Remonter une filière wallonne et revaloriser la laine de chez nous

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A l’heure du local et du naturel, une poignée d’artisans et de créateurs se réapproprient la laine belge et tentent de la faire revivre.

On le sait peu mais pas moins de 140 tonnes de laine de mouton sont mises sur le marché chaque année en Wallonie. Il y a encore quelques années, tout partait tel quel en Asie. C’est que ce matériau avait perdu toute valeur marchande et la filière belge, autrefois florissante, n’en menait pas large. Depuis cinq ans, une petite structure de passionnés tente de remonter une filière, une vraie.

« Après être partie en Chine, notre production revenait dans des containers sous forme d’articles de basse qualité, se souvient Ygaelle Dupiez, fondatrice de la Filière laine. C’était fou, car c’est une matière première noble, durable, locale et aux multiples usages. » La structure s’est donc attelée à sensibiliser le secteur, à commencer par les éleveurs de moutons.

Elle organise des formations et accompagne différents projets, comme ce groupe de quatre créatrices qui s’apprête à lancer une gamme d’objets en feutre baptisée Ell’laine. Chaussons, vêtements, sacs, tapis, luminaires, mais aussi literie et isolation, les utilisations de cette laine locale sont passées de quatre à trente-cinq en quelques années. Aujourd’hui, entre 10 et 12 % de la récolte est valorisée, c’est-à-dire exploitée ici.

« Il y a aujourd’hui un regain d’intérêt chez nous », remarque Frédérique Bagoly, qui a fondé en 2009 la Filature du Hibou, près de Namur. Les éleveurs viennent déposer leurs toisons, et repartent avec des écheveaux. Frédérique réalise également une sélection de fils en petites séries à destination des designers textiles, des artisans ou des particuliers. « Nous avons fait le choix de la qualité plutôt que de la quantité. »

Une philosophie qui trouve écho auprès des étudiants d’Anne Masson, professeur de design textile à La Cambre. Elle se fournit dans cet établissement wallon pour ses cours. « Cela me permet d’introduire la question de l’ancrage local et de sensibiliser les élèves. » Faire connaître la matière première est en effet fondamental pour l’avenir de la filière.

Mais la laine belge n’est pas faite pour tous les usages. La qualité peut varier fortement et les quantités sont limitées, un frein pour les grandes productions. Aussi, même si certains métiers ont survécu chez nous – à l’image de Traitex à Verviers, l’une des dernières entreprises de lavage de cette matière en Europe -, de nombreux autres ont disparu, compliquant aussi la tâche des créateurs. « Il est important désormais d’assurer une transition avec les générations actuelles et futures », estime Frédérique Bagoly.

La prochaine étape sera de mettre sur pied un label. La filière travaille aussi à une boutique en ligne pour ces objets.

Louise Jamar

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