On ne les imaginait pas prescripteurs de tendance, encore moins sans doute pour ce qui se trame sous la couette et pourtant… Seraient-ce la reine Elisabeth II et son mari Philip qui nous ont glissé cette idée ? Comme Sa Majesté et le prince consort ou une série d’époux célèbres, nous serions de plus en plus nombreux à faire chambre à part. On savait les pays anglo-saxons, en particulier les Etats-Unis, coutumiers de cette pratique – et ce plusieurs décennies après l’abolition du code Hays qui, jusqu’en 1966, interdisait à Hollywood de montrer des acteurs occupant un même lit. Au point que l’Association américaine des constructeurs immobiliers estime que, dans un avenir très proche, près de six maisons nouvellement érigées sur dix compteront deux chambres matrimoniales. Mais voilà que ce penchant gagne la bonne vieille Europe. Pourtant, chez nous, la couche conjugale est la règle depuis le XVIIIe siècle. L’Eglise l’avait alors imposée pour booster la reproduction tout en offrant la parade au paganisme, à en croire Pascal Dibie, qui signe Ethnologie de la chambre à coucher chez Métailié. Avant cela, rappelle l’auteur, la famille entière se pelotonnait sur une unique grande paillasse. Trop choquant pour le clergé, aurait-il parfois l’esprit mal tourné ?

Aucun accès de pudibonderie, par contre, dans le choix récent des Belges de dormir seuls. Si, selon une étude commanditée par une chaîne hôtelière de renom, 50 % des couples bruxellois ne passent plus leurs nuits ensemble, les statistiques tombant à un sur quatre en Wallonie et un sur trois en Flandre, c’est plutôt pour des raisons de confort. Ainsi, les partisans de la ségrégation amoureuse invoquent les ronflements de l’autre ou ses mouvements nocturnes pour justifier cette décision. Mais d’autres, plus romantiques, y voient une manière de ne pas sombrer dans la routine. A condition de se donner des rendez-vous réguliers, Jean-Claude Kaufmann, qui pour son dernier ouvrage Un lit pour deux (JC Lattès) a scruté nos moeurs sous l’édredon à la loupe, va jusqu’à déceler là une potentielle renaissance de l’érotisme. D’un autre côté, on sait que partager son sommeil favorise la production d’ocytocine, hormone bénéfique notamment pour l’attachement, la tendresse, l’anxiété et la tension artérielle trop élevée. Alors, en solo ou à duo, choisissez votre camp. Mais, à quelques encablures de la Saint-Valentin, faites l’amour, pas la guerre.

Delphine Kindermans

Une potentielle renaissance de l’érotisme.

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