une femme singulière, européenne, mais dotée par la nature d’un visage différent des autres, subtilement métissé par d’autres cultures. Son choix s’est porté sur Tina Baltzer, une blonde étrange, issue d’un père allemand et d’une mère coréenne. Mystique et mystérieuse, elle nous salue d’une main tatouée du nom Alien. De l’autre main, elle nous tend le talisman futuriste et intemporel.  » Alien est le premier parfum spirituel du IIIe millénaire, souligne Vera Strübi. Il est l’antithèse d’un parfum de séduction. En l’adoptant, on se fait plaisir à soi-même, on se recharge d’énergie, pour l’irradier ensuite vers les autres. En s’identifiant à la messagère, on devient une autre femme.  »

Alien a été présenté à la presse internationale  » au bout du monde « , quelque part en Afrique, près de la frontière libyenne, à deux pas de l’oasis de Siwa, perdue dans un désert absolu. Dans l’Antiquité, l’oasis avait une grande renommée. Le temple, dédié au dieu Ammon, attirait de nombreux pèlerins. En 331 avant Jésus-Christ, Alexandre le Grand s’est présenté au temple, après une marche éprouvante, pour se faire confirmer, par l’oracle d’Ammon, ses origines divines. Aujourd’hui, le temple n’est qu’une ruine. Mais le village de Siwa, au milieu de l’oasis, existe toujours. Quinze mille personnes y vivent en paix, loin de la fureur du monde. L’éco-lodge Adrere Amellal (Montagne Blanche) a ouvert ses portes, non loin de là, en 2000. Il a été construit près d’une source naturelle qui ne peut alimenter que 40 chambres. Mounir Neamatalla, consultant du gouvernement égyptien pour l’environnement, a souhaité concrétiser un projet hôtelier soucieux de l’environnement et écologique à 100 %. Les petits pavillons, construits avec des matériaux du pays (mélange de boue et de sel, appelé  » kershef « ) s’inspirent des habitations traditionnelles. Il n’y a pas d’électricité. Les repas (délicieux), préparés avec des légumes bio du potager voisin, cuisent lentement dans des fours alimentés par le bois. C’est une expérience unique et extraordinaire. Dans cet espace grandiose où le silence est tellement présent qu’il devient tactile, on ne se lasse pas, la nuit, de contempler le superbe ciel étoilé et d’essayer de déchiffrer leurs mystères. Alors, on croit, effectivement, à une rencontre avec Alien.

Barbara Witkowska

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