Les mannequins grande taille, révolution ou imposture ?

© Vogue Italie
Stagiaire Le Vif

Phénomène de mode, les modèles grande taille ont la cote. De H&M à Raph Lauren, tous succombent à la plus size mania. Saluée par beaucoup, cette nouvelle tendance se heurte cependant à certaines critiques.

Les couturiers et les magazines en raffolent. Les grandes chaînes de prêt-à-porter aussi. Petit à petit, les mannequins grande taille font leur place dans le monde très fermé de la mode.

Conscientisée par les différents scandales anorexico-photoshopés, la fashion sphère prône désormais une mode plus en phase avec les femmes.

Mais derrière cet altruisme bienveillant se cache bien souvent une stratégie des plus subtiles.

Phénomène de mode

C’est un fait : les mannequins « plus size » ont la cote.

De Ralph Lauren à H&M, en passant par l’édition québécoise du magazine Elle, tous s’arrachent les services de ces jeunes femmes pulpeuses et sexy.

Le Huffington Post écrivait ainsi au mois de juin, « les mannequins grande taille sont en train de bousculer le jeu de la mode et de redéfinir les règles du mannequinat. C’est une question de temps ».

Dans le même sens, BBC News saluait, au mois de mai, la prise de conscience de H&M et dédiait un reportage à Jennie Runk (24 ans, taille 46), égérie de la nouvelle collection de maillots de bain grande taille du géant suédois.

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Réaction aux critiques anti-anorexiques, le phénomène « grande taille  » n’épargne aucun acteur du monde de la mode.

Les hebdomadaires féminins multiplient les articles en éloge des mannequins bien en chair, des agences de mannequins « ronds » et « sains » fleurissent un peu partout sur le globe, les grandes chaînes de prêt à porter lancent des collections grande taille, des magazines spécialement dédiés aux rondes sont créés…

Mais si l’industrie de la mode semble se rendre compte des conséquences de la glorification de la maigreur, cela ne signifie pas pour autant que les mannequins grande taille soient parfaitement intégrés à la fashion sphère.

Hypocrisie et coups de marketing

La pulpeuse blonde Whitney Thompson, gagnante de la dixième édition de Top Model USA, déclarait en 2009 au L.A. Times : « Je ne suis pas une personne de grande taille, je suis un modèle de grande taille. Dans la rue, je suis maigre. Aux castings, je suis une vache ».

Pour beaucoup, l’actuelle tendance des faiseurs de mode n’est d’ailleurs que pure imposture. Sur un blog, on peut ainsi lire : « Ce qui me gène vraiment, c’est cette honteuse hypocrisie des acteurs de la mode : pour moi, il est clair et net qu’ils ne font que surfer sur la tendance des mannequins curvy comme on les appelle pour rester politiquement correct ».

Et en termes d’hypocrisie, Karl Lagerfeld décroche la palme d’or. Le couturier, connu pour ses déclarations anti-gros et son amour des mannequins filiformes, a choisi de recourir aux services de modèles plus size à plusieurs reprises.

Après avoir fait poser Miss Dirty Martini pour la couverture du magazine américain V en janvier 2010, Karl, génie du marketing, remettait ça quelques mois plus tard en choisissant Crystal Renn, ancien mannequin anorexique devenu modèle grande taille, pour la campagne publicitaire d’ouverture d’une nouvelle boutique Chanel à New York.

Mais attention : pas question de laisser transparaître les formes de Crystal. Seul son visage, anguleux, apparaissait sur le cliché. Rien d’étonnant de la part celui qui, en 2009, déclarait au magazine Harper’s Bazar : « La mode que je créée est mince et faite pour les personnes minces. Un corps se doit d’être impeccable … Si ce n’est pas le cas, acheter des petites tailles et manger moins de nourriture »…

Pas de défilés

Autre difficulté : si les modèles grande taille sont très prisés sur papier glacé, ce n’est visiblement pas le cas sur les podiums. Peu de couturiers font défiler des mannequins size plus. La raison ? Ils ne mettraient pas suffisamment les vêtements en valeur. Seules les longilignes, véritables cintres humains, seraient à même de séduire les front row des podiums.

Ainsi, il se murmure que lorsque le couturier Mark Fast a décidé, en 2009, de mettre en vedette des femmes de toutes tailles pour son défilé de la Fashion Week londonienne , certains de ses employés auraient été tellement contrarié qu’ils l’auraient quitté.

Des modèles loin de la réalité

Pour Jennie Runk, égérie H&M, « la plupart des femmes considérées comme grande taille sont en réalité dans la moyenne américaine » (vidéo).

Censées humaniser un monde de maigreur auquel les femmes ne parviennent pas à s’identifier, cette nouvelle tendance reste encore loin de la réalité : en Europe, une femme mesure en moyenne 1m63 et pèse 73 kilos. On est bien loin du 1m88 de Robyn Lawley (24 ans, taille 46), égérie Ralph Lauren, ou du 1m78 de Jennie. À quand des mannequins d’1m65 ?

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