Avec le Centre Mode Design Brussels, le quartier Dansaert, cour battant de la création dans la capitale, se dote d’un nouvel outil pour promouvoir et soutenir ses stylistes et designers. Tour d’horizon, en avant-première.

C’est bien connu : il ne suffit pas d’avoir du talent, encore faut-il le faire savoir. Et ceux qui se lancent dans la mode ou le design n’échappent pas à la règle. Si quelques grands noms belges sont sous les feux de la rampe à Paris ou Milan, pour bon nombre de créateurs le quotidien est fait de stress plus que de strass. Car dès qu’il s’agit de trouver un éditeur, de mettre sur pied un business plan, de vendre une collection aux acheteurs internationaux ou d’obtenir un prêt pour installer un atelier, les créatifs se trouvent bien souvent démunis.  » Ils ne savent pas quels leviers actionner « , résume Véronique Heene, coordinatrice de Modo Bruxellæ, l’ASBL qui promeut la mode bruxelloise auprès du grand public, des médias et des professionnels. Il y a quelque temps, avait donc germé, parmi les intervenants des deux secteurs, l’idée d’une maison de la mode et du design, sorte de centre de référence où chacun pourrait trouver aide et conseils mais aussi formation et moyens de promotion. Mais, faute de budget, le beau projet était resté dans les cartons.

Aujourd’hui, grâce au fonds européen Feder, la Région de Bruxelles-Capitale et la Ville de Bruxelles sont cependant en mesure de donner le coup d’envoi à ce point d’ancrage d’un réseau de savoir-faire. Pas moins de sept millions d’euros seront en effet mis sur la table pour lancer le flambant neuf Centre Mode Design Brussels (CMDB) – un nom pas très glam, mais qui a le mérite de la clarté -, auquel cinq grands types de missions seront confiées.

Outre la formation au management et à la gestion de prise de risque, en partenariat avec les écoles bruxelloises, le centre sera aussi un lieu d’accompagnement dans la recherche d’un job.  » Le secteur de la mode et du design est un gisement d’emplois, souligne Charles Picqué, ministre-président de la Région de Bruxelles-Capitale. En outre, il peut absorber un niveau de qualification parfois modeste, ce qui est une réalité en milieu urbain. Enfin, il est peu « espacivore » et donc bien adapté à un développement en ville.  » Aujourd’hui, Bruxelles compterait ainsi quelques deux cents emplois directs dans le design, environ cent septante créateurs de mode et un nombre identique d’entreprises d’habillement. Au total, deux mille personnes travailleraient ainsi dans des sociétés bruxelloises de création de mode stricto sensu – chiffre auquel il faut bien entendu additionner les postes qui y sont liés, en amont et en aval. Et, avec quelque sept cents étudiants inscrits dans les cinq écoles de stylisme et de design, le vivier est de taille.

Une structure innovante

Le CMDB étudiera aussi l’évolution des deux secteurs par rapport à la concurrence nationale et internationale,  » ce qui permettra aussi aux pouvoirs publics d’ajuster leurs interventions « , poursuit Charles Picqué. Enfin, il aura aussi un double rôle à jouer en termes d’image, puisqu’il lui revient à la fois de promouvoir la création bruxelloise à l’étranger et de développer un pôle touristique autour de la mode et du design. Car ce nouveau centre de convergence des savoirs professionnels se veut aussi ouvert au public, à travers des expos, des vitrines consacrées à de jeunes talents ou tout autre type d’événements culturels.  » Le problème de Bruxelles, c’est qu’elle est souvent trop modeste, sourit Philippe Close, échevin du tourisme. En mettant la mode et le design en valeur, on va renforcer son image comme ville à l’avant-garde, contemporaine, et gommer le cliché de cité-administrative que certains ont encore parfois à l’esprit. « 

Quant à l’ancrage géographique exact de ce vaisseau amiral de la mode et du design, il n’a pas encore été révélé :  » Nous sommes toujours en train de négocier, confiait Charles Picqué le 9 janvier dernier. On ne voudrait pas que les prix soient revus à la hausse suite à une indiscrétion « . On sait cependant qu’il sera stratégiquement amarré dans le quartier Dansaert, centre névralgique de la création bruxelloise. Tenant compte des aménagements à y apporter, le ministre-président espère une inauguration du bâtiment dès 2009.

La structure du Centre Mode Design Brussels se veut elle aussi innovante. Pas question, en effet, de  » créer un nouveau service public « , reprend Charles Picqué.  » Aujourd’hui, se réjouit Philippe Close, les acteurs de terrain, les associations et les politiques se lancent dans un vrai partenariat.  » Au sein du CMDB travailleront donc de concert des ASBL déjà rompues à la promotion de nos créateurs, comme Modo Bruxellæ, le Centre d’entreprises Dansaert, Bruxelles-Export ou encore Designed in Brussels. Olivier Gilson, cheville ouvrière de cette dernière, se réjouit de cette dynamique nouvelle, qui  » va donner du poids au design belge sur la scène internationale. Il y avait une réelle attente d’une vitrine bruxelloise « . Des cross-over entre la mode et le design, domaines à la fois très différents et très proches par certains aspects, seront également encouragés,  » parce que, souligne Alexandra Lambert, de Bruxelles-Export, ces croisements entre les deux font aussi partie de notre spécificité bruxelloise « . Une spécificité régionale qui, avec l’aide du CMDB, devrait à l’avenir prendre plus d’envergure encore sur le plan international.

Delphine Kindermans

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