Ornela Vorpsi est albanaise, vidéaste et peintre, et ses nouvelles ressemblent à des confessions familières, des histoires bien de chez elle qu’elle mourait d’envie de raconter à quelqu’un.

L’ennui, évidemment, avec les recueils de nouvelles, c’est que les textes se suivent et qu’il n’est pas toujours simple de glisser de l’un à l’autre. Il faudrait pouvoir laisser passer un peu de temps, comme on le fait entre deux romans, pour souffler un peu ou continuer de sourire le plus longtemps possible. Mais voilà, c’est difficile de ne pas succomber à la tentation de tourner la page pour entamer l’histoire suivante, et plonger dans le délire et les espoirs fous des personnages d’Ornela Vorpsi.

Le titre de l’ouvrage est né d’un fait divers authentique : en 1910, la société de cacao Van Houten a acheté la dernière volonté d’un condamné à mort : au moment de mourir, l’homme devait crier :  » Buvez du cacao Van Houten !  » En échange de quoi, sa famille recevait une somme d’argent confortable. L’homme a crié et Ornela Vorpsi l’Albanaise n’en est pas encore revenue : vit-on vraiment au milieu de cette humanité folle et mercantile ?

Presque tous ses héros, à leur manière, se frottent à un monde où le commerce et la consommation occupent absolument tout l’espace. Ayant fui l’Albanie pour couler en Italie des jours meilleurs, en tout cas économiquement plus rentables, ces destins divers ont tous, grâce à la voix si particulière d’Ornela Vorpsi, quelque chose d’infiniment original et d’exotique, et de très personnel.

L’auteur n’est jamais très loin d’eux, il lui arrive de glisser au milieu de son récit des réflexions qui ressemblent soudain à des petites confidences, des pensées qu’elle lâche l’air de rien, histoire de rappeler qu’il existe encore sur Terre des êtres non encore contaminés, dont l’£il reste capable de percevoir le monde et les objets avec un brin de bon sens :  » Donc pour moi, le petit sac n’était pas un Louis Vuitton comme pour Simone, c’était un petit sac quelconque. Aujourd’hui encore, quand j’en vois un, je me demande : Mais comment peut-on perdre la tête pour ce petit sac plutôt laid ? Où est cette beauté que je n’arrive pas à percevoir ?  »

On ne peut mieux dire, non ?

 » Buvez du cacao Van Houten ! « , par Ornela Vorpsi, Actes Sud, 157 pages.

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