La saga Nicole Kidman

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Déterminée, soumise, consacrée, égarée, plébiscitée… voilà plus de vingt ans que Nicole Kidman fait valser les étiquettes. Bientôt à l’affiche de Rabbit Hole, elle impose à nouveau le respect. Elle revient de loin. Rappel des épisodes précédents.

Episode 1, où Nicole fait du vélo et du bateau Au début, il n’y a aucune raison de croire pour elle à un avenir pailleté. Naissance à Honolulu, premières années à Washington, jeunesse en Australie. Si encore elle foulait le bush pieds nus ou surfait sur des vagues gigantesques, mais non. Nicole est une Australienne parmi tant d’autres. Et, malgré son goût prononcé pour le ballet et pour le piano, rien ne la prédestine à devenir une star internationale. Elle a peur des papillons, est allergique aux fraises, ne supporte pas le soleil à cause de la blancheur de sa peau… Une plaie! Et pas loin d’être la première de sa classe, à lire toute la journée dans sa chambre: Guerre et paix, Bel-Ami, Le Docteur Jivago… Rien que du romantisme et, si possible, que ça finisse mal. La mère, infirmière, et le père, psychologue, sont plutôt contents: ils veulent que leur fille se débrouille seule et soit indépendante. Ils n’ont rien compris. Nicole, en réalité, veut des câlins et cherche à capter leur attention. Après la carte de la mélancolie, elle abat celle de la rébellion et, à 16 ans, devient comédienne. Enfin, un truc approchant. Car qui a vu Le Gang des BMX, film digne de la Bibliothèque verte où Nicole est une reine du bicross, se souvient plus de sa trombine tout en frisettes et en taches de rousseur que de sa prestation artistique. Un rôle de contestataire dans une série sur le Vietnam lui vaut plus d’éloges et lui donne le droit de monter sur le pont de Calme blanc, thriller maritime qui lui fait traverser le Pacifique, direction Hollywood.

Episode 2, où Nicole joue au docteur et embrasse Tom On n’y croit pas plus. Certes, du haut de son 1,80 mètre, Nicole provoque un certain effet, surtout en blouse blanche et talons aiguilles. C’était en 1990, dans Jours de tonnerre, produit vroum-vroum dévolu à la star Tom Cruise, lequel avait choisi la rousse incendiaire pour incarner son faire-valoir. Nicole devient connue, mais comme femme de, puisque l’acteur, apparemment satisfait, l’épouse illico. Elle a 23 ans et en attendra cinq avant de trouver un rôle digne de ce nom, une ambitieuse miss météo dans Prête à tout, de Gus Van Sant. A part cela, franchement, c’est que du malheur. Deux fausses couches, la scientologie, Batman Forever… Et, quand elle joue dans Portrait de femme, de Jane Campion, elle fait les frais d’une comparaison qui ne la concerne pas: « La Leçon de piano, c’était mieux. » Pourtant, on l’aime, Nicole. Mais on la sent coincée, obligée de refuser les tournages qui la séparent plus de deux semaines de son mari et de leurs deux enfants adoptifs. En 1999, elle passe avec Tom dans le catalyseur Eyes Wide Shut, de Stanley Kubrick. Une histoire de couple qui va mal. La réalité rattrape la fiction. Nicole va mal. Très mal. Mais elle est enfin libre.

Episode 3, où Nicole devient enfin une star
Cela commence avec Moulin Rouge!, de Baz Luhrmann. Elle n’est pas encore officiellement divorcée, mais l’influence délétère de son futur ex est déjà totalement éventée. Elle éblouit le Festival de Cannes 2001 et donne toute la mesure de son talent. Puis celle de son intelligence, en acceptant Les Autres, d’Alejandro Amenabar, où elle devient une héroïne hitchcockienne dans le film le plus subtilement angoissant de la décennie. Elle tourne ce chef-d’oeuvre en Espagne, tandis que Cruise rime avec Cruz à Hollywood. Les paparazzis sont sur les dents. Ils se casseront le nez sur celui de Nicole, une prothèse fabriquée pour son rôle de Virginia Woolf dans The Hours, qu’elle garde hors des plateaux pour ne pas être reconnue. Elle le sera néanmoins par ses pairs, auréolée d’un oscar pour sa composition. Touchée par la grâce, elle se prénommera encore ainsi (après Les Autres) dans Dogville, de Lars von Trier. C’est beau.

Episode 4, où Nicole fait n’importe quoi
Nicole touche 4 millions de dollars par an pour être l’égérie de Chanel 5, tant mieux! Nicole retrouve l’amour auprès d’un chanteur de country (Keith Urban) qui lui fait une enfant, génial! Nicole joue dans Retour à Cold Mountain, Ma sorcière bien-aimée et Australia, au secours! Du tout-mou au tout-raté, en passant par le tout-pourri, l’actrice accumule les mauvais choix. Comme grisée par son bonheur personnel. Comme atteinte d’une attitude je-m’en-foutiste. Pas moyen de savoir exactement: elle est illisible! Botoxée à outrance, elle n’exprime plus rien. Et ne rapporte plus grand-chose non plus. Rappelée à l’ordre par les médias et par son banquier, elle jure d’arrêter le massacre. Promis: on lui verra une ou deux jolies rides. Et de bons films.

Episode 5, où Nicole revient sur terre
Chose promise, chose faite. Le visage est encore tendu, mais traduit magnifiquement la douleur d’une mère éplorée dans Rabbit Hole, de John Cameron Mitchell. Jeune maman aux anges dans la vie, Nicole joue à l’écran l’impensable: celui d’une femme qui a perdu son fils et qui, six mois après, tente de se reconstruire. C’est son mari qui l’a incitée à accepter ce rôle. Et c’est le même qui l’a convaincue de vivre dans un ranch au fin fond du Tennessee. Où elle affûte ses projets: The Danish Girl, où elle incarnera un transsexuel, ou la pièce Oncle Vania, qu’elle veut jouer en russe. Ouf! La saga continue.

4 dates clés: Calme blanc (1989), de Philip Noyce. Un thriller au beau milieu des éléments.

Rabbit Hole (avril 2011). L’histoire d’un couple qui tente de redonner du sens à sa vie.

Eyes Wide Shut (1999), de Stanley Kubrick, avec Tom Cruise. Un homme, une femme…

Moulin Rouge! (2001), de Baz Luhrmann, film dans le Paris de la Belle Epoque.

Par Christophe Carrière, Lexpress Styles




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