DIRECTEUR ARTISTIQUE D’HERMÈS

Quels sont les souvenirs qui vous viennent à l’esprit quand vous repensez aux collections de Martin Margiela pour Hermès ?

Je me souviens d’un style qui s’est très vite imposé comme une évidence, produit de la parfaite intelligence qu’avait Martin Margiela de notre maison, de son histoire et finalement de ce qu’elle incarne. Mon père avait créé la surprise en le recrutant : Margiela était alors surtout connu pour une vision conceptuelle du vêtement. Mais Jean-Louis Dumas avait suivi une intuition qui le trompait très rarement et il en a été récompensé par la façon dont Martin a su exprimer l’essence d’Hermès : la valeur cardinale attribuée à l’artisanat et au savoir-faire, le raffinement dans la simplicité, la fonctionnalité et le confort, une élégance discrète. Et puis il y a aussi les idées nouvelles que Martin a apportées et qui sont devenues des incontournables chez nous : le bracelet double tour pour la montre Cape Cod et le losange de soie. En 2002, de retour à Paris après avoir été directeur général de la filiale britannique, j’ai oeuvré, aux côtés de mon père, au développement de l’ensemble des collections. J’ai alors collaboré étroitement avec Martin sur sa dernière collection pour Hermès. Nous partagions tous un même sentiment : nous n’avions pas affaire à une révolution, mais à une révélation du véritable Hermès.

Que reste-t-il de Martin Margiela aujourd’huichez Hermès ?

Il a laissé une empreinte très profonde dans l’histoire de la maison. Il est peut-être le premier à avoir donné à nos vêtements féminins une identité aussi forte. Son travail a contribué puissamment à la reconnaissance d’un style propre à Hermès. Nadège Vanhee-Cybulski, qui est directrice artistique du prêt-à-porter Femme depuis juillet 2014 et qui avait collaboré au début de sa carrière avec Martin Margiela, considère son héritage comme faisant partie intégrante de ses références. Avec son talent propre, elle incarne à merveille une sensibilité au confort du vêtement, au toucher de la matière, que Martin Margiela a su cultiver.

A préparer cette expo avec le MoMu et Martin Margiela, quel regard  » neuf  » posez-vous sur ces six années de collaboration ?

Quinze ans plus tard, ce qui me frappe, c’est que ses douze collections pour notre maison n’ont pas pris une ride, comme si elles étaient intemporelles. Mieux encore, elles se sont en quelque sorte patinées. Avec le temps, ce qui pouvait apparaître comme un peu austère se révèle d’une justesse impeccable, d’une sobriété somptueuse et voluptueuse. Elles sont aujourd’hui plus désirables que jamais. J’ai aussi compris qu’il a contribué à former mon goût et mon oeil. Martin Margiela, c’est très Hermès !

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